Sur les deux moyens réunis du pourvoi principal et du pourvoi incident, qui sont identiques : .
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que, pour les besoins de leur réinstallation professionnelle, plusieurs rapatriés ont acquis une société, dénommée Société Nouvelle Mauguio-Matériaux, dirigée par l'un d'entre eux, M. Y... ; que les dettes de la Société Nouvelle Mauguio-Matériaux vis-à-vis de la Banque Populaire du Midi (BPM) et de la Société marseillaise de crédit (SMC) ont été cautionnés par M. Y..., les époux A..., M. X... et M. Z... ; que, par décision du 12 juin 1984, dont le caractère irrévocable n'est pas contesté, le président de la Commission de remise et d'aménagement des prêts aux rapatriés de Montpellier, saisi par M. Y..., a décidé la suspension des poursuites en application de l'article 9 de la loi du 6 janvier 1982 ; que la SMC et la BPM ont alors engagé des poursuites contre les époux A..., M. X... et M. Z... en leur qualité de caution solidaire, et que ces derniers ont demandé à bénéficier de la suspension des poursuites dont bénéficiait le débiteur principal ; que l'arrêt confirmatif attaqué a accueilli la demande au motif qu'une décision de suspension des poursuites étant intervenue en faveur de la société Mauguio-Matériaux, les cautions devaient en bénéficier ;
Attendu que la SMC fait grief à la cour d'appel d'avoir ainsi statué alors que, d'une part, la décision du 12 juin 1984 aurait été dénaturée en ce sens qu'elle n'aurait pas décidé la suspension des poursuites envers la société débitrice, la société Mauguio-Matériaux, mais seulement envers les cautions, les époux Y... ; alors que, de deuxième part, le droit de solliciter la suspension des poursuites n'est conféré qu'à ceux qui ont la qualité de rapatrié et pour des dettes antérieures au 31 mai 1981, de sorte que l'arrêt serait dépourvu de base légale pour n'avoir pas constaté la qualité de rapatrié des cautions et l'antériorité de leur dette par rapport au 31 mai 1981 ; alors que, de troisième part, la cour d'appel se serait contredite en retenant que la suspension des poursuites bénéficiait à la Société Nouvelle Mauguio-Matériaux tout en relevant que les époux Y... étaient poursuivis en qualité de caution ; alors que, de quatrième part, au cas de multiplicité de caution, la remise dont bénéficie l'un des cofidéjusseurs est sans incidence sur la validité des poursuites entreprises envers les autres ; et alors que, enfin, la suspension des poursuites prononcée en application des articles 7 et 9 de la loi du 6 janvier 1982 serait personnelle à la partie qui en bénéficie, de sorte qu'en l'étendant aux cautions, l'arrêt aurait violé les articles 1134, 1165, 2011 et 2036, alinéa 2, du Code civil ;
Mais attendu, d'abord, que la décision du 12 juin 1984 qui, dans ses motifs, faisait état non seulement des poursuites dirigées contre M. Y... en sa qualité de caution, mais également de celles dirigées par plusieurs créanciers contre la Société Nouvelle Mauguio-Matériaux, a, dans son dispositif, dit qu'il serait sursis " à toutes poursuites " jusqu'à décision de la Commission de remise et d'aménagement des prêts aux rapatriés ; qu'ainsi, c'est sans dénaturation ni contradiction de motif que la cour d'appel a retenu que cette décision suspendait toutes les poursuites engagées contre le débiteur principal cautionné ;
Attendu, ensuite, que la demande présentée par les cautions solidaires, M. X..., M. Z... et les époux A..., portait uniquement sur l'extension à leur profit de la suspension des poursuites consentie au débiteur principal et qu'il n'a jamais été soutenu que les dettes cautionnées de ce débiteur fussent postérieures au 31 mai 1981 ; qu'ainsi, il était indifférent que ces cautions aient ou non la qualité de rapatrié ou que leur propre engagement de caution fût postérieur à la date précitée, le seul point en litige étant celui du droit de la caution d'opposer, en application de l'article 2036 du Code civil, l'exception tirée de la suspension des poursuites accordée au débiteur principal, observation étant faite que l'arrêt attaqué a expressément statué sur le fondement de cette disposition ;
Attendu, enfin, que, contrairement à l'allégation du moyen, le droit de demander une suspension des poursuites en application des articles 7 et 9 de la loi du 7 janvier 1982 n'est pas purement personnel au débiteur principal, au sens de l'article 2036 du Code civil ; qu'en effet, ce droit est inhérent à la nature même de la dette du débiteur principal rapatrié, dette qui, s'agissant de l'application de l'article 9 de la loi précitée, doit être directement liée à son exploitation et à raison de laquelle il a, d'une part, demandé l'octroi d'un prêt de consolidation - lequel, aux termes de l'article 1° du décret n° 85-289 du 1er mars 1985, est affecté exclusivement au remboursement de cette dette - et, d'autre part, sollicité la suspension des poursuites jusqu'à l'octroi effectif du prêt de consolidation ; qu'il s'ensuit que ces textes ont créé une exception qui, n'étant pas personnelle au débiteur principal, peut être opposée par la caution ; que l'arrêt est ainsi légalement justifié et que les moyens ne peuvent être accueillis ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi principal et le pourvoi incident