AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Jean François X..., domicilié Centre fiduciaire européen, ..., en cassation d'un arrêt rendu le 16 novembre 1994 par la cour d'appel de Rouen (1e chambre civile), au profit de M. Denis Y..., demeurant ..., défendeur à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 28 mai 1997, où étaient présents : M. Zakine, président, M. Chardon, conseiller rapporteur, M. Laplace, Mme Vigroux, MM. Buffet, Séné, conseillers, M. Bonnet, conseiller référendaire, M. Joinet, avocat général, Mme Claude Gautier, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Chardon, conseiller, les observations de la SC Ghestin, avocat de M. X..., les conclusions de M. Joinet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 16 novembre 1994) que sur les conseils de M. X..., M. Y... a constitué une sté dénommée "édition presse professionelle" - EPP - dont il s'est porté caution auprès du Crédit Lyonnais, que la sté EPP a été mise en liquidation judiciaire et que le Crédit Lyonnais l'a assigné en paiement du montant de son cautionnement; que M. Y... a alors assigné M. X... aux fins de garantie de la demande du Crédit Lyonnais mais qu'il a été débouté et qu'il a fait appel de cette décision; que devant la cour d'appel, il a sollicité un sursis à statuer, eu égard à la plainte avec constitution de partie civile qu'il avait déposée ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté son exception tenant à l'irrecevabilité de la constitution de partie civile de M. Y... et d'avoir sursis à statuer dans l'attente d'une décision pénale, alors que, selon le moyen, la partie qui a exercé son action devant la juridiction civile compétente ne peut la porter devant la juridiction répressive, dès lors qu'un jugement civil au fond est intervenu avant la saisine du juge répressif par le ministère public; que, par jugement rendu au fond le 30 juillet 1993, le tribunal de grande instance de Rouen a débouté M. Y... de sa demande tendant à être indemnisé, sur le fondement délictuel, par M. X... des conséquences du cautionnement donné par M. Y... au profit du Crédit lyonnais; que dans sa plainte avec constitution de partie civile formée contre M. X..., M. Y... a demandé la réparation de son entier préjudice qui serait résulté du comportement reproché à M. X... ;
que dans sa plainte, M. Y... visait expressément le cautionnement qu'il avait dû fournir au Crédit lyonnais, l'incluant dans le préjudice dont il imputait la responsabilité à M. X...; qu'en estimant néanmoins que l'exception Una Via Electa n'était pas applicable pour la demande de M. Y... relative à l'indemnisation des conséquences du cautionnement litigieux et en sursoyant à statuer sur cette demande en application de la règle "le criminel tient le civil en l'état", la cour d'appel a méconnu l'identité d'objet des actions civile et pénale quant à cette demande, violant l'article 5 du Code de procédure pénale ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que l'action civile en garantie de M. Y... vise à faire supporter à M. X... le remboursement des sommes dues au Crédit Lyonnais en vertu de son engagement de caution tandis que la constitution de partie civile a pour objet d'obtenir réparation de l'ensemble de son préjudice lié au comportement reproché à M. X..., l'arrêt retient à bon droit qu'en l'absence d'identité d'objet, l'exception "una via electa" n'est pas applicable ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq juin mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept.