Attendu que Liliane X..., née en 1944, a eu quatre enfants entre 1964 et 1980 et subi deux accidents abortifs ; que, souhaitant avoir un cinquième enfant malgré une dysovulation, elle a consulté un médecin gynécologue, M. Y..., qui a réalisé une induction ovarienne, le début de la grossesse se situant le 20 août 1988 et le terme prévu le 20 mai 1989 ; que, toutefois, Liliane X... a demandé à M. Y... de procéder au déclenchement artificiel de l'accouchement de façon que la naissance se produise le 10 mai, jour anniversaire de son mariage ; que le praticien a accédé à cette demande et que l'accouchement, sous anesthésie péridurale, a eu lieu ce jour-là à 19 heures 55, mais qu'une rupture utérine a entraîné une hémorragie immédiate abondante ; qu'à 22 heures il a été pratiqué une hystérectomie d'hémostase, mais qu'une hémorragie vaginale a persisté au cours de la nuit et que le lendemain M. Y... a décidé une nouvelle intervention consistant en une hémostase chirurgicale qui a été faite à 12 heures et au cours de laquelle Liliane X... a subi deux arrêts cardiaques prolongés, à la suite desquels elle a été plongée dans un état quasi végétatif jusqu'à son décès survenu le 12 mai 1991 ; que, sur l'action engagée par le mari et les enfants de la défunte, l'arrêt confirmatif attaqué a retenu l'entière responsabilité de M. Y... et mis hors de cause trois médecins anesthésistes intervenus lors des opérations, MM. Z..., A... et B... ;
Sur le premier moyen pris en ses deux branches : (sans intérêt) ;
Sur les trois autres moyens réunis pris en leurs diverses branches :
Attendu qu'à l'encontre de la décision de la cour d'appel, M. Y... et son assureur invoquent des griefs tirés d'une méconnaissance des règles de la charge de la preuve, d'une dénaturation des conclusions des experts, d'une violation de l'article 1147 du Code civil au regard des fautes retenues à l'encontre du praticien et du lien de causalité entre ces fautes et le préjudice de la défunte, et, enfin, d'une méconnaissance de l'article 1382 du même Code en ce qui concerne la mise hors de cause des médecins anesthésistes ;
Mais attendu, d'abord, qu'il appartient au médecin de prouver qu'il a bien donné à son patient une information loyale, claire et appropriée sur les risques graves des investigations ou des soins qu'il lui propose, ou que le patient demande, de façon à lui permettre d'y donner un consentement ou un refus éclairé ;
Attendu, ensuite, que, par motifs propres et adoptés, la cour d'appel, qui n'a pas dénaturé les conclusions des experts, a relevé que M. Y... avait fait prendre des risques à sa patiente en acceptant, d'une part, de procéder à une induction de l'ovulation chez une femme âgée de 44 ans qui avait déjà quatre enfants, souffrait d'une dysovulation et avait fait deux accidents abortifs, d'autre part, en l'exposant, sans justification thérapeutique, au risque majeur d'un déclenchement artificiel de l'accouchement malgré ses antécédents et dans des conditions obstétricales peu favorables compte tenu d'une présentation élevée, d'un utérus très hypotonique et d'un col court mais fermé ; que la cour d'appel a pu en déduire que M. Y... avait ainsi manqué à l'obligation pesant sur lui, en application de l'article 18 du Code de déontologie médicale issu du décret n° 79-506 du 28 juin 1979, de ne pas faire courir au patient un risque injustifié et de refuser d'accéder à ses demandes qui l'exposaient, sans justification thérapeutique, à un danger ;
Attendu, en outre, que, sans davantage dénaturer le rapport des experts, la cour d'appel a retenu qu'après la survenance de la rupture utérine et l'apparition de l'hémorragie M. Y... avait donné des soins incomplets et " retardés " à sa patiente car, d'une part, l'hémostase n'avait pas été réalisée lors de l'hystérectomie ayant suivi l'accouchement, d'autre part, un délai long s'était écoulé entre l'accouchement et la première intervention, puis la seconde réalisée le lendemain ; que de cet ensemble d'éléments, la cour d'appel a pu déduire que M. Y..., tenu d'assurer la surveillance post-opératoire de sa patiente en ce qui concerne l'évolution de l'hémorragie ayant nécessité la première intervention, avait commis des fautes qui étaient en relation directe et certaine avec le dommage subi par la défunte ;
Attendu, enfin, que la juridiction du second degré, ayant relevé que les médecins anesthésistes avaient agi conformément aux données acquises de la science et assuré la surveillance des suites des anesthésies, sans négliger l'obligation générale de prudence et de diligence leur incombant quant au domaine de compétence de leur confrère M. Y..., a légalement justifié sa décision les mettant hors de cause ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.