AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Mme Catherine X..., épouse Y..., demeurant ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 27 novembre 1997 par la cour d'appel de Pau (1re Chambre), au profit :
1 / de la commune de Géronce, prise en la personne de son maire en exercice, domicilié en cette qualité Hôtel de Ville à Géronce, 64400 Oloron-Sainte-Marie,
2 / de M. Frédéric Z..., demeurant à Géronce, 64400 Oloron-Sainte-Marie,
défendeurs à la cassation ;
En présence de Mme Renée X..., demeurant à Sévignacq Meyracq, 64260 Arudy ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 3 novembre 1999, où étaient présents : M. Beauvois, président, Mme Di Marino, conseiller rapporteur, Mlle Fossereau, MM. Boscheron, Toitot, Bourrelly, Mme Stéphan, MM. Peyrat, Dupertuys, Philippot, conseillers, M. Pronier, Mme Fossaert-Sabatier, conseillers référendaires, M. Sodini, avocat général, Mme Berdeaux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Di Marino, conseiller, les observations de Me Copper-Royer, avocat de Mme Y..., de Me Ricard, avocat de la commune de Géronce, de la SCP Vincent et Ohl, avocat de M. Z..., les conclusions de M. Sodini, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 27 novembre 1997), que M. Dominique X... a acquis, le 6 novembre 1958, une parcelle de terre figurant au cadastre de la commune de Géronce sous le n° C 230 ;
que cette commune ayant, le 18 mars 1988, procédé à un échange de terres avec M. Z..., auquel ont été attribuées les parcelles C 826 et C 827 provenant de la division de la parcelle C 230, Mmes Catherine X..., épouse Y..., et Renée X..., venant aux droits de M. X..., ont saisi le Tribunal afin d'obtenir l'expulsion de M. Z... ;
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de déclarer M. Z... et la commune de Géronce respectivement propriétaires des parcelles C 826 et C 827, alors, selon le moyen, "1 / que celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble en prescrit la propriété par 10 ans si le véritable propriétaire habite dans le ressort de la cour d'appel dans l'étendue de laquelle l'immeuble est situé ; qu'il était constant que les consorts X... bénéficiaient d'un juste titre et que leur bonne foi n'était pas contestée ; que, dès lors, en énonçant qu'elles n'établissaient pas leur droit par justification d'une prescription acquisitive au motif inopérant qu'elles ne prouvaient pas avoir fait un usage de leur terre et accompli un acte de propriété qui aurait contredit le droit de propriété de la commune de Géronce, la cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article 2265 du Code civil ; 2 / que la propriété est le droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue ; qu'elle ne s'éteint pas par le non-usage ; que les consorts X... disposant d'un titre de propriété et étant de bonne foi, la cour d'appel ne pouvait leur refuser la qualité de propriétaire aux motifs qu'elles n'auraient pas fait un usage de leur terre ou accompli un acte de propriété qui aurait contredit le droit de propriété de la commune de Géronce ; qu'en statuant ainsi, elle a violé l'article 544 du Code civil ; 3 / qu'en tout état de cause, en ne recherchant pas si le droit de libre parcours et de pacage ne constituait pas des actes de simple tolérance accordée par les consorts X... et leurs auteurs à des tiers, actes qui ne pouvaient fonder une possession, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2232 du Code civil" ;
Mais attendu qu'ayant relevé que le jugement d'adjudication du 22 janvier 1874 rendu au profit de M. Jean A... et les actes successifs, dont l'acte d'acquisition de M. Dominique X... du 6 novembre 1958, réalisaient, tous, transmission des droits relativement à la parcelle figurant au cadastre de la commune de Géronce sous le n° 60, devenue la parcelle C 230, sans qu'aucune mention des actes ne porte l'indication d'une quelconque limitation des droits ainsi transférés et retenu, par des motifs non critiqués, que le jugement d'adjudication, bien qu'il n'eût pas précisément spécifié qu'il n'emportait cession que du seul droit de coupe de la parcelle considérée, ne faisait pas, par lui-même, preuve du transfert à M. A... de la pleine propriété de la parcelle 60, devenue C 230, et qu'il en était de même des autres titres successivement intervenus, et ayant constaté que Mmes Y... et X... n'établissaient pas que, postérieurement à son acquisition, M. A... ou ses ayants droit successifs eussent exercé sur la parcelle objet du litige des actes effectifs et non équivoques de possession dans des conditions utiles pour prescrire et, en particulier, qu'ils eussent accompli un acte quelconque qui aurait contredit le droit de propriété de la commune de Géronce ou ceux que ces tiers tenaient de cette commune, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne Mme Y... à payer à la commune de Géronce la somme de 9 000 francs et à M. Z... la somme de 9 000 francs ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit décembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf