Sur le premier moyen :
Attendu, selon les arrêts attaqués (Orléans, 14 janvier 1988 et 26 octobre 1989), statuant sur renvoi après cassation, que M. Y... Bode, devenu propriétaire d'un appartement donné en location, en 1950, aux époux X..., leur a fait délivrer congé pour le 1er janvier 1980 et les a assignés aux fins de déclaration de validité du congé, d'expulsion et de paiement d'une indemnité d'occupation ; que la loi du 22 juin 1982 ayant été promulguée après qu'un jugement du 9 juin 1982 ait accueilli la demande, les époux X... ont demandé, par acte du 23 septembre 1982, l'établissement d'un nouveau bail en application de l'article 72 de la loi susvisée ; qu'un arrêt du 7 juillet 1983 ayant décidé que les époux X... ne pouvaient se prévaloir des dispositions de la loi du 22 juin 1982, a été cassé par arrêt du 20 mai 1985, que les époux X... ont quitté les lieux le 31 mai 1984, que M. Y... Bode a vendu l'appartement litigieux le 20 mars 1985 ;
Attendu que M. Y... Bode fait grief à l'arrêt du 14 janvier 1988 de décider que les époux X... étaient fondés à demander l'établissement d'un nouveau bail, alors, selon le moyen, 1°) que manque de base légale au regard de l'article 72 de la loi du 22 juin 1982 l'arrêt qui s'abstient de rechercher si la condition de forme prévue par l'alinéa 1er de ce texte était ou non remplie, savoir que le bénéfice des dispositions légales doit avoir été demandé par l'occupant de bonne foi, selon lettre recommandée avec accusé de réception, 2°) que la détermination de la bonne foi au sens de l'article 72, alinéa 2, ne doit pas se limiter à la seule exécution des obligations résultant du bail expiré mais doit englober le comportement général de l'occupant dès lors qu'en vertu de l'article 1er, alinéa 3, de la loi, le principe fondamental de l'équilibre doit dominer les relations entre bailleurs et locataires ; qu'en refusant par suite de rechercher si les époux X... n'avaient pas eu le comportement déloyal que leur reprochait M. Y... Bode, ce qui était de nature à les priver du droit de bénéficier des dispositions de la loi nouvelle, la cour d'appel a violé les deux textes susvisés ;
Mais attendu, d'une part, qu'une notification pouvant toujours, même dans les rapports extra-judiciaires des parties, être faite par voie de signification quoique la loi l'ait prévue sous une autre forme et la cour d'appel ayant relevé que les époux X... avaient, par acte du 23 septembre 1982, sommé M. Y... Bode, d'avoir, en application de l'article 72 de la loi du 22 juin 1982, à établir un nouveau bail, le moyen n'est pas fondé de ce chef ;
Attendu, d'autre part, que la cour d'appel, qui a constaté que M. et Mme X... avaient réglé les loyers et habitaient les lieux, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision de ce chef ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 19 de la loi du 3 juillet 1967 ;
Attendu que sauf dispositions contraires, le pourvoi en cassation n'empêche pas l'exécution de la décision attaquée ; que cette exécution ne pourra donner lieu qu'à restitution ; qu'elle ne pourra en aucun cas être imputée à faute ;
Attendu que pour condamner M. Y... Bode à payer des dommages-intérêts aux époux X..., l'arrêt du 26 octobre 1989, statuant sur les préjudices consécutifs à l'expulsion des époux X... en exécution de l'arrêt cassé, retient qu'ils ont été illicitement expulsés des lieux ;
Qu'en statuant ainsi, alors que seule pouvait être prononcée la condamnation de M. Y... Bode à restituer aux consorts X... les sommes versées en exécution de l'arrêt cassé, outre les intérêts de droit à compter de la demande en restitution, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt du 14 janvier 1988 ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné M. Y... Bode à payer 200 000 francs à titre de réparation du préjudice moral et 50 000 francs à titre de frais de réinstallation, l'arrêt rendu le 26 octobre 1989, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges.