Attendu que l'Agence nationale de valorisation de la recherche (ANVAR), qui avait accordé à la société Alsia une aide à l'innovation, a émis, le 2 janvier 1989 à son encontre un état exécutoire portant sur 162 022 francs ; qu'après rejet de l'opposition à cet état, l'ANVAR ayant fait signifier à la société Alsia le 13 avril 1994 un commandement aux fins de saisie-vente portant non seulement sur le principal de 162 022 francs, mais aussi sur la somme de 99 629,35 francs d'intérêts décomptés depuis le 2 janvier 1989, cette société a saisi le juge de l'exécution d'une demande tendant à voir constater que l'ANVAR ne disposait pas d'un titre exécutoire consacrant le droit à intérêts ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ordonné la mainlevée de toutes les mesures d'exécution entreprises par l'ANVAR à l'encontre de la société Alsia au titre des intérêts assortissant la créance constatée par l'état exécutoire, alors, selon le moyen, que si les intérêts afférents à une dette déjà déterminée que le juge constate sont dus, de plein droit, dès la demande en justice valant sommation de payer, le même effet doit être attaché à la demande en justice même si ces intérêts n'ont pas été réclamés par un chef spécial des conclusions, qu'il en résulte que pour obtenir les intérêts légaux il n'est même pas nécessaire de les réclamer, qu'il suffit de sommer le débiteur de payer le capital, qu'il doit en être de même lorsque, comme en l'espèce, l'état validé vaut titre exécutoire et qu'une décision définitive a déclaré le débiteur mal fondé en son opposition à cet état exécutoire, et que dès lors, en décidant, contrairement au premier juge, que les intérêts moratoires prévus par l'article 1153 du Code civil devaient faire l'objet d'une condamnation explicite tout en constatant qu'ils étaient dus de plein droit à compter de la sommation de payer, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article précité ;
Mais attendu que, pour pouvoir être recouvrés par voie d'exécution, les dommages-intérêts prévus à l'article 1153 du Code civil doivent faire l'objet d'une disposition spéciale du titre en vertu duquel est exercée la poursuite ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais, sur le second moyen :
Vu l'article 1382 du Code civil ;
Attendu qu'une action en justice ne peut, sauf circonstances particulières, qu'il appartient alors au juge de spécifier, constituer un abus de droit, lorsque sa légitimité a été reconnue par la juridiction du premier degré, malgré l'infirmation dont sa décision a été l'objet en appel ;
Attendu que, pour condamner l'ANVAR à payer à la société Alsia la somme de 4 000 francs à titre de dommages-intérêts, la cour d'appel, dont l'arrêt est infirmatif, a retenu que l'ANVAR, qui ne saurait se réfugier derrière une interprétation controuvée des articles 1153 et 1153-1 du Code civil, a commis un évident abus ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'interprétation contestée était celle retenue par les premiers juges, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qui concerne la condamnation au paiement d'une somme de 4 000 francs à titre de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 19 octobre 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Colmar, autrement composée.