AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que la société Suburbaine de canalisations et de grands travaux (SCGT) a effectué les travaux de création d'un lotissement ostréicole et confié en sous traitance, la réalisation du réseau de pompage pour l'alimentation en eau de mer de chacun des lots, à la société Armor pompes à laquelle le système a été fourni par la société Dresser pompes ; que le bureau Socotec a été chargé d'une mission d'études et de contrôle ; qu'en 1992 un sinistre est survenu, pris en charge par la compagnie Unat, assureur de la société Armor pompes ;
que cette dernière a été mise en liquidation judiciaire en octobre 1992 ;
qu'en 1993 de nouveaux désordres sont apparus nécessitant l'intervention de la société Dresser pompes fournisseur des pompes ;
qu'après réception des ouvrages faite sans réserves le 23 juin 1993, de nouveaux désordres se manifestant, la société Dresser pompes a préconisé de nouveaux travaux que la SCGT s'est engagée à réaliser à ses frais ; qu'à la suite de nouvelles pannes, une expertise a été réalisée aux termes de laquelle ont été incriminés le choix par la société Armor pompes d'un système de régulation inadéquat et l'attitude trop tolérante de la Socotec ; que la SCGT a assigné le liquidateur de la société Armor pompes, la compagnie Unat et la Socotec en paiement d'une certaine somme au titre des frais avancés et des préjudices subis ; que l'arrêt attaqué a déclaré la société Armor pompes et la Socotec responsables de la défectuosité de l'installation, a rejeté les demandes de dommages-intérêts formées par la SCGT et, décidant que la compagnie d'assurance AIG Europe ne devait pas sa garantie, l'a mise hors de cause et a condamné la Socotec à payer à la SCGT la seule somme de 75 404 francs ;
Sur le premier moyen pris en ses deux branches et sur le second moyen pris en ses deuxième et troisième branches, tels qu'énoncés au mémoire en demande et reproduits en annexe :
Attendu, d'abord, qu'aux termes de l'article 1er du chapitre II des conventions spéciales, l'assureur s'engageait à garantir les risques pécuniaires de la responsabilité civile pouvant incomber à l'assuré en vertu de la législation en vigueur et de la jurisprudence, en raison des dommages corporels, matériels et immatériels consécutifs causés aux tiers y compris les clients, par les produits qu'il avait livrés dans le cadre de son activité déclarée aux conditions particulières et ayant pour origine un vice propre du produit ou une erreur de conception, de préparation, de fabrication, de transformation de réparation, de stockage, de livraison, d'installation ou d'instruction d'emploi ; qu'ainsi la responsabilité délictuelle et quasi-délictuelle du fait des produits livrés était seule visée, la clause d'exclusion litigieuse ne visant que les dommages liés à une mauvaise exécution de sa prestation par l'assuré ; que, dès lors, la clause d'exclusion étant précise et limitée, c'est sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel en a fait application ; qu'ensuite, la cour d'appel s'est prononcée, d'une part, sur le préjudice résultant des frais induits par les manquements des sociétés Armor pompes et Socotec dont elle a estimé qu'il entrait dans les cas d'exclusion de l'article 2-1 du chapitre II de la police, et, d'autre part des autres préjudices invoqués par la SCGT dont elle a souverainement estimé que la preuve n'était pas rapportée ; qu'enfin, la cour d'appel, saisie par la SCGT d'une action directe contre l'assureur AIG Europ de la société Armor pompes, ayant jugé que cet assureur ne devait pas sa garantie et l'ayant mis hors de cause, seule la Socotec pouvant faire l'objet d'une condamnation, n'avait pas à se prononcer sur une éventuelle condamnation in solidum entre la Socotec et la société Armor pompes
uniquement appelée en la cause pour les besoins de l'action directe ; que le premier moyen, non fondé en sa première branche laquelle est recevable, ne peut être accueilli en sa seconde branche, et que le second moyen, qui ne tend, en sa troisième branche, qu'à mettre en discussion une constatation souveraine des juges du fond, n'est pas fondé en sa deuxième ;
Mais sur le second moyen pris en sa première branche :
Vu l'article l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que pour condamner la société Socotec, seule, à payer à la société SCGT une somme de 75 404 francs et d'avoir limité la réparation à cette somme, l'arrêt retient que l'expert considérait que la SCGT pouvait prétendre à la somme globale de 437 288 francs, que toutefois cette somme incluait à tort le coût des travaux préconisés par Ledu Industrie pour 219 600 francs dans la mesure où il n'était pas justifié d'un acquit de cette facture par la SCGT ; qu'en statuant ainsi alors que l'existence et le montant du préjudice réparé par cette somme n'étaient pas contestés, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la Socotec à payer la somme de 75 404 francs à la société SCGT, l'arrêt rendu le 24 novembre 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre février deux mille quatre.