AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu que la cour d'appel a souverainement retenu, répondant aux conclusions, que les époux X... avaient réglé à la société Lambert le coût des travaux supplémentaires commandés directement par eux, le surplus correspondant à des travaux prévus dans le contrat conclu par la société Lambert avec la société TECBA au titre du marché d'origine, et ne pouvant être réclamé aux époux X... ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Besançon, 30 mai 2001), qu'en 1991 les époux X... ont chargé la société Migeon de la construction d'une maison d'habitation, avec garantie de livraison à prix et délai convenus, fournie par la Compagnie européenne d'assurances industrielles (CEAI) ; qu'après liquidation judiciaire de l'entrepreneur, le garant a confié la charge d'achever les travaux à la société ABC gestion, puis à la société Bonding Immovate Mutuel association (BIMA), la société TECBA ayant reçu mission de maîtrise d'oeuvre ; que cette société a confié en sous-traitance les travaux de peinture à la société Lambert ; qu'alléguant l'existence d'un solde impayé du prix de ses travaux, cet entrepreneur a assigné la CEAI et les époux X... ;
Attendu que la société Lambert fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande formée contre la CEAI, alors, selon le moyen :
1 ) que le mandant répond des actes de celui que son mandataire s'est substitué quand il a accepté cette substitution ; que par ailleurs, l'existence d'un contrat de louage d'ouvrage n'exclut pas celle d'un mandat ; que la cour d'appel, qui, ne pouvait se borner à relever l'existence d'un contrat de louage d'ouvrage entre les sociétés ABC gestion puis BIMA et la société TECBA pour exclure celle d'un mandat entre ces mêmes parties, n'a pas recherché si ce contrat de louage d'ouvrage ne s'accompagnait pas d'un mandat par lequel la société ABC gestion, mandataire de la Compagnie européenne d'assurances industrielles, s'était substituée la société TECBA (manque de base légale au regard des articles 1984, 1985, 1991, 1992, 1994 et 1998 du Code civil) ;
2 ) que la cour d'appel ne pouvait statuer comme elle l'a fait sans s'expliquer sur la nature juridique et le contenu des relations que la Compagnie européenne industrielles indiquait entretenir seulement avec la société TECBA, à l'exécution de tous les autres locateurs d'ouvrage (même grief) ;
3 ) que la garantie de livraison de l'ouvrage à prix et délais convenus à laquelle s'oblige le constructeur d'une maison individuelle comporte la garantie pour le sous-traitant d'être payé des sommes qui lui sont dues en cas de défaillance du constructeur (violation des articles L. 231-1 et R. 231-8 du Code de la construction et de l'habitation dans leur rédaction antérieure à la loi n° 90-1129 du 19 décembre 1990) ;
4 ) que la loi du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance ne s'applique pas en cas de contrat de construction d'une maison individuelle sur un terrain qui n'appartient pas au client ; que la cour d'appel n'a pas recherché si la maison individuelle édifiée pour les époux X... l'avait été sur un terrain leur appartenant ou sur un terrain commercialisé par le constructeur, auquel cas la société Lambert n'était pas tenue de mettre la société TECBA en demeure avant d'exercer son action contre la Compagnie européenne d'assurances industrielles (manque de base légale au regard de l'article 12 de la loi susvisée) ;
5 ) que la Compagnie européenne d'assurances industrielles, en sa qualité de constructeur de la maison individuelle des époux X..., était le maître d'ouvrage délégué par ceux-ci et ne pouvait donc pas être considérée comme le maître d'ouvrage des travaux d'achèvement ; que les époux X... ne contestaient pas avoir réglé directement toutes les factures émises par la société Lambert, sous-traitant qu'ils avaient ainsi agréé tacitement ; que par l'effet de cet agrément tacite, la société Lambert disposait, à l'encontre du maître de l'ouvrage délégué et sans avoir à le mettre en demeure, de la procédure du paiement direct dont elle disposait à l'encontre des maîtres de l'ouvrage, et non de l'action directe soumise à l'exigence d'une mise en demeure préalable de l'entrepreneur principal (violation, par fausse application, de l'article 12 de la loi du 31 décembre 1975 et, par refus d'application, de l'article 6 de cette loi) ;
Mais attendu qu'ayant souverainement relevé, par motifs propres et adoptés, que la CEAI n'avait pas la qualité de mandant de la société TECBA, que ce n'était pas à cette société qu'avait été donné mandat d'achever les travaux, mais à la société ABC gestion remplacée par la société BIMA, et que le contrat conclu entre la société BIMA et la société TECBA était un contrat de louage d'ouvrage, la cour d'appel, qui a procédé à la recherche prétendûment omise sur les relations existant entre les parties, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée sur la propriété du terrain sur lequel la construction devait être réalisée, et devant laquelle il n'était pas soutenu que le sous-traitant pût bénéficier de la procédure de paiement direct ne concernant que les marchés passés par l'Etat ou les collectivités publiques, a retenu à bon droit que la garantie de livraison de l'ouvrage à prix et délai convenus à laquelle s'était engagée la CEAI en application de l'article L. 231-6 du Code de la construction et de l'habitation s'analysait en un cautionnement d'un caractère particulier stipulé en faveur du maitre de l'ouvrage en cas de défaillance du constructeur, et en aucun cas en une garantie de paiement en faveur des sous-traitants ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Ent Lambert aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Ent Lambert à payer aux époux X... et à la Compagnie européenne d'assurances industrielles, chacun, la somme de 1 900 euros ; rejette la demande de la société Lambert ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille trois.