AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société TGL Immobilier, dont le siège social est à Paris (16e), ..., en cassation d'un arrêt rendu le 12 janvier 1993, et rectifié le 4 mai 1993, par la cour d'appel de Paris (6e chambre, section C), au profit de la Société civile de placement immobilier Buroboutic, dont le siège social est à Saint-Germain-en-Laye (Yvelines), ..., défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 30 novembre 1994, où étaient présents : M. Beauvois, président, M. Chemin, conseiller rapporteur, MM. Douvreleur, Capoulade, Deville, Mlle Fossereau, MM. Fromont, Villien, conseillers, Mme Cobert, M. Chapron, conseillers référendaires, M. Vernette, avocat général, Mlle Jacomy, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Chemin, les observations de la SCP Defrenois et Levis, avocat de la société TGL Immobilier, de Me Copper-Royer, avocat de la Société civile de placement immobilier Buroboutic, les conclusions de M. Vernette, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le premier moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 janvier 1993), rectifié par arrêt du 4 mai 1993, que la société Murinvest, aux droits de laquelle vient la société Buroboutic, propriétaire du lot n° 41 dans un immeuble en copropriété, a donné à bail, à usage commercial, par acte sous seing privé du 2 septembre 1985, à la société TGL Immobilier, une partie de ce lot, mentionnée n 120 d'après un projet de division non autorisé ultérieurement par l'assemblée générale des copropriétaires ; que diverses sommes, représentant des loyers et des charges, étant demeurées impayées et un commandement visant la clause résolutoire inscrite au bail ayant été délivré, la société TGL Immobilier a fait opposition à ce commandement et a assigné la société Buroboutic, qui a demandé reconventionnellement la constatation de la résiliation du bail et la condamnation du preneur au paiement des loyers et charges arriérés ;
Attendu que la société TGL Immobilier fait grief à l'arrêt de la débouter de son opposition à commandement et de constater la résiliation du bail, alors, selon le moyen, "1 / que le bail conclu entre le bailleur et le preneur ne fait nullement état de l'acceptation par la société TGL Immobilier d'une répartition des charges sur la base de vingt-huit millièmes ; que, dès lors, en statuant de la sorte, la cour d'appel a dénaturé le contrat de bail, en violation de l'article 1134 du Code civil ; 2 / qu'en ne recherchant pas si la part des charges mises à la charge du locataire s'imposait en l'absence d'accord de l'assemblée générale des copropriétaires sur le projet de scission du lot n° 41 et sur la nouvelle répartition demandée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil et 25 f) de la loi du 10 juillet 1965 ; 3 / que le non-raccordement crée une présomption d'absence d'utilité ; qu'en l'espèce, en statuant de la sorte, sans rechercher si le chauffage collectif présentait, en l'état, une utilité pour le lot occupé par la société TGL Immobilier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 10, alinéa 1er, du 10 juillet 1965" ;
Mais attendu qu'ayant relevé, d'une part, que la société TGL Immobilier avait accepté, dans le bail qu'elle a signé, de supporter les charges de copropriété à concurrence de vingt-huit millièmes des tantièmes de copropriété, et, d'autre part, que la partie du local occupée était traversée par deux colonnes montantes de chauffage collectif et que le raccordement des radiateurs était très facile à réaliser, la cour d'appel a, sans dénaturation, légalement justifié sa décision de ce chef ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société TGL Immobilier fait grief à l'arrêt de la condamner au paiement d'une somme de 376 961,41 francs, alors, selon le moyen, "qu'en statuant de la sorte, sans rechercher si la créance était fondée pour le montant réclamé par le créancier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1351 du Code civil" ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la société TGL Immobilier n'avait pas contesté de manière opérante sa dette locative pour la période se terminant le 31 décembre 1989 et qu'elle ne justifiait pas du paiement de cette dette, la cour d'appel, qui a souverainement, au vu des documents justificatifs fournis par le bailleur et des conclusions d'un rapport d'expertise judiciaire, fixé le montant des loyers et charges impayés, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société TGL Immobilier à payer à la société Buroboutic la somme de huit mille francs en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Dit n'y avoir lieu à indemnité en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile au profit de la société TGL Immobilier ;
Condamne la société TGL Immobilier, envers la société Buroboutic, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du onze janvier mil neuf cent quatre-vingt-quinze.