Sur les deux moyens réunis :
Attendu, selon les arrêts attaqués (Amiens, 24 mars et 20 octobre 1994), que Mme Caron, épouse Y..., cessionnaire à compter du 30 décembre 1989 d'un bail rural consenti à ses parents sur des parcelles de terre appartenant à Mme X..., épouse Z..., a reçu un congé aux fins de reprise pour exploitation personnelle de la bailleresse pour le 14 novembre 1993, date d'expiration du bail ;
Attendu que Mme Y... fait grief aux arrêts de déclarer valable ce congé, alors, selon le moyen, 1o qu'en statuant ainsi la cour d'appel a, par fausse application, violé l'article L. 411-8 du Code rural ; qu'en effet cette disposition figurait, avant la codification formelle, dans l'article 34, 2e alinéa, de la loi n° 75-632 du 15 juillet 1975, qui contient diverses dispositions dont certaines ne sont que transitoires, et qu'en l'incluant dans le Code rural sans restriction le codificateur a voulu confirmer sa portée générale, soulignée dans l'alinéa 2 de l'article 34 par les termes " pour quelque cause que ce soit " et dont les dispositions, sans ambiguïté, s'appliquent à toutes les cessions conclues après l'entrée en vigueur de la loi précitée de 1975, et que les conditions posées par ce texte (cession antérieure de moins de 6 ans par rapport à la date d'expiration du bail originaire cédé) étant remplies le cessionnaire ne bénéficiait pas d'un premier bail mais d'un bail renouvelé constituant aux termes de la loi un premier bail et permettait à Mme Caron, épouse Y..., de bénéficier à compter du 14 novembre 1993 d'un bail renouvelé pour une période de 9 ans ; qu'au surplus, si ce texte n'a pas été inséré à la suite de l'article L. 411-6 qui a trait aux reprises en cours de bail, c'est que l'article L. 411-8, qui constitue une disposition permanente et indépendante, a pour but d'assurer au descendant cessionnaire une certaine stabilité nécessaire à l'exploitation ; qu'en statuant comme elle l'a fait la cour d'appel a violé, par fausse application, le texte précité ; 2o que la cour d'appel a laissé sans réponse les conclusions de Mme Caron, épouse Y..., intimée, qui avaient fait ressortir l'insuffisance des moyens matériels et la médiocrité des ressources destinées essentiellement à acquérir d'autres éléments de culture, sans préjudice d'éventuelles indemnités au fermier sortant, et en précisant que ces vérifications devaient se placer à la date d'échéance du congé (14 novembre 1993) ; qu'en statuant sans répondre à ces conclusions la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; 3o que la cour d'appel a accepté, au titre de la preuve de la possession de ces éléments de culture, des documents qui n'étaient en réalité que de simples affirmations de la candidate à la reprise qui ne faisait la preuve ni de ses possibilités matérielles et financières, ni de son aptitude à exploiter personnellement et effectivement 22 hectares de terres ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si la candidate à la reprise justifiait, autrement que par de simples affirmations, de ses possibilités matérielles et financières et de ses aptitudes techniques, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 411-59 du Code rural et qu'elle a, en outre, violé les dispositions des articles 1315 et suivants du Code civil relatives à la preuve ;
Mais attendu, d'une part, que l'article L. 411-8 du Code rural ne constituant qu'une modalité d'application, en cas de cession à un descendant, des dispositions relatives aux conditions de la reprise en cours de bail, la cour d'appel a exactement retenu que le congé avait été valablement délivré pour la date d'expiration du bail ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant relevé qu'elle était en mesure de constater que Mme Z..., titulaire d'un brevet professionnel agricole, avait la capacité à diriger et à surveiller l'exploitation, et qu'elle disposait du matériel nécessaire et des moyens de l'acquérir, la cour d'appel, répondant aux conclusions, a fait une exacte application de l'article L. 411-59 du Code rural ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.