AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la société Azur assurances de ce qu'elle se désiste de son pourvoi en tant que dirigé contre le syndicat des copropriétaires du 11, Place Saint-Croix à Angers ;
Sur la demande de mise hors de cause ;
Dit n'y avoir lieu de mettre hors de cause la compagnie Axa France, Mmes X... et Y..., MM. Z..., A... et B... ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal et sur le moyen unique du pourvoi incident, réunis :
Vu les articles 433 et 1384, alinéa 1er, du Code civil ;
Attendu, selon ces textes, qu'un département à qui la tutelle d'un mineur, demeurée vacante, a été déférée par décision d'un juge des tutelles, et qui est dès lors investi de la charge d'organiser, de contrôler et de diriger à titre permanent le mode de vie de ce mineur, demeure responsable de plein droit du fait dommageable commis par celui-ci, dès lors qu'aucune décision judiciaire n'a suspendu ou interrompu cette mission éducative ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la mineure Urbis C..., confiée à la tutelle du département de Maine-et-Loire par une décision du juge des tutelles du 24 juillet 1989 et placée par la Direction des interventions sociales et de solidarité (DISS) de cette collectivité territoriale dans un foyer d'accueil géré par l'association Ambray Tournemine (l'association), a, au cours d'une fugue, provoqué volontairement un incendie dans un immeuble en copropriété, y causant d'importants dommages ; qu'un jugement a déclaré cette mineure pénalement responsable ; que le syndicat des copropriétaires et plusieurs copropriétaires, Mme D..., M. Z..., Mme Y..., M. A... et M. B..., ainsi que leur assureur commun, la compagnie Axa Assurances, devenue Axa France, ont assigné en réparation l'association et son assureur, la compagnie Azur assurances ;
Attendu que pour déclarer l'association responsable des conséquences dommageables de l'incendie et la condamner solidairement avec la compagnie Azur assurances à payer diverses indemnités aux copropriétaires et à leur assureur, l'arrêt confirmatif énonce que la responsabilité au sens de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil n'était pas fondée sur l'autorité parentale mais sur la garde et que celle-ci se caractérise par la charge d'organiser, de diriger et de contrôler la vie du mineur ; que le fait que la DISS soit tutrice d'Urbis C... et qu'aucune décision de justice n'ait confié l'enfant au Foyer Tournemine est par conséquent sans incidence ; que l'association ne conteste pas avoir hébergé la mineure à la suite d'une décision administrative du 25 octobre 1991 et l'avoir prise en charge dans la mesure de ses responsabilités ; que le foyer Tournemine avait une structure qui, si elle n'était pas adaptée à un long séjour de l'enfant, était de nature à répondre à la situation d'urgence ; qu'encore qu'elle soutienne que la présence de l'enfant lui a été imposée, il apparaît que l'association n'a pas refusé celle-ci et n'a pas entrepris de démarches pour l'exclure ; qu'ayant reçu l'enfant, elle l'a logée, nourrie, entourée des conseils de ses éducateurs, a surveillé ses allées et venues et signalé ses fugues ; qu'il apparaît dans ces conditions que l'association a effectivement organisé, dirigé et contrôlé le mode de vie de la mineure et que la garde en avait été transférée à son profit à la suite de la décision de la DISS ; que les fugues multiples qui ont émaillé ce placement, bien qu'elles aient nui à la permanence du contrôle de l'association, ne sont pas de nature à lui ôter son pouvoir et à influer sur l'étendue de sa responsabilité ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses propres constatations, d'une part, que la DISS, service non personnalisé du département de Maine-et-Loire désigné en qualité de tuteur d'Urbis C... par décision d'un juge des tutelles, était chargée à ce titre d'organiser, de diriger et de contrôler à titre permanent son mode de vie, et qu'au moment de l'incendie volontaire provoqué par cette mineure en fugue, aucune décision judiciaire n'avait suspendu ou interrompu cette mission éducative, d'autre part, que ce service, ayant conservé cette charge, s'en était acquitté par un placement provisoire en foyer d'accueil dans des conditions qu'il avait déterminées et qu'il contrôlait, ce dont il résultait que le département de Maine-et-Loire était de plein droit responsable du fait dommageable imputable à la mineure, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et attendu qu'en application de l'article 629 du nouveau Code de procédure civile, les dépens seront laissés en totalité à la charge de Mmes X... et Y..., MM. Z..., A..., B... et la société Axa France ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen du pourvoi principal :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a déclaré nulles les assignations des 17 et 20 février 2000 délivrées à la seule initiative de la copropriété du 11, Place Sainte-Croix, dit que cette nullité n'affecte pas les actes délivrés par les autres demandeurs personnes physiques, déclaré le syndicat des copropriétaires recevable en son intervention volontaire et rejeté la demande de ce syndicat, l'arrêt rendu le 19 mars 2003, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes ;
Vu l'article 629 du nouveau Code de procédure civile, condamne Mmes X... et Y..., MM. Z..., A..., B..., la société Axa France aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes de Mmes X... et Y..., de MM. Z..., A..., B... et de la compagnie Axa France, d'une part, de l'association Ambray Tournemine, d'autre part ; condamne, in solidum, Mmes X... et Y..., MM. Z..., A..., B... et la société Axa France à payer à la société Azur assurances la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept octobre deux mille quatre.