Attendu qu'un certain nombre de personnes domiciliées en France y ont acheté des billets d'avion sur un vol de la compagnie British Airways à destination de Madras et Kuala Lumpur, via Londres ; que l'avion, qui avait décollé de cette dernière ville dans la soirée du 1er août 1990, a fait escale, le 2 août vers une heure du matin, à l'aérodrome de Koweït City, peu de temps après que les troupes irakiennes aient commencé d'envahir le Koweït ; que l'aérodrome ayant été fermé en raison de bombardements, les passagers ont été transportés dans un hôtel où ils ont été faits prisonniers par l'armée irakienne, puis détenus pendant une période allant de un à trois mois en divers endroits du Koweït ou de l'Irak ; qu'après leur retour en France, ces passagers et des membres de leur famille ont engagé contre la compagnie British Airways une action en réparation des préjudices consécutifs à cette détention, action à laquelle s'est jointe le Fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions (le Fonds), qui avait versé une certaine somme aux victimes de nationalité française en application des dispositions des articles L. 126-1 et L. 422-2 du Code des assurances ; que l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 12 novembre 1996 ), écartant l'application de la convention de Varsovie de 1929 et statuant sur le fondement de l'article 1147 du Code civil, a accueilli tant l'action des victimes que le recours subrogatoire du Fonds ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la compagnie British Airways reproche, d'abord, à cet arrêt d'avoir déclaré recevable l'action des victimes ayant perçu une indemnisation du Fonds, alors que celle-ci étant intégrale serait exclusive d'un recours contre le tiers responsable et que si les quittances signées par ces victimes étaient irrégulières, il leur appartenait d'agir en nullité contre le Fonds, de sorte qu'auraient été violés les articles L. 422-2 et L. 211-16 du Code des assurances ;
Mais attendu que la cour d'appel a constaté, que si les quittances que le Fonds faisait signer aux victimes mentionnaient que les règlements dont elles bénéficiaient étaient effectués en application de l'article L. 422-2 du Code des assurances, elles ne comportaient pas les mentions obligatoires imposées par l'article L. 211-16 du même Code, auquel renvoie l'article précité, suivant lesquelles les victimes pouvaient, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, dénoncer l'offre d'indemnisation dans les quinze jours ; que la juridiction du second degré en a exactement déduit que du fait de cette irrégularité, les victimes, qui n'avaient pas été en mesure d'apprécier la portée exacte de leur acceptation de l'offre faite par le Fonds, conservaient leur droit d'agir contre le tiers responsable pour obtenir une indemnisation complémentaire, la circonstance qu'elles n'aient pas, au préalable, agi en nullité de l'offre et remboursé le Fonds étant indifférente ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que la compagnie British Airways reproche encore à la cour d'appel d'avoir retenu sa responsabilité sur le fondement de l'article 1147 du Code civil, alors qu'il résulte des articles 1 et 24 de la convention de Varsovie que la responsabilité du transporteur aérien ne peut être engagée, pour quelque cause que ce soit, que dans les conditions qu'elle prévoit, à l'exclusion de tout recours de droit commun ;
Mais attendu que la convention de Varsovie du 12 octobre 1929 pour l'unification de certaines règles relatives au transport aérien international ne régit la responsabilité du transporteur aérien, pour les dommages causés aux passagers, que s'ils sont survenus à bord de l'aéronef ou au cours des opérations d'embarquement ou de débarquement ; que la cour d'appel, qui a constaté que les dommages subis par les passagers s'étaient produits hors de l'aéronef et après leur débarquement, alors qu'ils étaient regroupés dans un hôtel, en a exactement déduit que cette convention n'avait pas vocation à s'appliquer au litige ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que la compagnie British Airways soutient également que l'obligation du transporteur aérien serait de moyens et non de résultat quant à la sécurité des passagers après leur débarquement dans un pays d'escale, de sorte que l'article 1147 du Code civil aurait été violé ;
Mais attendu que si un transporteur aérien n'est tenu d'une obligation de sécurité de résultat vis-à-vis de ses passagers qu'en ce qui concerne, outre le vol proprement dit, les opérations d'embarquement et de débarquement, il reste tenu à leur égard d'une obligation de sécurité de moyens dans l'exécution du contrat le liant à ses clients ; que la cour d'appel, statuant par motifs propres et adoptés, a constaté que l'escale sur l'aérodrome de Koweït City, qui n'était pas mentionnée sur les billets d'avion, avait été portée à la connaissance des passagers lors du départ de Londres et qu'elle avait été réalisée à un moment où l'imminence d'un conflit armé était hautement prévisible, et cela bien que l'avion ait disposé d'une réserve de carburant suffisante pour l'éviter, de sorte que les passagers avaient été exposés sans raison valable à un risque de guerre ; qu'elle a pu déduire de ces constatations que la compagnie British Airways avait failli à son obligation de moyens ;
Sur le quatrième moyen :
Attendu que la compagnie British Airways fait enfin grief à la cour d'appel de n'avoir pas recherché s'il était normalement prévisible pour elle que l'escale sur l'aérodrome de Koweït City ait de telles conséquences pour les passagers, de sorte que l'arrêt serait dépourvu de base légale au regard de l'article 1150 du Code civil ;
Mais attendu que ce moyen n'a pas été soulevé devant la cour d'appel et que les juges du fond ne sont pas tenus de rechercher d'office si un dommage était prévisible ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.