Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 22 octobre 1997), que le mineur Thierry X..., qui avait été confié, sur le fondement de l'article 375-1 du Code civil, par un juge des enfants, à l'association Montjoie (l'association), puis, en raison d'un incendie, placé en liberté surveillée auprès de celle-ci, a incendié les entrepôts de la société Socamaine ; que celle-ci et son assureur, le GAN, et subrogé dans les droits, après avoir partiellement indemnisé la société, ont assigné l'association et son assureur, la MAIF, en réparation du préjudice ;
Attendu que l'association et la MAIF font grief à l'arrêt d'avoir accueilli les demandes, alors, selon le moyen, d'une part, qu'il résulte de l'ensemble des prescriptions de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante, modifiée par la loi du 24 mai 1951, que le législateur a entendu généraliser dans ce domaine des méthodes de rééducation fondées sur un régime de liberté surveillée ; qu'appliquées à un mineur pour lequel la prévention est établie dans les cas visés aux articles 15 et 16 de l'ordonnance précitée, leur emploi crée un risque spécial et est susceptible, en cas de dommages causés aux tiers par les enfants confiés soit à des établissements spécialisés, soit à une " personne digne de confiance ", d'engager, même sans faute, la responsabilité de la puissance publique à leur égard ; que la responsabilité de l'Etat peut être recherchée sur le même fondement en cas de dommage causé aux tiers lorsque, au cours de la phase d'instruction d'une infraction mettant en cause un mineur et en dépit des risques découlant du comportement délictueux antérieur de l'intéressé, le juge d'instruction ou le juge des enfants, à défaut de mise en oeuvre des mesures de contrainte mentionnées à l'article 11 de l'ordonnance du 2 février 1945, décide de confier la garde du mineur, conformément à l'article 10 de l'ordonnance précitée, soit à une institution publique, soit à une institution privée habilitée, soit à " une personne digne de confiance " ; que cette responsabilité de l'Etat, qui pourvoit déjà à la réparation des dommages liés au risque spécial consécutif à la décision du juge des enfants, rend inutile et sans objet une responsabilité de plein droit de l'institution privée à qui a été confiée la garde du mineur ; qu'en retenant une telle responsabilité, la cour d'appel a violé les articles 10 de l'ordonnance du 2 février 1945 et 1384, alinéa 1er, du Code civil ; d'autre part, qu'aux termes de l'article 25, alinéa 1er, de l'ordonnance du 2 février 1945, la rééducation des mineurs en liberté surveillée est assurée sous l'autorité du juge des enfants par des délégués à la liberté surveillée ; que c'est donc le juge des enfants assisté par le délégué à l'éducation surveillée, en l'occurrence le service éducatif auprès du Tribunal, et non l'association Montjoie, qui avait la charge d'organiser et de contrôler le mode de vie du mineur ; que, dès lors, la cour d'appel, en retenant la responsabilité de l'association Montjoie, a violé tant les dispositions de l'article 25 de l'ordonnance du 2 février 1945 que celles de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil ;
Mais attendu que l'arrêt, après avoir énoncé à bon droit que le régime de la liberté surveillée laisse subsister la garde de l'enfant et l'exercice des droits et obligations qui en sont les attributs, retient que l'association avait reçu et conservé la charge d'organiser et de contrôler à titre permanent le mode de vie du mineur ; qu'elle s'en était acquittée par un placement en famille d'accueil dans des conditions qu'elle avait déterminées et qu'elle contrôlait ;
Que, de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a pu déduire que, sans préjudice de la responsabilité de l'Etat du fait des dommages causés par des mineurs délinquants confiés à des établissements chargés de leur rééducation dans le cadre d'une mesure de liberté surveillée, la responsabilité de l'association était engagée sur le fondement de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.