Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 29 mai 1997), que la société Logirep, maître de l'ouvrage, a, en 1992, chargé la société Construction et béton armé (société CBA), depuis en liquidation judiciaire avec M. Y... pour liquidateur, de la construction de bâtiments ; que cette société a sous-traité divers lots à la société Entreprise Fouchard (société Fouchard), à la Société de construction et commercialisation (société SCC) et à M. X... ; que, le 17 novembre 1992, ces sous-traitants ont adressé à la société CBA, avec copie à la société Logirep, une mise en demeure de mettre en application la délégation de paiement à leur profit ; que, postérieurement à cette date, la société Logirep qui, le 31 décembre 1992, a mis en demeure la société CBA de remplir ses obligations envers ses sous-traitants, mais s'est heurtée au refus de celle-ci, a adressé plusieurs paiements à la société CBA ; que les sous-traitants, n'ayant pas été payés par cette société, ont assigné le maître de l'ouvrage ;
Attendu que la société Logirep fait grief à l'arrêt de la condamner, sur le fondement de l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975, à payer diverses sommes aux sous-traitants non présentés à son acceptation par l'entrepreneur principal, alors, selon le moyen, 1° que l'obligation de mettre en demeure l'entrepreneur principal de solliciter l'agrément des sous-traitants doit être exécutée dans un délai raisonnable à compter de la date à laquelle le maître de l'ouvrage a connaissance de la présence des sous-traitants sur le chantier ; que la cour d'appel, qui a constaté que le maître de l'ouvrage avait eu connaissance de la présence des sous-traitants au plus tard le 17 novembre 1992 et avait délivré la mise en demeure le 31 décembre 1992, et en a déduit que cette mise en demeure était tardive, sans pourtant expliquer en quoi le délai entre ces deux dates n'était pas raisonnable, s'est dispensée d'une constatation nécessaire et a privé sa décision de base légale au regard des articles 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 et 1382 du Code civil ; 2° que la loi oblige seulement le maître de l'ouvrage à mettre en demeure l'entrepreneur principal de solliciter l'agrément des sous-traitants et de leurs conditions de paiement, et le maître de l'ouvrage, qui n'a pas de pouvoir de contrainte envers l'entrepreneur principal, n'est pas tenu de garantir l'efficacité ni le résultat de cette mise en demeure ; que n'est donc pas fautif le fait, pour le maître de l'ouvrage qui a délivré une mise en demeure à laquelle l'entrepreneur principal refuse de déférer, de continuer à régler ce dernier des sommes dues au titre du marché de travaux ; que la cour d'appel ne pouvait donc retenir une faute consistant, pour le maître de l'ouvrage, à avoir continué à régler l'entrepreneur principal après délivrance d'une mise en demeure restée infructueuse, sans violer l'article 1382 du Code civil ; 3° qu'une faute ne peut entraîner la responsabilité d'un dommage que si elle l'a causé ; que, le maître de l'ouvrage n'étant pas tenu de garantir l'efficacité de la mise en demeure, le défaut de mise en demeure, ou son caractère tardif, n'est pas causal du préjudice subi par les sous-traitants du fait de l'absence de possibilité d'exercer l'action directe, s'il est établi que l'entrepreneur principal entendait ne pas déférer à la mise en demeure ; que la cour d'appel, qui constatait que le maître de l'ouvrage avait délivré la mise en demeure et que l'entrepreneur principal avait refusé d'y déférer, ne pouvait retenir que le retard de la mise en demeure avait causé le préjudice des sous-traitants, sans violer de nouveau l'article 1382 du Code civil ; 4° que la perte par le sous-traitant de la possibilité d'exercer l'action directe contre le maître de l'ouvrage constitue seulement une perte de chance, puisque cette action n'est qu'un avantage affecté d'aléa, et ce préjudice ne peut être évalué à l'intégralité des sommes dues au sous-traitant et que ce dernier pouvait réclamer en exerçant l'action directe ; que la cour d'appel, qui constatait que le préjudice des sous-traitants consistait en l'impossibilité d'exercer l'action directe, ce dont il résultait qu'il s'agissait d'une simple perte de chance, ne pouvait leur allouer l'intégralité des sommes qui leur restaient dues, sans violer encore l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui retient que, bien qu'avertie le 17 novembre 1992 de l'intention du sous-traitant d'exercer l'action directe, la société Logirep avait attendu le 31 décembre 1992 pour mettre en demeure l'entrepreneur principal de remplir ses obligations et que cette société avait, après avoir reçu l'avertissement, versé à cet entrepreneur des sommes qui auraient été suffisantes pour payer aux sous-traitants la totalité des sommes qu'ils réclamaient et qu'ils auraient perçues si cette faute n'avait pas été commise, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.