AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Sada assurances, dont le siège est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 26 octobre 1995 par la cour d'appel de Nîmes (1re chambre), au profit :
1°/ de la compagnie La France assurances, société anonyme, dont le siège est ...,
2°/ de M. Claude X..., demeurant ...,
3°/ de la société La Bigournette, société à responsabilité limitée, dont le siège est : 07120 Chauzon,
4°/ de M. Patrick Z..., demeurant : 07120 Chauzon,
5°/ de Mme Florence Y..., demeurant : 07120 Ruoms, prise tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'administratrice légale de la personne et des biens de ses enfants mineurs : Ingrid A... et Axel Z...,
6°/ de la Caisse primaire d'assurance maladie, dont le siège est ...,
9°/ de l'Arpica, dont le siège est 13, cours Palais, 07000 Privas, défendeurs à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 1er octobre 1997, où étaient présents : M. Zakine, président, M. Dorly, conseiller rapporteur, M. Chevreau, conseiller, M. Joinet, avocat général, Mme Aydalot, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Dorly, conseiller, les observations de la SCP Vier et Barthélémy, avocat de la société Sada assurances, de Me Cossa, avocat de la compagnie La France assurances et de M. X..., les conclusions de M. Joinet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 26 octobre 1995), qu'une explosion consécutive à une fuite de gaz a endommagé le café-restaurant exploité par la société La Bigournette (la société), dont M. Patrick Z... est le gérant;
qu'après une mesure d'expertise ordonnée en référé sur les causes du sinistre, la société, son assureur, la compagnie Sada assurances, M. Patrick Z..., Mme Florence Y..., en son nom personnel et en celui de ses enfants mineurs Ingrid A... et Axel Z..., ont assigné en responsabilité et indemnisation de leur préjudice M. X... et son assureur, la compagnie La France assurances ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté les demandes, alors, selon le moyen, d'une part, qu'une hypothèse retenue comme seule cause possible de la production de dommage suffit à caractériser une faute engageant la responsabilité de son auteur;
qu'en déduisant l'absence de faute de M. X... de la seule circonstance que le Tribunal se serait fondé sur une hypothèse, sans rechercher si l'hypothèse ainsi retenue n'était pas la seule cause possible -constitutive d'une faute- de l'explosion, excluant nécessairement l'autre hypothèse envisagée par l'expert, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil;
d'autre part, que l'expert avait expressément indiqué dans son rapport qu'"à la suite des travaux effectués sur le réseau d'eau il est certain que le 29 novembre 1991 une canalisation de gaz a été touchée involontairement, provoquant une fuite importante ne pouvant se diluer dans l'air et stagnant (gaz plus lourd que l'air) dans la cave entre les casiers Coca et grandes eaux et les machines à laver, à sécher et le cumulus";
qu'en considérant que l'hypothèse selon laquelle l'explosion trouve son origine dans le heurt involontaire d'une canalisation de gaz qu'il s'avait vétuste ne saurait caractériser une telle faute, dès lors qu'il est fait référence à un acte ou une omission seulement probable, la cour d'appel a dénaturé le rapport d'expertise ;
Mais attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'apprécier la valeur et la portée des éléments de preuve que la cour d'appel, sans dénaturer le rapport d'expertise, a retenu que le heurt involontaire d'une canalisation de gaz vétuste, à l'origine de la fuite, par M. X... à l'occasion de travaux de plomberie effectués par lui le jour même sur le réseau d'eau, n'était qu'une hypothèse seulement probable, et que la cause de l'accident restait indéterminée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Sada assurances aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la compagnie La France assurances et de M. X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept.