Sur le troisième moyen :
Vu l'article 17 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ;
Attendu que, selon ce texte, le Conseil de l'Ordre a pour attribution de traiter toutes questions intéressant l'exercice de la profession d'avocat et de veiller à l'observation des devoirs des avocats ainsi qu'à la protection de leurs droits ; qu'il en résulte que les Ordres ne peuvent ajouter des restrictions à l'exercice de la profession qui seraient contraires à la loi ou aux libertés fondamentales reconnues aux citoyens ;
Attendu que le Conseil de l'Ordre des avocats au Barreau de Senlis a été saisi par M. X..., avocat, d'une demande tendant à ce qu'il soit fait défense à la société civile professionnelle Y..., avocats (la SCP) d'installer son cabinet dans l'immeuble où est situé le sien ; que, par décision du 5 juillet 1984, le Conseil de l'Ordre a estimé que la SCP avait commis une infraction à la délicatesse en négligeant de faire part de son intention à M. X... et souhaité qu'elle revoie ses projets et, si elle les maintenait, qu'elle les réalise avec l'accord de M. X... ; que la SCP s'est installée le 1er octobre 1984 dans cet immeuble ; que M. X... ayant dénoncé ce fait au Conseil de l'Ordre, celui-ci a, par décision du 27 mars 1985, prononcé la peine disciplinaire du blâme contre M. Y... ; que, saisie par cet avocat d'un appel contre les décisions des 5 juillet 1984 et 27 mars 1985, la cour d'appel a confirmé la première de ces décisions en ce qu'elle avait renvoyé la SCP à rechercher un accord avec M. X... et a prononcé la peine de l'avertissement contre M. Y..., qui, en réalisant son installation, avait manqué au devoir de délicatesse qui est de règle entre avocats ;
Attendu qu'en statuant ainsi, aux motifs qu'il est interdit à l'avocat de passer outre à l'opposition de son confrère sans avoir, au préalable, fait régler le différend en sa faveur par les autorités ordinales et que la SCP s'exposait, faute de ce faire, à devoir renoncer à son projet d'installation, sous peine de sanction disciplinaire, la cour d'appel, qui a ainsi sanctionné l'exercice de la liberté fondamentale qu'avait M. Y... d'installer son cabinet où il le désirait, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier et le deuxième moyen,
CASSE ET ANNULE l'arrêt rendu le 16 septembre 1985 entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai