SUR LE PREMIER MOYEN, PRIS EN SES DIVERSES BRANCHES : ATTENDU QUE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE IL RESULTE QU'A SON AUDIENCE DU 6 JANVIER 1967, LE TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE LA SEINE, AYANT A CONNAITRE D'UNE EXCEPTION D'INCOMPETENCE SOULEVEE PAR JODON DE VILLEROCHE, DEFENDEUR A UNE ACTION EN REVENDICATION DE MEUBLES, MAITRE Y..., CONSEIL DE LA DAME EDITH X..., A FAIT ETAT, AU COURS DE SA PLAIDOIRIE, D'UNE CONDAMNATION A DEUX MOIS D'EMPRISONNEMENT, AVEC SURSIS, POUR OUTRAGE A OFFICIER MINISTERIEL, PRONONCEE EN 1965 CONTRE LEDIT JODON DE VILLEROCHE, MAIS AMNISTIE PAR LA LOI DU 18 JUIN 1966, ET A VERSE AUX DEBATS DES EXTRAITS DE PRESSE RELATIFS A CETTE CONDAMNATION ;
QU'IL EST FAIT GRIEF A LA COUR D'APPEL D'AVOIR DECLARE RECEVABLES LES CONCLUSIONS PRISES PAR JODON DE VILLEROCHE DEVANT LE TRIBUNAL, APRES LA MISE EN DELIBERE DE LA CAUSE, EN VUE DE SE FAIRE DONNER ACTE, POUR APPLICATION DE L'ARTICLE 41, ALINEA 5, DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881, DE SES RESERVES D'INTRODUIRE CONTRE MAITRE Y..., SOIT UNE ACTION PUBLIQUE, SOIT UNE ACTION CIVILE ;
QUE SELON LE POURVOI, D'UNE PART, L'IRRECEVABILITE D'ORDRE PUBLIC DE CONCLUSIONS, PRISES APRES LA MISE EN DELIBERE, NE PEUT ETRE COUVERTE QUE PAR LA REOUVERTURE DES DEBATS AFIN DE PERMETTRE LA DISCUSSION CONTRADICTOIRE DE PIECES OU MOYENS NOUVEAUX, ET A LA CONDITION QUE LES CONCLUSIONS TARDIVES CONTIENNENT UNE DEMANDE EXPRESSE DE RELEVE DE FORCLUSION ;
QUE, D'AUTRE PART, LA REOUVERTURE DES DEBATS N'AUTORISE PAS LE DEPOT DE NOUVELLES CONCLUSIONS, ET QU'IL DEVAIT D'AUTANT PLUS EN ETRE AINSI, EN L'ESPECE, QUE LE JUGEMENT ORDONNANT LA REOUVERTURE DES DEBATS, DENATURE PAR L'ARRET ATTAQUE, AURAIT EXPRESSEMENT LIMITE LA PORTEE DE CETTE MESURE A LA COMMUNICATION DES DOSSIERS AU MINISTERE PUBLIC ;
MAIS ATTENDU QUE LES JUGES DU SECOND DEGRE ONT DECLARE IRRECEVABLES LES CONCLUSIONS PRISES PAR JODON DE VILLEROCHE, ENTRE LA CLOTURE DES DEBATS, PRONONCEE LE 6 JANVIER 1967, ET LEUR REOUVERTURE, ORDONNEE LE 27 JANVIER SUIVANT ;
QU'ILS ONT EN REVANCHE ESTIME, A BON DROIT, RECEVABLES LES CONCLUSIONS PRISES POSTERIEUREMENT A CETTE DERNIERE DATE ;
QU'EN EFFET, CONTRAIREMENT AUX DIRES DU DEMANDEUR AU POURVOI, LE JUGEMENT DU 27 JANVIER 1967, QUI N'A PAS ETE DENATURE, NE LIMITAIT NULLEMENT LA PORTEE DE SA DECISION ;
QU'A LA SUITE DE LA MESURE ORDONNEE D'OFFICE PAR LE TRIBUNAL, LES PARTIES AVAIENT LA FACULTE DE SOULEVER TOUS LES MOYENS NOUVEAUX, QUI, AINSI QU'IL RESULTE DES PIECES DU DOSSIER DE LA PROCEDURE, ONT FAIT L'OBJET, DEVANT LES JUGES DU FOND, DE DEBATS CONTRADICTOIRES ;
QUE LE PREMIER MOYEN NE SAURAIT DONC ETRE ACCUEILLI DANS AUCUNE DE SES BRANCHES ;
SUR LE DEUXIEME MOYEN, PRIS EN SES DEUX BRANCHES : ATTENDU QU'IL EST ENCORE SOUTENU, D'UNE PART, QUE LA GENERALITE DES TERMES DE L'ARTICLE 41, PARAGRAPHE 5, DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881, INTERDIRAIT D'EXCLURE DE L'IMMUNITE LES PROPOS DE L'AVOCAT TENDANT A FAIRE RESSORTIR L'ESPRIT DE CHICANE DE L'ADVERSAIRE, SANS ATTEINTE A SA VIE PRIVEE, ET DANS UN BUT UTILE A LA DEFENSE ;
QUE, D'AUTRE PART, LES PREMIERS JUGES, QUI AVAIENT REJETE L'EXCEPTION D'INCOMPETENCE, LUI RECONNAISSANT AINSI UN CARACTERE DILATOIRE ET CONTRAIRE A UNE BONNE ADMINISTRATION DE LA JUSTICE, N'AURAIT PAS EU LE DROIT DE DECLARER INUTILES A LA DEFENSE ET ETRANGERS A LA CAUSE, LES PROPOS ET DOCUMENTS QUE L'AVOCAT AVAIT INVOQUES EN VUE DE RENFORCER SON MOYEN SOUTENANT QUE L'EXCEPTION PROCEDAIT DE L'ESPRIT HABITUEL DE CHICANE, DE LA PARTIE QUI L'AVAIT SOULEVEE ;
MAIS ATTENDU QUE L'ARRET ATTAQUE, REPRENANT LES MOTIFS DU JUGEMENT ENTREPRIS, A CONSTATE, DANS LES LIMITES DE SON POUVOIR SOUVERAIN D'APPRECIATION, QUE LE RAPPEL PAR MAITRE Y..., " DE LA CONDAMNATION PENALE PRONONCEE CONTRE JODON DE VILLEROCHE ET DES CIRCONSTANCES DANS LESQUELLES CETTE CONDAMNATION ETAIT INTERVENUE, NE POUVAIT MANIFESTEMENT PAS SERVIR A JUSTIFIER LES CONCLUSIONS DE SA CLIENTE, ET NE POUVAIT ETRE D'AUCUNE UTILITE POUR LA SOLUTION DU LITIGE " ;
QU'AINSI, LE DEUXIEME MOYEN NE PEUT QU'ETRE ECARTE;
ET SUR LE TROISIEME MOYEN, PRIS EN SES DEUX BRANCHES : ATTENDU QU'IL EST ENFIN REPROCHE A LA COUR D'APPEL D'AVOIR ORDONNE LA SUPPRESSION DANS UN DOSSIER CIVIL, EN TANT QUE DIFFAMATOIRES, DES COTES DE PLAIDOIRIE ET DES DOCUMENTS VERSES AUX DEBATS PAR L'AVOCAT D'UNE PARTIE, CONCERNANT UNE CONDAMNATION PENALE POUR OUTRAGES A OFFICIER MINISTERIEL, ANTERIEUREMENT PRONONCEE CONTRE L'AUTRE PARTIE, MAIS AMNISTIEE PAR LA LOI DU 18 JUIN 1966, AU SEUL MOTIF QUE L'AMNISTIE COMPORTERAIT UNE INTERDICTION ILLIMITEE DE RAPPELER LA CONDAMNATION, SOUS QUELQUE FORME QUE CE SOIT, ALORS, D'UNE PART, QUE LA LOI PRECITEE PRECISE, EN SON ARTICLE 25, QU'ELLE NE PREJUDICIE PAS AU DROIT DES TIERS, QUE L'INTERDICTION DE RAPPELER LA CONDAMNATION AMNISTIEE NE FAIT DONC PAS OBSTACLE A CE QU'IL SOIT FAIT ETAT, PAR UN TIERS, DANS UNE ACTION CIVILE, DE FAITS AMNISTIES, ABSTRACTION FAITE DE LEUR QUALIFICATION DELICTUELLE ;
QUE, D'AUTRE PART, L'AMNISTIE N'ETAIT PAS EN ELLE-MEME DE NATURE A INTERDIRE, EN L'ESPECE, A L'AVOCAT DE RAPPELER LES FAITS IMPUTES A LA PARTIE ADVERSE, NI A DONNER UN CARACTERE DIFFAMATOIRE AUX PROPOS ET PRODUCTIONS INCRIMINES, ET QUE LA DECISION ATTAQUEE, EN ORDONNANT LA SUPPRESSION DE CES PROPOS ET PRODUCTIONS, POUR CET UNIQUE MOTIF, ERRONE EN DROIT, MANQUERAIT DE TOUTE BASE LEGALE ;
MAIS ATTENDU QUE LA LOI DU 18 JUIN 1966 " INTERDIT A TOUTE PERSONNE DE RAPPELER, SOUS QUELQUE FORME QUE CE SOIT, LES CONDAMNATIONS PENALES EFFACEES PAR L'AMNISTIE " ;
ATTENDU, IL EST VRAI, QU'AUX TERMES DU MEME TEXTE, CETTE INTERDICTION NE DOIT PAS PREJUDICIER AUX DROITS DES TIERS ;
QU'ELLE NE FAIT DONC PAS OBSTACLE A CE QUE, DANS UNE INSTANCE CIVILE, IL PUISSE ETRE FAIT ETAT D'ANTECEDENTS JUDICIAIRES, DONT LA CONNAISSANCE EST INDISPENSABLE POUR ECLAIRER, EN FAIT ET EN DROIT, LA SITUATION SOUMISE AU TRIBUNAL ;
QU'EN L'ESPECE, LES JUGES DU FOND ONT, AINSI QU'IL A DEJA ETE RAPPELE, SOUVERAINEMENT RECONNU QUE LE RAPPEL DE LA CONDAMNATION ANTERIEUREMENT PRONONCEE CONTRE JODON DE VILLEROCHE, MAIS AMNISTIEE, " NE POUVAIT MANIFESTEMENT PAS SERVIR A JUSTIFIER LES CONCLUSIONS DE LA DEMOISELLE X..., ET NE POUVAIT ETRE D'AUCUNE UTILITE POUR LA SOLUTION DU LITIGE, S'AGISSANT D'UN FAIT ETRANGER A LA CAUSE " ;
QUE, PAR CES SEULES CONSTATATIONS, LA COUR D'APPEL A, SUR CE POINT, ENCORE DONNE UNE BASE LEGALE A SA DECISION DES LORS QU'IL EN RESULTAIT QUE Y..., POUR SE SOUSTRAIRE A L'APPLICATION STRICTE DES DISPOSITIONS DE LA LOI PRECITEE, NE SAURAIT AVOIR AGI POUR LA DEFENSE D'UN INTERET LEGITIME ;
ET ATTENDU QUE LE CARACTERE INJURIEUX DES COTES DE PLAIDOIRIE CONTENANT LES PROPOS REPROCHES, ET DES EXTRAITS DE PRESSE S'Y RAPPORTANT, RESULTE DE L'ENSEMBLE DES MOTIFS DE LA DECISION ATTAQUEE ;
QUE LA COUR D'APPEL A DONC PU EN ORDONNER LA SUPPRESSION DANS LE DOSSIER CIVIL, TANT PAR APPLICATION DES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 41, PARAGRAPHE 4, DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881, QUE DE L'ARTICLE 1036 DU CODE DE PROCEDURE CIVILE ;
QU'AINSI, LE TROISIEME MOYEN NE PEUT QU'ETRE REJETE ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU, LE 3 JUILLET 1968, PAR LA COUR D'APPEL DE PARIS