AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que le 10 juin 1999, la société Beryl immobilier a consenti à M. X..., gérant de la société GG et G, une promesse de vente d'un immeuble moyennant le prix de 13 500 000 francs par acte notarié dressé par M. Y..., notaire associé de la société civile professionnelle Y..., Gilles, Ceyrac, de Buhren, Montes, Bigot (la SCP), devenue SCP Gilles, Ceyrac, de Buhren, Montes, Bigot ; que l'acte de vente a été signé sous le ministère du même notaire, le 12 juillet 1999 par la société Beryl immobilier et la société Alrix, entre-temps substituée à la société GG et G ; que, dans l'intervalle, par lettre du 8 juillet 1999, le notaire a informé M. X... que, compte tenu de la qualité de marchand de biens de la société Beryl immobilier, lors de l'acquisition intervenue le 7 mars 1996 et du délai de quatre ans dans lequel le bien cédé devait être revendu, la revente à une autre société marchand de biens imposait à cette dernière de revendre elle-même le bien dans les quatre ans de l'achat ; que le notaire indiquait que l'acquisition ne pouvait donc se faire sous le régime fiscal attribué aux marchands de biens mais sous celui de droit commun et qu'ainsi les droits de mutation s'élèveraient à la somme de 853 387 francs au lieu de celle de 94 500 francs initialement prévue ;
que, compte tenu de l'erreur ainsi commise, le notaire déclarait renoncer à ses honoraires ; que la société GG et G a assigné la SCP notariale en paiement d'une somme de 853 387 francs à titre de dommages-intérêts ;
que la société Alrix est intervenue volontairement aux fins d'obtenir le paiement de la même somme ; que l'arrêt attaqué (Paris, 22 janvier 2002) a rejeté les demandes des deux sociétés GG et G et Alrix ;
Sur le premier moyen pris en ses trois branches, tel qu'énoncé au mémoire en demande et reproduit en annexe :
Attendu que l'arrêt, qui relève que la promesse unilatérale de vente consentie par la société Beryl immobilier à la société GG et G emportait obligation pour la société bénéficiaire de payer une indemnité d'immobilisation d'un montant de 1 400 000 francs en cas de non-réalisation de la vente, de sorte que le conseil devait être nécessairement prodigué avant la souscription de la promesse pour mettre le bénéficiaire en mesure d'effectuer un choix éclairé sans qu'il soit contraint de contracter en raison d'une indemnité d'immobilisation supérieure au montant des taxes fiscales dues, retient exactement que ce conseil ne pouvait être dû, lors de la signature de la promesse le 10 juin 1999, qu'au bénéficiaire identifié de la promesse à savoir la société GG et G, un tel conseil n'étant pas dû à la société Alrix qu'elle s'est substituée ; que le dommage ayant été réalisé à la date de la promesse de vente, aucun conseil postérieur du notaire ne pouvait permettre d'en éviter la réalisation, la société Alrix ayant accepté la substitution et signé l'acte de vente définitif en connaissance des incidences fiscales du manquement du notaire lors de la signature de la promesse ; que l'arrêt relève encore que la création de la société Alrix dans l'unique but de se substituer à la société GG et G dans le bénéfice de la promesse unilatérale de vente n'emportait pas cession à celle-ci de la créance de dommages intérêts dont elle aurait pu se prévaloir à l'encontre du notaire en raison de la faute commise par ce dernier à son égard, de sorte qu'aucun lien causal n'était établi entre le manquement du notaire et le dommage invoqué par la société Alrix ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur les deuxième et troisième moyens, pris en leurs diverses branches, tels qu'énoncés au mémoire en demande et reproduits en annexe :
Attendu que, l'arrêt qui, sans dénaturer le jugement entrepris, n'a pas méconnu l'effet dévolutif de l'appel, retient souverainement, d'une part, que la société Alrix ne démontrait pas le préjudice invoqué par elle de sorte que la société GG et G ne pouvait invoquer un préjudice du chef de celle-ci et, d'autre part, que la société GG et G ne justifiait pas non plus d'un préjudice personnel distinct ;
qu'ainsi, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Arlix et la société GG et G aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette la demande formée par la SCP notariale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six octobre deux mille quatre.