AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Tunzini Nessi entreprise d'équipements (TNEE), dont le siège est ... à Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine), en cassation d'un arrêt rendu le 11 octobre 1991 par la cour d'appel de Paris (23e Chambre, Section A), au profit :
1 ) de la Société d'économie mixte de construction et de rénovation urbaine de la ville de Colombes (Semco-Saem), société anonyme dont le siège est en la mairie de Colombes (Hauts-de-Seine),
2 ) de la compagnie d'assurances La Préservatrice, société anonyme dont le siège est ... des Victoires à Paris (9e),
3 ) de la société Cofreth, société anonyme dont le siège est ... (18e),
4 ) de la compagnie Eagle star l'indépendance, société anonyme dont le siège est 7, Terrasse des Reflets, Le Richelieu, à Paris La Défense (Hauts-de-Seine),
5 ) de la société Les Lloyd's de Londres, dont le siège et ... (8e),
6 ) de M. Jean X..., demeurant ... (1er),
7 ) de la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), dont le siège est ... (15e), défendeurs à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 27 avril 1994, où étaient présents : M. Fouret, conseiller le plus ancien fonctions de président, M. Pinochet, conseiller rapporteur, Mmes Lescure, Delaroche, M. Sargos, Mme Marc, conseillers, M. Laurent-Atthalin, conseiller référendaire, M. Lupi, avocat général, Mlle Ydrac, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Pinochet, les observations de la SCP Vier et Barthélémy, avocat de la société TNEE, de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de la société Semco-SAEM, de la SCP Coutard et Mayer, avocat de la compagnie d'assurances La Préservatrice et de la société Cofreth, de Me Copper-Royer, avocat de la compagnie Eagle star l'indépendance, de la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, avocat de la société Les Lloyd's de Londres, de Me Odent, avocat de la SMABTP, les conclusions de M. Lupi, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Met hors de cause, sur leur demande, la compagnie La Préservatrice foncière, la société Cofreth, la compagnie Eagle star l'Indépendance, qui ne sont pas concernées par le pourvoi ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Attendu que la société Tunzini Nessi entreprise d'équipement (TNEE) a été chargée du lot chauffage-électricité dans la construction d'un ensemble immobilier ; que, la réception des travaux exécutés en 1977 et 1978 ayant été prononcée le 31 janvier 1979, des désordres sont apparus en 1985 dans le système de chauffage électrique de base des appartements ; que le maître d'ouvrage a assigné en réparation, au vu des rapports d'un expert commis en référé, la société TNEE, laquelle a appelé en garantie ses assureurs de responsabilité successifs, la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP) et les souscripteurs du Lloyd's de Londres ;
Attendu que, pour débouter la société TNEE de sa demande en garantie dirigée contre la SMABTP, l'arrêt attaqué retient que les désordres ne peuvent être datés de manière certaine avant leur constatation au mois de novembre 1985 ; qu'ils sont sans lien de causalité avec les réfections pratiquées le 17 avril 1980 et le 5 octobre 1983 ; que le sinistre est donc postérieur à la résiliation, à compter du 1er janvier 1981, de la police individuelle de base souscrite auprès de la SMABTP, par lettre de la société TNEE du 26 novembre 1980 ; que les juges du second degré énoncent encore que, si la réclamation consécutive à l'intervention de la société TNEE le 17 avril 1980 est sans lien de causalité avec la rupture des trames constatée cinq ans plus tard, elle n'en constitue pas moins la première manifestation matérielle d'un risque garanti par la SMABTP dont le dédommagement a été refusé par l'assureur en raison d'une franchise, résultant d'une même cause, un sertissage insuffisant à la jonction du câble d'alimentation et du câble chauffant et trouvant leur origine dans les travaux faisant l'objet d'un même marché ;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs contradictoires au sujet des faits à l'origine de la responsabilité de l'assuré, lesquels étaient susceptibles d'être garantis par l'assureur s'ils s'étaient produits pendant la période de validité du contrat et sans, en outre, rechercher si, dans la lettre du 26 novembre 1980, la société TNEE n'avait pas entendu seulement être déchargée du paiement de la prime subséquente, prévue par l'article 11 de la police, pour le maintien de la garantie après résiliation, clause devant au demeurant être réputée non écrite comme dépourvue de cause, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences des textes susvisés ;
Sur la demande présentée au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile :
Attendu que le Lloyd's de Londres sollicite, sur le fondement de ce texte, l'allocation d'une somme de 12 000 francs ;
Mais attendu qu'en équité, il n'y a pas lieu à cette condamnation ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la troisième branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement dans les rapports entre la société TNEE et la SMABTP, l'arrêt rendu le 11 octobre 1991, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Rejette la demande présentée par le Lloyd's de Londres sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Condamne la SMABTP, envers la société TNEE, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Paris, en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du huit juin mil neuf cent quatre-vingt-quatorze.