COUR DE CASSATION 02 CRD 001 Audience publique du 19 Décembre 2003 Prononcé au 6 février 2004 R E P U B L I Q U E F R A N C A I S E A U N O M D U P E U P L E F R A N C A I S La Commission Nationale de réparation des détentions instituée par l'article 149-3 du Code de procédure pénale, a rendu la décision suivante :
Statuant sur les recours formés par :
- M. Erik Z... - L'agent judiciaire du Trésor contre la décision du premier président de la cour d'appel de VERSAILLES, en date du 14 décembre 2001, qui a alloué à M. Erik Z... une indemnité de 45 764,45 euros sur le fondement de l'article 149 du Code précité, outre 1524,49 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; Les débats ayant eu lieu en audience publique le 19 décembre 2003, l'avocat du demandeur ne s'y étant pas opposé ; Vu les dossiers de la procédure de réparation et de la procédure pénale ; Vu les conclusions de Maître Gorguet, avocat de M. Erik Z... ; Vu les conclusions de l'agent judiciaire du Trésor ; Vu les conclusions de M. le procureur général près la Cour de cassation ; Vu la notification de la date de l'audience, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, au demandeur et à l'agent judiciaire du Trésor, un mois avant l'audience ; Sur le rapport de M. le conseiller Bizot, les observations de Maître Gorguet, avocat de M. Erik Z..., et de Maître Couturier-Heller, avocat de l'agent judiciaire du Trésor, les conclusions de M. l'avocat général Finielz ; Après en avoir délibéré conformément à la loi, la décision étant rendue en audience publique ; LA COMMISSION :
Attendu que par décision du 14 décembre 2001, le premier président de la cour d'appel de Versailles a alloué à M. Erik Z..., les sommes de 50 000 francs pour son préjudice moral, 126 418,95 francs pour le préjudice financier résultant des frais et honoraires engagés, et 123 757 francs pour son préjudice économique, en raison d'une détention provisoire effectuée du 16 janvier 1998 au 23 avril suivant, soit pendant 3 mois et 8 jours ; Attendu que M. Erik Z... et l'agent judiciaire du Trésor Public ont formé des recours contre cette décision, tendant , le premier à l'augmentation des sommes réparant son préjudice, le second, à la réduction des sommes accordées au titre du préjudice moral et des frais et dépens exposés ; Attendu que par décision du 21 Novembre 2002, la Commission nationale de réparation des détentions, après avoir confirmé les indemnités dues au titre du préjudice matériel, a sursis à statuer sur les pertes de salaires postérieures à la remise en liberté de M. Z... ainsi que sur son préjudice moral et ordonné une expertise médicale aux fins de vérifier la réalité des troubles psychologiques soufferts par l'intéressé et leur relation causale avec la détention ; Attendu que le rapport d'expertise du docteur Y... a été déposé le 12 Septembre 2003 et a été régulièrement communiqué aux parties et
au procureur général près la Cour de cassation ; Attendu que M. Z... soutient par conclusions du 15 Octobre 2003 que l'expertise établit le lien de causalité entre son état psychologique et la détention; qu'il sollicite, au titre du retentissement professionnel de sa détention une somme de 264.368,46 euros représentant ses pertes de salaires pour la période du 28 avril 1998 au 1er Septembre 2000, une somme de 134.128,45 euros à titre de dommages et intérêts pour la perte de sa situation professionnelle ,une somme de 76.224,51 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral et psychologique, outre la somme de 22.479,88 frs en application de l'article 700 du Nouveau code procédure civile ; Attendu que par conclusions du 16 octobre 2003, l'agent Judiciaire du Trésor fait valoir que l'expert n'a pas rempli sa mission consistant à déterminer en quoi la détention provisoire de trois mois avait pu participer au troubles psychologique de M. Z..., que ce dernier ne rapporte donc pas la preuve du dommage indemnisable au titre de cette détention et qu'il convient donc de rejeter son recours au titre des pertes de salaires postérieures à la détention et de réduire l'indemnisation au titre du préjudice moral et psychologique ; Attendu que par conclusions en réplique du 23 Octobre 2003, M. Z... fait valoir que l'expert a exactement rempli sa mission et que l'agent Judiciaire du trésor ne conteste pas la réalité et les montants des préjudices invoqués ; qu'il sollicite, le cas échéant, une expertise complémentaire ; Vu les articles 149 et 150 du code de procédure pénale ; Attendu qu'une indemnité est accordée à sa demande à la personne ayant fait l'objet d'une détention provisoire au cours d'une procédure terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive, que cette indemnité répare intégralement le préjudice personnel, moral ou matériel causé par la privation de liberté ; Sur le lien de causalité du dommage moral et psychologique avec la détention:
Attendu qu'à l'examen des constatations et conclusions du rapport d'expertise auquel s'est soumis l'intéressé, il est nécessaire de faire préciser par l'expert les causes de la dégradation de l'état de santé de M. Z... ; PAR CES MOTIFS Vu la décision du 21 Novembre 2002 ; Vu le rapport du docteur Michel Y... du 15 Juillet 2003 ; Vu les articles 149 et 156 et suivants du code de procédure pénale ; Ordonne une expertise complémentaire. Désigne pour y procéder le docteur Michel Y... expert près la cour de cassation, ..., avec la mission :
- de prendre connaissance des pièces fournies par M. Erik Z..., - d'entendre à nouveau le requérant, - de procéder si nécessaire à son examen clinique et décrire les constatations effectuées, - de rechercher et évaluer dans la mesure du possible quelle est, dans la dégradation de son état de santé, dans la durée de son incapacité temporaire de travail jusqu'au 1er
septembre 2000 et dans l'importance de l'incapacité permanente partielle retenue, la part liée à l'incarcération de M. Z... et celle qui résulte de l'accusation portée contre lui, de la durée de la procédure d'instruction et de sa condamnation par le tribunal correctionnel jusqu'à sa relaxe définitive par la cour d'appel ; Autorise l'expert à s'adjoindre tout sapiteur qu'il jugerait utile de consulter; Dit que l'expert pourra procéder à toutes auditions jugées utiles à l'accomplissement de sa mission. Fixe à trois mois le délai dans lequel l'expert déposera son rapport au secrétariat de la Commission. Désigne M. le Conseiller Bizot pour mettre en oeuvre l'expertise, en contrCB$gt;ler l'exécution, statuer, le cas échéant sur toute difficulté et procéder à toutes auditions et investigations qui pourraient s'avérer nécessaires. Ainsi fait, jugé et prononcé en audience publique par la Commission Nationale de réparation des détentions, le 6 février 2004, où étaient présents :
M. Canivet, président, M. X..., conseiller-rapporteur, Mme A..., M. Finielz, avocat général, Mme Grosjean, greffier. En foi de quoi la présente décision a été signée par le président, le rapporteur et le greffier. Le rapporteur Le président Le greffier