AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société civile immobilière (SCI) Le Bois de Cimiez, dont le siège est ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 10 novembre 1999 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (3e chambre civile), au profit :
1 / de la société Axa courtage, venant aux droits de l'UAP, société anonyme, dont le siège est ...,
2 / du syndicat des coproprietaires Le Bois de Cimiez, représenté par le Cabinet Brustel, dont le siège est ...,
3 / de l'Entreprise Nice étanchéité, dont le siège est ...,
4 / de M. Paul Louis Z..., ayant demeuré 148, vieux ..., décédé, aux droits duquel se trouvent ses héritiers :
- Mme Adrienne N..., veuve Z...,
- M. Paul Jean Z...,
- Mme Camille Z..., épouse Jacob,
- Mme Véronique Z..., épouse K...,
- M. Jacques Pascal Z...,
5 / de M. Jacques Z..., demeurant 144, vieux ...,
6 / de M. Paul C...,
7 / de Mme Marcelle B..., épouse C...,
demeurant ensemble Le ...,
8 / de M. René E...,
9 / de Mme Antoinette F..., épouse E...,
demeurant ensemble 12, rue du Président Wilson, 92300 Levallois-Perret,
10 / de Mme Henriette D...,
11 / de M. Guy A...,
12 / de Mme Génia X..., épouse A...,
13 / de M. Claude I...,
14 / de Mme Catherine M..., épouse I...,
15 / de Mme Jeanine J..., épouse Y...,
demeurant tous Le ...,
16 / de M. O..., demeurant L'Alcyon, ...,
17 / de M. Vincent H..., demeurant ...,
18 / de Mme Adrienne N..., épouse Z..., demeurant vieux ...,
19 / de Mme Véronique Z..., épouse K..., demeurant ...,
20 / de M. Paul Jean Z..., demeurant vieux ...,
21 / de Mme Camille Z..., épouse Jacob, demeurant Rosemont, vieux ...,
22 / de la compagnie Axa, venant aux droits de l'UAP, assureur dommages ouvrages, dont le siège est ...,
défendeurs à la cassation ;
En présence :
1 / de la société Actimmo, dont le siège est ...,
2 / de M. Jean L..., domicilié ... ;
Les consorts Z..., C..., E..., A..., I..., G...
Y... et D... et le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Bois de Cimiez ont formé, par un mémoire déposé au greffe le 6 novembre 2000, un pourvoi provoqué contre le même arrêt ;
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Les demandeurs au pourvoi provoqué invoquent, à l'appui de leur recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au Procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l'article L. 131-6-1, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 23 mai 2002, où étaient présents : Mlle Fossereau, conseiller doyen faisant fonctions de président, Mme Lardet, conseiller rapporteur, MM. Chemin, Villien, Cachelot, Martin, Mme Gabet, conseillers, Mmes Fossaert-Sabatier, Boulanger, Nési, conseillers référendaires, M. Sodini, avocat général, Mlle Jacomy, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Lardet, conseiller, les observations de Me Cossa, avocat de la société civile immobilière (SCI) Le Bois de Cimiez, de Me Choucroy, avocat du syndicat des coproprietaires Le Bois de Cimiez, des consorts Z..., des époux C..., des époux E..., de Mme D..., de Mme Y..., des époux A... et des époux I..., de la SCP Rouvière et Boutet, avocat de la société Axa courtage, les conclusions de M. Sodini, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Donne acte à la société civile immobilière (SCI) Le Bois de Cimiez du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'Entreprise Nice étanchéité, M. O... et M. H... ;
Dit n'y avoir lieu de mettre hors de cause la société Axa courtage, aux droits de l'Union des assurances de Paris, assureur "constructeurs non réalisateurs" ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 10 novembre 1999), que la société civile immobilière Le Bois de Cimiez (la SCI), maître de l'ouvrage, assurée en police "dommages-ouvrage" par la compagnie Union des assurances de Paris (l'UAP), devenue la société Axa courtage, et la société Actimmo, promoteur, également assurée en police "constructeurs non réalisateurs" par la compagnie Union des assurances de Paris (l'UAP), devenue la société Axa courtage, ont, en vue de sa vente par lots en l'état futur d'achèvement, fait édifier un groupe d'immeubles dont M. L..., gérant de la SCI, a assuré la maîtrise d'oeuvre d'exécution ; que la réception est intervenue le 1er février 1982 ; que le syndicat des copropriétaires Le Bois de Cimiez (le syndicat) et huit copropriétaires ou couples de copropriétaires ont, le 14 mai 1991, assigné, sur le fondement de la garantie décennale, en réparation de désordres d'infiltrations, la SCI, la société Actimmo et M. L... ; que la compagnie UAP a été appelée en garantie ;
Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande, alors, selon le moyen :
1 / que l'arrêt ayant relevé que les demandes formulées par le syndicat des copropriétaires Le Bois de Cimiez devaient être déclarées irrecevables à l'égard de M. L... et de la société Actimmo, dès lors que ces parties avaient appelé en garantie la compagnie UAP qui avait soulevé l'irrecevabilité dudit syndicat, cette irrecevabilité devait nécessairement profiter aussi à la SCI Le Bois de Cimiez qui avait sollicité en cause d'appel la confirmation du jugement qui l'avait jugée bien fondée en son appel en garantie formé contre cet assureur ; qu'en retenant implicitement mais nécessairement, pour décider le contraire, que la SCI Le Bois de Cimiez n'avait pas appelé en garantie l'UAP, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige, en violation de l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;
2 / subsidiairement, que s'il était considéré que la cour d'appel n'a pas retenu implicitement que la SCI Le Bois de Cimiez n'avait pas appelé l'UAP en garantie, elle a alors procédé à une discrimination pure et simple entre trois parties ayant pareillement appelé en garantie l'UAP, en ne faisant bénéficier que deux seulement d'entre elles de l'irrecevabilité, invoquée par cet assureur, de la demande du syndicat des copropriétaires, et violé ainsi les articles 31, 32 et 335 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que si chaque défendeur est en droit de se prévaloir de l'irrégularité de fond tirée du défaut de pouvoir du syndicat des copropriétaires d'agir en justice, cette irrégularité n'a d'effet qu'à l'égard de celui qui l'invoque ; que la SCI, n'ayant pas devant la cour d'appel excipé de cette irrégularité, le moyen est nouveau, mélangé de fait et de droit, et, partant, irrecevable ;
Sur le second moyen du pourvoi principal, ci-après annexé :
Attendu, d'une part, qu'ayant, par motifs propres et adoptés, relevé que les désordres dénoncés dans le délai de la garantie décennale, dont elle n'a pas retenu qu'ils n'auraient concerné que le bâtiment A, consistaient en des infiltrations et parfois même des écoulements d'eau à l'intérieur des appartements sous toiture-terrasse ayant pour origine, outre la mauvaise conception des superstructures, la pose sur cette toiture-terrasse de lourdes jardinières en béton dont les supports avaient par pression endommagé l'étanchéité sous-jacente, et ayant constaté que des vices, qui ne pouvaient être découverts qu'à la suite de la démolition des jardinières, avaient également concouru à provoquer ces infiltrations, la cour d'appel, qui en a exactement déduit que la garantie décennale était applicable à la réparation de ces vices, a procédé à la recherche prétendument omise et légalement justifié sa décision de ce chef ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant examiné le compte-rendu, soumis à la discussion contradictoire des parties, établi par l'architecte désigné par le syndicat pour assurer la maîtrise d'oeuvre des travaux de reprise, la cour d'appel a souverainement retenu qu'elle disposait des éléments d'appréciation suffisants pour fixer le préjudice du syndicat au coût des travaux complémentaires ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé de ce chef ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi provoqué :
Vu l'article 55 du décret du 17 mars 1967 ;
Attendu que pour déclarer irrecevable l'action du syndicat à l'égard de M. L... et de la société Actimmo, l'arrêt retient que ces parties doivent bénéficier du moyen d'irrecevabilité tiré du défaut d'habilitation du syndic à agir en justice puisque ce moyen a été soulevé par l'UAP qu'ils ont appelée en garantie ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'irrégularité de fond, tirée du défaut de pouvoir du syndic d'agir en justice, n'a d'effet qu'à l'égard de celui qui l'invoque, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que l'action intentée par le syndicat des copropriétaires Le Bois de Cimiez contre M. L... et la société Actimmo est irrecevable, l'arrêt rendu le 10 novembre 1999, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne la SCI Le Bois de Cimiez aux dépens du pourvoi principal :
Condamne M. L... et la société Actimmo, ensemble, aux dépens du pourvoi provoqué ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la SCI Le Bois de Cimiez à payer à la société Axa courtage, assureur "constructeurs non réalisateurs", la somme de 1 800 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé à l'audience publique du vingt-six juin deux mille deux par Mlle Fossereau, conformément à l'article 452 du nouveau Code de procédure civile.