AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 14 novembre 2000), rendu en matière de référé, que la société civile immobilière ... (la SCI), maître de l'ouvrage, et la société SMCI Développement (la SMCI), maître de l'ouvrage délégué, ont, par marché forfaitaire du 1er juillet 1999, chargé la Société marbres et décors internationaux (société SMDI), depuis lors en liquidation judiciaire, des travaux du lot gros oeuvre-pompage" dans la construction d'un groupe d'immeubles ; qu'un différend s'étant élevé entre les parties, la société SMCI a notifié la résiliation de son marché notamment pour retards à la société SMDI, qui a assigné la SCI et la SMCI en règlement d'une provision à valoir sur le solde de son marché et demandé la fourniture, sous astreinte, de la garantie de paiement instituée par l'article 1799-1 du Code civil ;
Attendu que la SCI et la société SMCI font grief à l'arrêt de les condamner in solidum à fournir cette garantie, alors, selon le moyen, que sauf disposition contraire expresse, un décret n'est pas applicable aux contrats en cours conclus avant son entrée en vigueur ; qu'en condamnant la SCI ... à fournir une garantie de paiement en application des dispositions du décret n° 99-658 du 30 juillet 1999, lequel décret est entré en vigueur le 31 juillet 1999, date de sa parution au journal officiel, soit postérieurement à la signature du contrat d'entreprise, la cour d'appel a violé le texte susvisé, ensemble l'article 2 du Code civil ;
Mais attendu, alors que la loi nouvelle régit immédiatement les effets des situations juridiques nées avant son entrée en vigueur et non définitivement réalisées, qu'ayant relevé que la loi n° 94-475 du 10 juin 1994 et son décret d'application n° 99-658 du 30 juillet 1999 ont ajouté un article 1799-1 au Code civil aux termes duquel le maître de l'ouvrage qui conclut un marché de travaux privé doit garantir à l'entrepreneur le paiement des sommes dues lorsque celles-ci dépassent un certain seuil et constaté que le marché signé le 1er juillet 1999 stipulait un délai de réalisation de six mois à compter du 15 septembre 1999, la cour d'appel a exactement retenu que la SCI et la SMCI devaient fournir la garantie de paiement instituée par ces textes, laquelle trouve son fondement dans la volonté du législateur et non dans le contrat conclu entre les parties duquel il n'est résulté aucun droit acquis ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal :
Vu l'article 809, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que, dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier ;
Attendu que, pour rejeter la demande de provision sur le solde du marché, l'arrêt retient qu'il existe des contestations sérieuses sur les retards qui ont donné lieu à l'application de pénalités et que le juge des référés est incompétent pour en connaître ;
Qu'en statuant ainsi, sans que le solde du marché soit sérieusement contesté, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il constate que la demande de provision de la société SMCI se heurte à l'existence de contestations sérieuses, l'arrêt rendu le 14 novembre 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;
Condamne la société SMCI Développement et la société civile immobilière (SCI) ... aux dépens des pourvois ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne, ensemble, la SCI ... et la SMCI Développement à payer la somme de 1 900 euros à M. X... , ès qualités ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la SCI ... et de la SMCI Développement ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six mars deux mille trois.