Sur les deux moyens, réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 28 février 1995), que la société Les Codes Rousseau, maître de l'ouvrage, a chargé de travaux de construction la société GEPA, entreprise générale, qui a sous-traité le lot peinture-miroiterie à la société Peinture Normandie ; que, n'ayant pas été réglée du solde de ses travaux, cette société a assigné le maître de l'ouvrage en nullité du contrat de sous-traitance et en paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que la société Peinture Normandie fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande, alors, selon le moyen, 1° que lorsque l'entrepreneur principal ne procure pas au sous-traitant le cautionnement prévu par l'article 14 de la loi du 31 décembre 1975, en l'absence de délégation du maître de l'ouvrage, le contrat de sous-traitance est nul ; que cette nullité d'ordre public, née de l'absence de cautionnement, constitue par ailleurs une faute délictuelle pour le maître de l'ouvrage tenu d'exiger de l'entrepreneur qu'il justifie avoir fourni la caution ; qu'en l'espèce il ressort des propres constatations du jugement confirmé qu'aucun cautionnement n'avait été fourni à la société Peinture Normandie et que Les Codes Rousseau, maître de l'ouvrage, s'étaient abstenus d'exiger de l'entrepreneur qu'il justifie avoir fourni cette caution ; qu'en refusant, au motif inopérant d'un " détournement de droit ", d'admettre l'existence de la nullité d'ordre public du marché invoquée par le sous-traitant, et de condamner, comme il le lui était demandé, le maître de l'ouvrage fautif à indemniser le préjudice de ce sous-traitant, la cour d'appel a violé les articles 14 et 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 et 1382 du Code civil ; que la nullité du sous-traité fulminée par l'article 14 de la loi du 31 décembre 1975 est subordonnée à la seule condition que l'entrepreneur n'ait pas fait bénéficier le sous-traitant d'un cautionnement ou de la délégation du maître de l'ouvrage ; qu'en refusant de la constater en l'espèce, au motif inopérant que l'entrepreneur n'aurait pas été hors d'état de faire face à ses obligations contractuelles, la cour d'appel a violé l'article 14 précité ; que l'action en responsabilité délictuelle est subordonnée à la seule constatation de l'existence d'une faute du défendeur ayant directement causé un préjudice au demandeur ; qu'en reprochant à la société Peinture Normandie, qui agissait en responsabilité délictuelle contre la société Les Codes Rousseau, de ne pas avoir appelé en la cause un tiers à qui elle ne reprochait rien et ne réclamait rien, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ; que la faute du maître de l'ouvrage l'oblige à réparer tout le préjudice en résultant éprouvé par le sous-traitant ; qu'en s'abstenant de rechercher le montant de ce préjudice la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; qu'à supposer que le préjudice du sous-traitant ait correspondu au juste prix des prestations par lui accomplies et ait correspondu au prix contractuel convenu il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que ce prix n'avait pas été totalement réglé ; qu'en s'abstenant de prononcer quelque condamnation que ce soit contre Les Codes Rousseau la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ; que, comme il a été dit, le contrat de sous-traitance est nul lorsqu'aucun cautionnement ni délégation n'a été procuré au sous-traitant ; que l'arrêt attaqué, par adoption de motifs, constate que tel était le cas en l'espèce ; qu'en invoquant un litige entre le sous-traitant et l'entrepreneur sur la résiliation du contrat de sous-traitance, litige caduc puisque par ailleurs ce contrat était nul, pour refuser d'examiner l'action en responsabilité délictuelle intentée par le sous-traitant contre le maître de l'ouvrage, la cour d'appel a violé les articles 14 et 14-1 de la loi du 31 décembre 1975, ensemble l'article 1382 du Code civil ;
2° qu'ayant relevé que la société Gepa, entreprise principale mise en demeure par la société Peinture Normandie, sous-traitante, restait devoir à cette dernière au moins la somme de 38 844,92 francs, la cour d'appel n'a pas tiré de ses propres énonciations les conséquences qui en découlaient en décidant que Peinture Normandie n'était pas fondée à exercer l'action directe contre le maître de l'ouvrage ; que la cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article 12 de la loi du 31 décembre 1975 ;
Mais attendu qu'ayant relevé qu'il n'était pas démontré que l'entrepreneur principal aurait été hors d'état de faire face à ses obligations contractuelles, que la somme réclamée par la société Peinture Normandie correspondait à une évaluation non contradictoire faite à la demande de cette société et non au solde du prix convenu et qu'il n'était pas établi que ce prix n'était pas le juste prix, la cour d'appel, saisie d'une demande dirigée contre le maître de l'ouvrage sur le fondement de l'article 1382 du Code civil et qui n'a pas constaté l'existence d'un reliquat de créance, a, par ces seuls motifs, propres et adoptés, dont il résulte l'absence de preuve d'un préjudice, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.