AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 / Mme Marguerite X...
B...,
2 / M. Joël B...,
tous deux demeurant Châlet Hemen Ongui, Quartier Agoretta, 64210 X...,
en cassation de l'arrêt n° 5054/98 rendu le 17 décembre 1998 par la cour d'appel de Pau (2e chambre I), au profit de Mme Léa A... épouse X..., demeurant ...,
défenderesse à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 30 janvier 2001, où étaient présents : M. Beauvois, président, M. Dupertuys, conseiller rapporteur, Mlle Fossereau, MM. Toitot, Bourrelly, Mme Stéphan, MM. Peyrat, Guerrini, Philippot, Assié, Mme Gabet, conseillers, MM. Pronier, Betoulle, conseillers référendaires, M. Guérin, avocat général, Mme Berdeaux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Dupertuys, conseiller, les observations de Me Foussard, avocat des consorts B..., de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme X..., les conclusions de M. Guérin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le premier moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 17 décembre 1998) qu'à la suite du décès de son père, M. Jacques X..., Mme Y... et son fils M. Joël B... ont assigné Mme Léa A..., veuve X... pour faire constater à titre personnel que Mme Y... justifiait d'un titre locatif sur un chalet dépendant de la succession de M. Jacques X... et à titre subsidiaire qu'elle bénéficiait d'un prêt à usage sur les mêmes locaux ;
Attendu que les consorts B... font grief à l'arrêt de les débouter de leur demande principale alors, selon le moyen :
1 ) qu'il y a contrat de bail dès lors que le propriétaire met le local à la disposition de son cocontractant moyennant une contrepartie à la charge de ce dernier ; qu'en refusant d'admettre l'existence d'un bail, tout en constatant que les locaux avaient été mis à la disposition de Mme Y..., moyennant une contrepartie financière à la charge de cette dernière, les juges du fond ont violé l'article 1709 du Code civil ;
2 ) que le défaut de prix réel et sérieux, lié à la modicité de la contrepartie financière, s'analyse en un défaut de cause ; que le défaut de cause a simplement pour effet d'ouvrir une action en nullité au profit des parties intéressées ; qu'en niant l'existence d'un bail, pour défaut de prix réel et sérieux, alors que cette circonstance pouvait tout au plus permettre l'engagement d'une action en nullité, les juges du fond ont violé les articles 1131, 1134 et 1709 du Code civil ;
3 ) que la distinction entre le bail et la convention d'occupation précaire tient à ce que, en cas de convention d'occupation précaire, le propriétaire peut mettre un terme à la mise à disposition à tout moment ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ce point, tout en retenant l'existence d'une convention d'occupation précaire, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 1134 et 1709 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé que le seul versement de sommes qualifiées de loyer sur les quittances ne constituait pas la preuve de l'existence d'une location en l'absence d'autres éléments déterminant de façon non équivoque l'intention de Jacques X... de louer des locaux dans sa propre maison à sa fille, qu'aucune quittance n'était produite postérieurement au 1er janvier 1983 et que le prix concerné n'apparaissait ni réel ni sérieux, la cour d'appel a pu en déduire, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que l'existence d'un engagement de location n'était pas établie et que Jacques X... avait seulement hébergé sa fille en ne concluant avec elle qu'un convention d'occupation précaire ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que les consorts B... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande tendant à faire constater l'existence d'un prêt à usage sur un chalet alors, selon le moyen :
Qu'il y a prêt à usage dès lors que le propriétaire de la chose met celle-ci à disposition de son cocontractant pour en user, à charge pour ce dernier de la restituer lorsqu'il n'en a plus l'usage ; qu'en rejetant l'existence d'un prêt à usage au bénéfice de Mme Z... sans rechercher, concrètement, si M. X... n'avait pas mis une partie des locaux du châlet Hemen-Ongui à la disposition de sa fille pour un usage d'habitation, à charge pour celle-ci de les restituer quand elle n'en aurait plus l'usage, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 1875 du Code civil ;
Mais attendu que Mme Y... s'étant bornée à soutenir, dans ses écritures, qu'elle justifiait de 1958 à 1983 de quittances de loyer faisant la preuve de l'existence d'un bail et qu'elle se trouvait moralement dans l'impossibilité de justifier de la possession de quittance, année par année, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, a légalement justifié sa décision de ce chef en retenant que Mme Y... ne pouvait se prévaloir d'un prêt à usage sur un appartement ou des pièces de la maison ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les consorts B... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne les consorts B... à payer à Mme X... la somme de 12 000 francs ou 1 829,39 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille un.