AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. X... en cassation d'un arrêt rendu le 22 octobre 1992 par la cour d'appel de Rennes (6e chambre civile, section B), au profit de Mme Y...,
défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience du 2 novembre 1994, où étaient présents :
M. Michaud, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Colcombet, conseiller rapporteur, MM. Chevreau, Dorly, Mme Solange Gautier, conseillers, M. Bonnet, conseiller référendaire, M. Tatu, avocat général, Mme Lagardère, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Colcombet, les observations de Me Blondel, avocat de M. M., de Me Brouchot, avocat de Mme M., les conclusions de M. Tatu, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le premier moyen :
Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 22 octobre 1992), le divorce des époux X... a été prononcé par un jugement du 15 novembre 1990 qui a sursis à statuer sur la prestation compensatoire ; que, par décision du 23 mai 1991, le Tribunal a condamné M. X... à verser à son ex-épouse une rente mensuelle pendant cinq ans à titre de prestation compensatoire ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir, tout en en diminuant le montant, condamné M. M. à verser cette prestation compensatoire, alors qu'il résulte de l'arrêt qu'au moment du divorce, M. X... ne percevait plus que des indemnités journalières de la sécurité sociale à la suite d'un arrêt de maladie et que la circonstance qu'il ait disposé d'une qualification et d'une grande expérience professionnelle, en raison des emplois occupés précédemment, ne permet pas à elle seule de déduire qu'il était, au moment du divorce, dans une situation économique plus favorable que son épouse au chômage, générant une disparité, si bien qu'en déduisant de ces seules données l'existence d'une disparité dans les conditions de vie des époux résultant du divorce, la cour d'appel aurait violé les articles 270 et 271 du Code civil ;
Mais attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'apprécier l'évolution de la situation des époux dans un avenir prévisible que la cour d'appel, ayant retenu que si, au moment du divorce, M. X... était sans rémunération, il disposait d'une qualification certaine et d'une grande expérience professionnelle et qu'en septembre 1991, il avait été employé comme professeur, alors que Mme Y... était à nouveau au chômage, a estimé que la rupture du mariage avait entraîné une disparité dans leurs conditions de vie respectives ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir décidé que la prestation compensatoire sous forme d'une rente serait due à compter du jugement du 23 mai 1991, alors que, eu égard aux règles et principes qui gouvernent l'effet dévolutif de l'appel, ensemble en présence d'un arrêt infirmatif sur la question de la prestation compensatoire et en l'absence de demande spécifique de l'intimée, quant à ce, la cour d'appel n'a pu faire rétroagir la condamnation au paiement d'une prestation compensatoire mensuelle à hauteur de mille cinq cents francs (1 500) par mois à compter du 23 mai 1991 ;
qu'ainsi auraient été violés les articles 561 et 562 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que M. X... n'ayant déféré à la cour d'appel que la décision du 23 mai 1991 concernant la prestation compensatoire et le divorce ayant acquis antérieurement autorité de la chose jugée, c'est sans violer le texte susvisé que la cour d'appel a fixé comme elle l'a fait la date à partir de laquelle la prestation compensatoire serait due ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. M., envers le trésorier-payeur général, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du trente novembre mil neuf cent quatre-vingt-quatorze.