AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 juin 2001), que la Société nouvelles résidences (la société SNR), propriétaire d'un immeuble à usage collectif, a assigné plusieurs locataires en paiement de sommes correspondant pour les années 1997 et 1998, à des charges impayées relatives à l'entretien ménager et au service des ordures ménagères, au coût de la ligne téléphonique installée dans l'ascenceur et aux frais de fonctionnement des rôles et de dégrèvement des taxes ; que, reconventionnellement, les preneurs ont réclamé la délivrance de quittances ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société SNR fait grief à l'arrêt de juger que la marge bénéficiaire de l'entreprise assurant l'entretien et le nettoyage de l'immeuble, ainsi que la TVA ne sont pas des charges récupérables et qu'en conséquence, elle doit établir pour le compte de locataires la répartition entre les charges récupérables et les charges non récupérables afférentes au contrat d'entretien au titre des années 1997 et 1998, alors, selon le moyen, que constituent des charges récupérables sur les locataires, les frais de personnel pour l'entretien et le nettoyage des parties communes ainsi que les dépenses de produits d'entretien, que dès lors est récupérable en totalité le prix payé par le bailleur à une société de nettoyage en contrepartie des prestations de nettoyage des parties communes de l'immeuble et d'enlèvement des ordures ménagères fournies par cette dernière et qui intègrent indistinctement la mise à disposition de personnel, la fourniture d'un savoir faire et des produits d'entretien ; qu'en décidant dès lors que la marge bénéficiaire de l'entreprise de nettoyage, ainsi que la TVA facturée au bailleur ne constituaient pas des charges récupérables, la cour d'appel a violé le décret n° 87-713 du 26 août 1987 :
Mais attendu qu'ayant relevé qu'il résultait des dispositions de l'article 2 du décret du 26 août 1987 que lorsqu'il existe un contrat d'entreprise, l'intégralité des dépenses d'entretien n'est pas récupérable et qu'il importe peu que les charges afférentes à l'entretien comprennent également des dépenses relatives aux produits d'entretien qui sont prévues distinctement au poste "entretien de propreté", qui ne vise que les frais de personnel, la cour d'appel en a déduit, à bon droit, que les charges récupérables ne devraient inclure ni la marge bénéficiaire de l'entreprise, ni la TVA ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé de ce chef ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que la société SNR fait grief à l'arrêt de dire que les dépenses de téléalarme de l'ascenseur ne sont pas récupérables et, en conséquence de la débouter de sa demande tendant au remboursement de ces frais, alors, selon le moyen, que les charges récupérables sont celles exposées en contrepartie des services rendus liés à l'usage des différents éléments de la chose louée ; que les charges d'exploitation des ascenseurs figurent parmi les charges récupérables énumérées en annexe du décret du 26 août 1987 ainsi que les abonnements des postes de téléphone à la disposition des locataires ; qu'en décidant, dès lors, que ne constituait pas une charge récupérable le montant des factures émises par France Télécom correspondant à l'abonnement à la ligne de téléalarme de l'ascenseur mise à disposition des locataires pour permettre une intervention immédiate en cas de panne, la cour d'appel a violé les articles 23 de la loi du 6 juillet 1989 et le décret n° 87-713 du 26 août 1987 ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la ligne de téléalarme de l'ascenseur constitue un système de sécurité destiné à relier la cabine à une centrale de veille en cas de panne, que le bailleur a l'obligation d'assurer la sécurité et plus généralement la jouissance paisible des équipements mis à la disposition des locataires, et que les dépenses relatives à cet élément d'équipement ne figurent pas dans la liste limitative du décret du 26 août 1987, la cour d'appel a exactement retenu que ces dépenses devraient être exclues des charges récupérables ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé de ce chef ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que la société SNR fait grief à l'arrêt de juger que les frais de confection des rôles et de dégrèvement des taxes ne sont pas des charges récupérables et, en conséquence, de la débouter de sa demande tendant au remboursement de ces frais, alors, selon le moyen, que les frais de confection des rôles pour la mise en recouvrement de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères et les frais de dégrèvement de cette même taxe constituent un accessoire de celle-ci récupérable au même titre ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé le décret n° 87-713 du 26 août 1987 ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la liste des charges récupérables, limitative, comprend la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, à laquelle correspond un service bénéficiant aux locataires mais ne vise pas les frais de confection des rôles et que ces frais, qui sont des charges de gestion pour le bailleur, sont déductibles du revenu foncier, la cour d'appel a exactement retenu que les frais de confection des rôles des taxes sur la redevance d'ordures ménagères étaient exclus des charges récupérables ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé de ce chef ;
Sur le quatrième moyen :
Attendu que la société SNR fait grief à l'arrêt de la condamner à délivrer aux locataires qui en font la demande, un document intitulé "quittance", alors, selon le moyen, que l'avis déchéance mentionnant qu'il "tient lieu de quittance pour les mois précédents s'il ne reste dû aucune somme dans la rubrique solde de l'extrait de compte" constitue une quittance, qui, par référence aux avis déchéance précédents, comporte le détail du loyer et des charges dont le bailleur reconnaît au locataire l'acquittement ; qu'en décidant qu'à défaut d'être intitulé "quittance", ce document ne satisfaisait pas aux exigences de l'article 21 de la loi du 6 juillet 1989, la cour d'appel a violé l'article 21 de la loi du 6 juillet 1989 par fausse application ;
Mais attendu qu'ayant constaté que les "avis d'échéance" que la société SNR adressait aux locataires, n'étaient pas délivrés sous l'intitulé de "quittance" et ne portaient pas le détail de sommes acquittées, la cour d'appel a retenu, à bon droit, que ces documents ne satisfaisaient pas aux exigences de l'article 21 de la loi du 6 juillet 1989 ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé de ce chef ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la Société nouvelles résidences aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la Société nouvelles résidences SNR, la condamne à payer à Mme X..., à M. Y..., à Mme Z..., à M. et Mme A..., aux consorts B..., à M. C..., à Mme Van D..., à Mme E... à M. F... et Mme G... la somme, globale, de 1 900 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mars deux mille quatre.