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Sur le moyen unique :
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que les sociétés Ceba et Verdier, ayant créé un lotissement en Haute-Corse, ont demandé à la Compagnie générale des eaux de Bastia (la CGE), qui avait passé avec le département un contrat d'affermage et qui assurait à ce titre le service public de distribution d'eau potable, d'effectuer des branchements sur le réseau ; qu'après achèvement des travaux, la CGE a assigné ces deux sociétés en paiement de la somme de 135 466,79 francs, solde des factures établies le 15 mars 1983 ; que l'arrêt infirmatif attaqué (Bastia, 11 décembre 1989), statuant sur contredit, a décidé que les juridictions de l'ordre judiciaire étaient compétentes pour connaître de ce litige ;
Attendu que les sociétés Ceba et Verdier font grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, d'une part, qu'ainsi que le relève l'arrêt, les travaux litigieux ont été réalisés par la CGE dans le cadre de son contrat d'affermage conclu avec le département de Haute-Corse, contrat qui est nécessairement de nature administrative, de telle sorte qu'en retenant la compétence du juge judiciaire, la cour d'appel a violé la loi des 16-24 août 1790, ensemble l'article 92 du nouveau Code de procédure civile ; alors, d'autre part, qu'il résulte de l'article 35 du cahier des charges que les travaux d'extension du réseau de distribution sont soumis à des dispositions réglementaires, qui excluent la compétence des juridictions judiciaires ; qu'en décidant le contraire, la juridiction du second degré a, de nouveau, violé les textes susvisés ; alors, par ailleurs, que les branchements d'eau réalisés au profit d'un usager constituent un ouvrage public dans la mesure où ils sont l'accessoire de la conduite principale, affectée au service public de la distribution de l'eau ; qu'en considérant que le juge judiciaire était compétent pour connaître d'un litige né lors de la réalisation de travaux publics, alors que ce contentieux relève du juge administratif, l'arrêt attaqué a encore violé la loi des 16-24 août 1790 ; et alors, enfin, qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si, bien que personne privée, la CGE n'agissait pas en vertu de son contrat d'affermage pour le compte exclusif du département, personne de droit public, les juges du second degré ont privé leur décision de base légale au regard de la loi des 16-24 août 1790 et de l'article 92 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que, distinct du contrat d'affermage, le contrat conclu entre les sociétés Ceba et Verdier et la CGE, en vue de la réalisation de branchements sur le réseau de distribution d'eau exploité par cette compagnie, qui ne comporte pas de clauses exorbitantes du droit commun, est un contrat de droit privé, dont les difficultés d'exécution relèvent de la compétence exclusive des tribunaux de l'ordre judiciaire, dès lors que les branchements particuliers effectués au bénéfice de personnes privées ne constituent pas des ouvrages publics ; que la cour d'appel n'avait pas davantage à rechercher si la CGE avait agi pour le compte exclusif du département de Haute-Corse, dès lors que les raccordements avaient été effectués dans le cadre d'un service public industriel et commercial ;
Qu'il s'ensuit que le moyen ne peut être retenu en aucune de ses quatre branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi