Attendu que la société anonyme Centre européen d'informatique et d'automation (CEIA), préconisait des méthodes diagnostiques et thérapeutiques utilisées notamment par M. X..., pharmacien biologiste, dans le laboratoire d'analyses biologiques médicales qu'il exploite à Bordeaux ; que, par lettre du 12 janvier 1987, le ministre des Affaires sociales et de l'Emploi a invité le directeur de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (la Caisse), à mettre fin à la prise en charge de ces méthodes ; que, par circulaire du 13 mars 1987, la Caisse a diffusé cette invitation à toutes les caisses primaires d'assurance maladie ; que M. X..., se plaignant de ce que la caisse primaire étendait le champ de cette instruction, en refusant de lui rembourser toutes les analyses issues de son laboratoire entrant dans le champ d'application de l'article L. 321-1 du Code de la sécurité sociale, et donc couvertes par l'assurance maladie, même si elles ne procédaient pas des méthodes de la CEIA, a assigné le ministre devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Bordeaux ; que celui-ci l'a débouté par ordonnance du 6 juin 1989, confirmée par arrêt de la cour d'appel de Bordeaux du 14 août 1990 ; que M. X... a, le 22 juin 1992, à nouveau assigné en référé le ministre et la Caisse, pour obtenir la cessation de la voie de fait qu'il alléguait en se prévalant d'un élément nouveau, constitué par un arrêt du Conseil d'Etat du 24 avril 1992 rejetant le recours pour excès de pouvoir formé par la CEIA contre la lettre du 12 janvier 1987 au motif que celle-ci, insusceptible par elle-même de recevoir application, ne pouvait faire l'objet d'un tel recours ; que le juge des référés ayant rejeté cette demande, l'arrêt attaqué a mis hors de cause le ministre et confirmé l'ordonnance en ce qu'elle avait dit que la lettre ministérielle n'était pas constitutive d'une voie de fait, mais l'a infirmée, en ce qu'elle avait dit que la circulaire de la Caisse ne constituait pas une voie de fait ; que, retenant sa compétence, la cour d'appel a ordonné une expertise médicale ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal pris en ses deux branches : (sans intérêt) ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir dit que la lettre ministérielle du 12 janvier 1987 n'était pas constitutive d'une voie de fait, alors qu'en statuant ainsi sans rechercher si, d'une part, compte tenu de ses termes impératifs, cette lettre adressée par l'autorité de tutelle à la Caisse nationale d'assurance maladie qui a, en fait, entendu appliquer ses prescriptions et, d'autre part, l'inaction de cette autorité étatique devant la situation ainsi créée, n'avaient pas contribué à causer l'atteinte à la liberté fondamentale qu'elle a constatée, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 13 de la loi des 16 et 24 août 1790 ;
Mais attendu que, la voie de fait ne pouvant résulter que d'un acte de l'Administration susceptible de faire grief, c'est-à-dire de porter atteinte à un droit ou à une liberté, la cour d'appel qui a jugé, comme le Conseil d'Etat, que la lettre litigieuse n'avait pas ce caractère, a légalement justifié sa décision sans avoir à faire les recherches que le moyen lui reproche de ne pas avoir effectuées ;
D'où il suit que le moyen est inopérant ;
Mais sur le second moyen, du pourvoi principal pris en sa première branche :
Vu la loi des 16-24 août 1790 ;
Attendu que, pour constater que la Caisse avait commis une voie de fait en décidant, par voie de circulaire que des refus administratifs de prise en charge seraient systématiquement opposés aux prestations facturées par les laboratoires dénoncés dans la lettre ministérielle du 12 janvier 1987, l'arrêt attaqué énonce que cette circulaire constituait un acte administratif manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir de la Caisse ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les dispositions critiquées, mêmes illégales, relevaient de la mission de la Caisse de diffuser les lettres ministérielles aux organismes de base, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'il y a lieu de faire application de l'article 627, alinéa 1er, du nouveau Code de procédure civile, la cassation encourue n'impliquant pas qu'il soit à nouveau statué sur le fond de ce chef ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du second moyen du pourvoi principal :
REJETTE le pourvoi incident ;
CASSE ET ANNULE mais seulement en ce qu'il a dit que la circulaire de la Caisse du 13 mars 1987, constituait une voie de fait et en ce que la cour d'appel a ordonné une expertise médicale, l'arrêt rendu le 28 septembre 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi.