Sur le moyen unique, pris en sa première branche du pourvoi principal de l'office public d'HLM d'Ivry-sur-Seine et sur le moyen unique du pourvoi incident de Mme X..., qui sont identiques :
Vu l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790, le décret du 16 fructidor an III et l'article 4 de la loi du 28 pluviôse an VIII ;
Attendu que l'office public d'HLM d'Ivry-sur-Seine (l'OPHLM) a fait édifier un immeuble en bordure d'un terrain dépendant de la copropriété de l'immeuble sis ... ; que, se plaignant d'une emprise sur leur propriété résultant, selon eux, de l'implantation d'un poteau en béton armé soutenant le bâtiment de l'OPHLM, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis ... et MM. Z..., B..., Y... et A..., propriétaires d'appartements dans cet immeuble, ont obtenu la désignation d'un expert ; qu'après dépôt de son rapport, ils ont assigné devant le tribunal de grande instance l'OPHLM et la SEMI, prise en sa qualité " d'aménageur ", pour obtenir, sous astreinte, la démolition des bâtiments et fondations empiétant sur leur propriété, ainsi que la remise en état de leur immeuble et du mur séparatif des deux fonds, outre le paiement de dommages-intérêts ; que l'OPHLM a appelé en garantie Mme X..., architecte, le bureau d'études Berim, M. C..., " économiste " de la construction, et la Société nationale des travaux publics (SNTP) ; que cette dernière a appelé en garantie M. D..., géomètre ;
Attendu que pour retenir sa compétence eu égard à la voie de fait constatée et condamner l'OPHLM à procéder aux démolitions prescrites par l'expert, ainsi qu'à la remise en état du jardin et du mur séparatif des deux fonds, et condamner in solidum Mme X... avec le bureau d'études Berim, la SNTP et M. D... à garantir l'OPHLM des conséquences des démolitions ordonnées, la cour d'appel énonce que la voie de fait commise par l'OPHLM est manifeste, que celui-ci ne conteste ni avoir empiété de 1,28 mètre sur la propriété de ses voisins, ni avoir construit en surplomb, ni avoir fait passer les fondations et canalisations de son immeuble sous et sur le terrain du fonds voisin et que ces agissements sont entachés d'irrégularités flagrantes ne pouvant être rattachés à l'exercice d'un pouvoir appartenant à l'Administration ;
Attendu, cependant, qu'en statuant ainsi, alors que l'OPHLM d'Ivry-sur-Seine est un établissement public à caractère administratif, que les travaux immobiliers qu'il a entrepris pour l'exécution du service public du logement dont il a la charge revêtent le caractère d'ouvrages publics et qu'il n'appartient pas à l'autorité judiciaire de porter atteinte, sous quelque forme que ce soit, à l'intégrité ou au fonctionnement d'un ouvrage public, et cela quand bien même l'implantation dudit ouvrage résulterait d'une voie de fait ou d'une emprise irrégulière, la cour d'appel, qui a excédé ses pouvoirs, a violé les textes susvisés ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident du bureau d'étude Berim :
(sans intérêt) ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen unique du pourvoi principal de l'OPHLM :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 juin 1988, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans