AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 145-1 I. du Code de commerce ;
Attendu que les dispositions du chapitre V du titre IV du Livre premier du Code de commerce s'appliquent aux baux des immeubles ou locaux dans lesquels un fonds est exploité, que ce fonds appartienne, soit à un commerçant ou à un industriel immatriculé au registre du commerce et des sociétés, soit à un chef d'une entreprise immatriculée au répertoire des métiers, accomplissant ou non des actes de commerce ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 2 juillet 2002), que la société civile immobilière (SCI) Intendance Dijeaux, propriétaire de locaux à usage commercial donnés à bail à la société SEAVT, a délivré à sa locataire le 26 octobre 1999 un congé avec refus de renouvellement et offre d'une indemnité d'éviction ; que la société SEAVT ayant par la suite apporté sa branche complète d'activité d'agences de voyages à la société CSVT, la SCI Intendance Dijeaux a, par acte du 14 février 2000, dénié à cette dernière société son droit au renouvellement du bail pour défaut d'immatriculation au registre du commerce et l'a assignée le 29 février 2000 afin qu'elle soit déclarée déchue de tout titre et droit d'occupation ; que l'immatriculation de la société CSVT est intervenue le 6 mars 2000 ;
Attendu que pour dire le statut des baux commerciaux inapplicable à la société CSVT, l'arrêt retient que les conditions d'application du statut des baux commerciaux, et en particulier l'immatriculation au registre du commerce, doivent être remplies à la date de la délivrance du congé et pendant toute la procédure aboutissant à la fixation de l'indemnité d'éviction et que si la société SEAVT était bien immatriculée le 26 octobre 1999, date du congé délivré par le bailleur, cette société a apporté à la société CSVT l'ensemble de sa branche d'activités comprenant le fonds de commerce exploité dans les locaux et qu'ainsi, à compter du 1er janvier 2000, celle-ci était propriétaire de ce fonds et se devait de respecter ses obligations légales ; que l'immatriculation de la société CSVT n'étant intervenue que le 6 mars 2000, soit après que le bailleur, le 14 février 2000, ait dénié tout droit à indemnité d'éviction, cette immatriculation est inopérante car sans effet rétroactif ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté qu'à la date du congé délivré par le bailleur, la société locataire en place était régulièrement immatriculée au registre du commerce et des sociétés et que, à la date d'effet du congé, la nouvelle locataire, société cessionnaire, était elle-même personnellement immatriculée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 juillet 2002, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers ;
Condamne la SCI Intendance Dijeaux aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la SCI Intendance Dijeaux à payer à la Compagnie de services de voyage et de tourisme la somme de 1 900 euros ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la SCI Intendance Dijeaux ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit janvier deux mille quatre.