AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 9 octobre 2001) que le juge-commissaire à la liquidation judiciaire de la société civile immobilière des Domaines de la Crète (la SCI) a, par ordonnance du 30 novembre 1998, ordonné la vente à M. X... de l'actif immobilier de la SCI ; que le notaire chargé de la rédaction de l'acte en a avisé la société d'aménagement foncier et d'établissement rural d'Auvergne (la SAFER) qui lui a notifié par lettre du 18 février 1999 sa décision de préempter ; que M. X... a assigné la SAFER pour faire dire qu'elle ne pouvait exercer en l'espèce son droit de préemption ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande, alors, selon le moyen :
1 / que ne peuvent faire l'objet d'un droit de préemption exercé par une société d'aménagement foncier et d'établissement rural, ni les biens compris dans un plan de cession arrêté en application des articles L. 621-83 et suivants du Code de commerce, ni les biens compris dans une unité de production cédée en application de l'article L. 622-17 du même code, s'agissant, dans les deux cas, d'une cession portant sur un même ensemble d'éléments d'exploitation et dont les finalités, consistant à assurer l'intégrité de cet ensemble économique et à préserver l'emploi, tout en permettant le paiement des créanciers, seraient contrariées par l'exercice d'un droit de préemption qui méconnaîtrait, par ailleurs, l'autorité de la chose jugée qui s'attache à la décision de cession d'unités de production confiée, par une loi d'ordre public, au seul juge-commissaire, et au choix opéré par ce dernier, afin d'assurer dans les meilleures conditions le respect des objectifs visés par cette loi, entre les offres d'acquisition présentées ; que la SAFER d'Auvergne, dont la proposition d'acquisition n'a pas été retenue par le juge-commissaire qui a constaté que l'offre de M. X... était la plus sérieuse et permettait, dans les meilleures conditions, d'assurer durablement l'emploi et le paiement des créanciers, ne pouvait en l'espèce prétendre exercer un droit de préemption sur les unités de production cédées ; qu'en affirmant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 143-4,7 du Code rural, ensemble l'article L. 622-17 du Code de commerce ;
2 / qu'en cas d'adjudication, les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural disposent d'un délai d'un mois à compter de l'adjudication pour exercer leur droit de préemption ; que la cession globale d'unités de production ordonnée sur le fondement de l'article L. 622-17 du Code de commerce, emportant attribution de ces unités au meilleur offrant, à l'issue d'une procédure de présentation des offres sous enveloppes fermées, ne peut être assimilée à une vente de droit commun librement contractée entre les parties, mais constitue, à cet égard, une vente sur adjudication ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué que la SAFER a prétendu exercer son droit de préemption plus d'un mois après que la cession a été ordonnée ; qu'en estimant que cette cession constituait une vente de gré à gré et que la SAFER n'était pas tenue de respecter le délai d'un mois imposé par les dispositions de l'article L. 143-11 du Code rural pour l'exercice de son droit, la cour d'appel a violé ces dispositions, ensemble celles de l'article L. 622-17 du Code de commerce ;
Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel a retenu que l'exclusion du droit de préemption de la SAFER par l'article L. 143-4, 7 qui vise "les biens compris dans un plan de cession totale ou partielle d'une entreprise arrêté conformément aux articles 81 et suivants de la loi", constitue une exception visant une situation particulière qui ne peut être étendue à une situation différente qui a d'ailleurs un tout autre objet, la liquidation de l'entreprise et non sa poursuite d'activité ;
Attendu, d'autre part, que la cour d'appel a exactement relevé que la cession d'unité de production ne constituait pas une vente par adjudication, le juge-commissaire choissant l'offre la plus sérieuse d'acquisition ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne M. X... à payer à la SAFER d'Auvergne la somme de 1 900 euros et à M. Raynaud, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SCI des Domaines de la Crète, la somme de 1 900 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente avril deux mille trois.