Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que, par acte du 1er octobre 1964, René Y..., qui s'était marié le 1er octobre 1949 sous le régime de la communauté de meubles et d'acquêts, a apporté des immeubles et du matériel agricole, considéré comme immeuble par destination, le tout reçu en donation de ses parents, à la société civile agricole qu'il venait de constituer avec son frère ; qu'en contrepartie, il a reçu 3 494 parts sociales, dont 2 900 en représentation des immeubles et 594 en représentation des meubles ; qu'après son décès, survenu le 10 juillet 1976, sa veuve a opté pour la totalité de l'usufruit des biens ; que, par la suite, ses trois enfants ont assigné en responsabilité le notaire liquidateur, au motif que ce dernier avait qualifié à tort de biens propres les 3 494 parts sociales ; qu'un arrêt de la cour d'appel de Nîmes, en date du 6 décembre 1990, a estimé au contraire qu'il s'agissait de biens communs ; que cette décision a été cassée le 16 décembre 1992 ; que, statuant sur renvoi après cassation, l'arrêt attaqué (Montpellier, 18 avril 1994) a décidé que la totalité des parts sociales litigieuses constituaient un bien propre du défunt ;
Attendu que Mme X... et M. Pierre Y... font grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, d'une part, que l'article 1407 ancien du Code civil ne visait que " l'immeuble acquis pendant le mariage à titre d'échange contre l'immeuble appartenant à l'un des époux " ; qu'en faisant application de ce texte à des parts sociales acquises en contrepartie d'immeubles, alors que ces parts sociales ne revêtaient pas elles-mêmes un caractère immobilier, l'arrêt attaqué a violé, par fausse application, l'article 1407 du Code civil dans sa rédaction applicable à la cause ; et alors, d'autre part, qu'en refusant de déclarer biens communs les parts sociales, en dépit de leur nature mobilière, la cour d'appel a violé l'article 1401 du même Code dans sa rédaction applicable à la cause ;
Mais attendu que, sous l'ancien régime de la communauté de meubles et d'acquêts, le caractère mobilier des parts sociales n'était pas nécessairement exclusif de la qualification de propre ; que si l'article 1407 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi du 13 juillet 1965, ne vise que l'échange d'immeubles, la subrogation réelle permet, d'une manière plus générale, lorsqu'un bien propre se trouve remplacé par un autre bien, d'attribuer à ce dernier le caractère de propre ; que, spécialement, toute valeur mobilière acquise en remplacement d'un propre, même immobilier, doit revêtir le caractère de bien propre, et se trouve exclue de la communauté ; que, dès lors, en décidant que les 3 494 parts sociales, acquises par René Y... en contrepartie de ses apports immobiliers à la société civile agricole par lui créée avec son frère, constituaient toutes des biens propres, la cour d'appel a fait une exacte application du principe de la subrogation réelle dans les régimes matrimoniaux ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.