Sur les trois premiers moyens réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 6 septembre 1994), que, par délibération du 27 juillet 1987, la Ville de Nîmes a décidé de concéder la construction et l'exploitation d'une usine de méthanisation pour le traitement des ordures ménagères ; que cette concession a été accordée le 27 octobre 1987 à un groupement d'entreprises en faveur duquel a été accordée la garantie de la Ville à concurrence de 10 millions de francs, puis, le 11 février 1988, à la société Bionîmes, substituée au groupement, avec la même garantie ; que cette société a passé quatre contrats de prêt avec le Crédit foncier communal d'Alsace et de Lorraine (CFCAL) et la société Sogenal pour un montant total de 18 millions de francs, en vue du " financement partiel de la construction de l'usine de traitement des déchets urbains de la ville de Nîmes " ; que la société Bionîmes n'ayant pas satisfait à ses engagements, les deux banques ont vainement demandé l'inscription d'office au budget de cette commune des dépenses correspondant au montant de la garantie ; que la Ville ayant fait assigner le CFCAL et la Sogenal aux fins de voir déclarer nuls les actes de cautionnement, l'arrêt confirmatif attaqué l'a déboutée et condamnée à payer les sommes garanties ;
Attendu que la commune fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, de première part, que, selon l'article L. 122-21, 2e alinéa, du Code des communes, sauf disposition contraire dans la délibération du conseil municipal portant délégation, les décisions prises en application de celle-ci doivent être signées personnellement par le maire, de sorte qu'en présence de deux délibérations du conseil municipal autorisant expressément le maire à intervenir aux contrats de prêts signés par l'adjoint au maire les juges d'appel ne pouvaient décider que ces conventions avaient été signées par une autorité compétente sans violer le texte précité ; alors, de deuxième part, qu'en s'abstenant de répondre aux écritures de la commune faisant valoir qu'en raison de la non-affectation des prêts à l'usage contractuellement prévu, soit au mépris de cette condition déterminante de l'engagement, l'acte de cautionnement devait être ainsi considéré comme résilié en application de l'article 2015 du Code civil, les juges d'appel ont entaché leur décision d'un défaut de réponse à conclusions ; alors, de troisième part, qu'un établissement financier a le devoir de s'entourer de toutes les précautions nécessaires à la bonne fin de l'opération envisagée, et ce indépendamment de la qualité des différents intervenants à l'acte, si bien qu'en jugeant que les établissements n'avaient commis aucune faute dans le cadre d'une convention de prêt, en dégageant immédiatement des fonds à une société nouvellement créée, sans rechercher si ces établissements ne devaient pas conseiller les parties sur l'opportunité de mettre en place un déblocage progressif des fonds, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décison au regard de l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel a retenu à bon droit que l'article L. 122-21 du Code des communes, qui exige la signature personnelle du maire pour les décisions prises par celui-ci en application des délibérations du conseil municipal portant délégation, ne concernait que les matières limitativement énumérées par l'article L. 122-20, parmi lesquelles ne figurent pas les garanties d'emprunt ;
Attendu, d'autre part, que la cour d'appel, par motifs propres et adoptés, a fait ressortir que la Ville ne pouvait se prévaloir du défaut d'affectation du montant des prêts à l'usage contractuellement prévu, dès lors qu'elle avait seule le contrôle de l'emploi des fonds versés en une seule fois, ce dont il résultait que le contrôle par les banques de cet emploi ne pouvait constituer un élément déterminant de l'engagement de la caution ; qu'elle a ainsi implicitement répondu aux conclusions invoquées ;
Attendu, enfin, que la cour d'appel a relevé que la Ville de Nîmes ne pouvait être considérée comme un " partenaire profane " des banques, alors qu'elle se trouvait à l'origine du projet, qu'elle avait choisi en connaissance de cause la société avec laquelle elle contractait et assuré la conception du montage juridique et financier de l'opération décidant notamment de garantir les emprunts dès le contrat de concession avant toute intervention des banques ; que, procédant à la recherche prétendument omise, elle a ainsi légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que les moyens ne sont pas fondés ;
Sur le quatrième moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que la Ville fait encore grief à l'arrêt d'avoir admis la créance de la Sogenal à la procédure de liquidation judiciaire de la société Bionîmes, alors, d'une part, que selon les articles 50 et 53 de la loi du 25 janvier 1985, à défaut de déclaration de créance dans le délai de deux mois à compter de la publication du jugement au BODACC, et de relevé de forclusion dans le délai d'un an à compter de la décision d'ouverture, les créances sont éteintes, de sorte qu'en jugeant que la seule production ultérieure de documents prouvant l'existence d'une délégation de pouvoirs était toujours recevable, alors que la société débitrice avait fait l'objet d'un redressement judiciaire suivant jugement du 19 avril 1991, la cour a violé les textes susvisés ; alors, d'autre part, qu'en présence d'une ordonnance du juge-commissaire en date du 3 avril 1992, énonçant, conformément à l'article 99 de la loi du 25 janvier 1985, qu'eu égard au passif de la société Bionîmes, il n'y avait pas lieu à la vérification des créances chirographaires, la Cour ne pouvait encore se fonder sur l'absence de toute contestation de cette créance pour la juger régulière sans méconnaître la portée du texte précité ;
Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel a jugé à bon droit que la déclaration des créances au passif du redressement judiciaire pouvait être effectuée par tout préposé titulaire d'une délégation de pouvoir lui permettant d'accomplir un tel acte sans que ce pouvoir soit soumis aux règles applicables au mandat de représentation en justice dont un tiers peut être investi, et qu'il pouvait être justifié de l'existence de la délégation de pouvoirs jusqu'à ce que le juge statue sur l'admission de la créance ;
Attendu, d'autre part, que le moyen, en sa seconde branche, critique un motif surabondant de l'arrêt ;
D'où il suit que le moyen, non fondé en sa première branche, est irrecevable dans la seconde ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.