AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que, suite aux retentissements médiatiques de la relation extra-conjugale entretenue en août 1996 par le mari de X...
Y..., ..., avec une "strip-teaseuse", l'hebdomadaire Paris match daté du 12 septembre 1996 a annoncé en couverture puis publié sur plusieurs pages un article essentiellement consacré aux réactions et sentiments supposés de l'épouse, et illustré de onze photographies ; que celle-ci a assigné la société éditrice Cogedipresse en dommages-intérêts pour atteintes à ses droits sur sa vie privée et sur son image, et en publication de la condamnation dans un prochain numéro du magazine ;
Sur le premier moyen, pris en ses cinq branches, tel qu'énoncé au mémoire en demande et reproduit en annexe :
Attendu que, pour retenir l'atteinte à la vie privée, la cour d'appel (Versailles, 2 novembre 2000) a relevé que, si l'incartade de l'époux avait constitué un événement d'actualité dont l'hebdomadaire pouvait légitimement rendre compte, les titres de couverture "X... humiliée ... rupture ou pardon, la princesse meurtrie hésite encore", et, à l'intérieur, "X..., après l'affront, l'explication" constituaient une extrapolation non nécessaire à l'information des lecteurs et un détournement de l'objectif d'information ; qu'elle a, par là même, justifié l'équilibre qu'elle expose avoir recherché, à travers les sanctions prononcées, entre la liberté de l'information et le droit de chacun au respect de sa vie privée et familiale; que par ailleurs, l'atteinte à ce dernier principe est indépendante du mode compassionnel, bienveillant ou désobligeant sur lequel elle est opérée ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Et sur le second moyen, pris en ses deux branches, pareillement énoncé et reproduit :
Attendu que pour retenir l'atteinte à l'image, la cour d'appel, après avoir souverainement estimé qu'une participation volontaire de la plaignante aux photographies n'était pas établie, a relevé que plusieurs avaient été prises au téléobjectif, les unes dans un club privé en compagnie de son époux et témoignant du désarroi et des émotions les plus intimes qu'elle éprouvait, les autres dans un jardin privé où elle se trouvait en compagnie de son frère et assorties du commentaire "le jour du scandale, Z... est là et console sa soeur" ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision, appréciant souverainement les modalités propres à assurer la réparation intégrale de la violation constatée ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Cogedipresse aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Cogedipresse à payer à Mme Y... la somme de 3 000 euros ; rejette la demande de la société Cogedipresse ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois avril deux mille trois.