Sur le premier moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 septembre 1994), que la société civile immobilière SPIA (la SCI) a consenti un bail à usage commercial, le 30 novembre 1994, à la société Coopérative ouvrière de production Théâtre de la Danse ; que cette société a été mise en redressement judiciaire, puis a fait l'objet d'un jugement du 15 novembre 1990, ordonnant la liquidation de ses biens ; que la bailleresse a, pour non-paiement des loyers à compter du 1er octobre 1990, assigné, après avoir fait délivrer deux commandements, le mandataire liquidateur, M. X..., afin de faire constater l'acquisition de la clause résolutoire et faire prononcer la résiliation du bail pour défaut d'exploitation ;
Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande en constatation de l'acquisition de la clause résolutoire, alors, selon le moyen, 1° que lorsque le locataire est déclaré en liquidation judiciaire les juges du fond ne sauraient accorder des délais au preneur afin de faire échec à une clause de résiliation du bail de plein droit, si bien qu'en statuant comme elle l'a fait la cour d'appel a violé l'article 25 du décret du 30 septembre 1953, modifié par la loi du 31 décembre 1989 ; 2° que l'octroi de délais ayant pour objet de suspendre les effets de la clause résolutoire est subordonné à la présentation, par le preneur, d'une demande dans les formes prévues à l'article 1244-1 du Code civil, et à l'accomplissement des conditions fixées préalablement par le juge, si bien qu'en statuant ainsi la cour d'appel a validé rétroactivement la demande de suspension des effets de cette stipulation, en assurant avec certitude au preneur de satisfaire à des conditions inexistantes et violé l'article 25, alinéa 2, du décret du 30 septembre 1953 ; 3° que Mme Y... n'a présenté aucune demande de délais dans les formes et conditions de l'article 1244 du Code civil, ni davantage justifié de sa situation justifiant l'octroi de ceux-ci, si bien qu'en ne distinguant pas selon la période précédant et postérieure à la cession du fonds de commerce la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 25 du décret du 30 septembre 1953 ; 4° que le juge ne peut suspendre les effets d'une clause résolutoire qu'après avoir constaté le caractère équivoque de cette stipulation, si bien qu'en restant muette sur cette recherche essentielle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1244-1 du Code civil et 25 du décret du 30 septembre 1953 ; 5° que le juge ne peut suspendre les effets de la clause résolutoire que pour le paiement des loyers et non pour les accessoires du loyer tels que les charges, si bien qu'en suspendant les effets de la clause litigieuse en incluant les charges dues par la société locataire au bailleur, la cour d'appel a violé l'article 25 du décret du 30 septembre 1953 ;
Mais attendu, d'une part, que le titulaire d'un bail commercial peut demander des délais de paiement et la suspension des effets de la clause résolutoire tant que la résiliation du bail n'est pas constatée par une décision passée en force de chose jugée, et que la cour d'appel, ayant constaté que M. X... avait sollicité de tels délais, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Attendu, d'autre part, que les articles 1244-1 du Code civil et 25 du décret du 30 septembre 1953, dans leur rédaction applicable à l'espèce, n'interdisent nullement l'octroi de délais de paiement et la suspension des effets de la clause résolutoire en présence d'une rédaction non équivoque d'une telle clause, et alors que le commandement de payer visant celle-ci a été délivré pour des sommes incluant les accessoires du loyer ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen, qui est recevable, pris en sa première branche :
Vu l'article 1184 du Code civil, ensemble l'article 9 du décret du 30 septembre 1953 ;
Attendu que la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques pour le cas où l'une des deux parties ne satisfait pas à son engagement ; que la partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté peut en demander la résolution en justice ;
Attendu que, pour rejeter la demande en prononcé de la résiliation du bail, l'arrêt retient que la société SPIA n'est pas fondée à se prévaloir d'un tel grief dès lors qu'elle n'a jamais délivré préalablement une mise en demeure ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'article 9 du décret du 30 septembre 1953 qui vise le refus de renouvellement est sans application dans le cas d'une demande en prononcé de la résiliation judiciaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le second moyen pris en sa troisième branche :
Vu l'article 155, alinéa 5, de la loi du 25 janvier 1985 dans sa rédaction applicable en la cause ;
Attendu que le liquidateur, après avoir consulté le comité d'entreprise ou à défaut, les délégués du personnel et provoqué les observations du débiteur et des contrôleurs, choisit l'offre qui lui paraît la plus sérieuse et permettant dans les meilleures conditions d'assurer durablement l'emploi et le paiement des créanciers ; que la cession est ordonnée par le juge-commissaire ;
Attendu que, pour rejeter la demande en prononcé de la résiliation du bail, l'arrêt retient que si M. X... a bien été autorisé par ordonnance du juge-commissaire à céder le fonds à Mme Y..., rien ne lui interdisait de le céder à la société Café de la Danse, de la Musique et des Arts, acquéreur du fonds de commerce, qui a exploité ce fonds dès qu'elle en a pris possession ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'ordonnance du juge-commissaire ne prévoyait aucune faculté de substitution, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la deuxième branche du second moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit n'y avoir lieu de prononcer la résiliation du bail, l'arrêt rendu le 27 septembre 1994, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles.