AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que par acte établi par M. X..., notaire associé de la SCP Fay-Nafilyan aux droits de laquelle se présente désormais la SCP Jaquin, la CRCAM de l'Yonne, aux droits de laquelle se présente la CRCAM Bourgogne-Champagne, a consenti à M. Y... un prêt immobilier, garanti par une hypothèque de troisième rang ; qu'en raison de la défaillance de l'emprunteur, le Crédit agricole a engagé une procédure de saisie immobilière ; que par jugement désormais irrévocable, le prêt a été annulé, au motif que l'offre adressée par l'établissement de crédit avait été acceptée par l'emprunteur avant l'expiration du délai prévu à l'article L. 312-10 du Code de la consommation et M. Y..., condamné à restitution du solde du capital emprunté ; que le Crédit agricole a, dans ces conditions, engagé une action en responsabilité contre la SCP Jaquin, reprochant au notaire instrumentaire d'avoir manqué à son obligation d'assurer l'efficacité de l'acte qu'il a établi, comme à son devoir de conseil ;
Attendu que pour débouter la CRCAM de sa demande en réparation du dommage qui résultait, selon elle, de la perte des intérêts contractuels et de l'indemnité d'exigibilité anticipée prévue au contrat, l'arrêt attaqué retient que le paiement de cette partie de la créance n'était garanti, antérieurement à l'annulation du prêt, que par une hypothèque conventionnelle primée par des inscriptions de 1er et de 2e rangs, de sorte que le Crédit agricole n'aurait eu aucune chance sérieuse d'en obtenir le recouvrement ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la CRCAM demandait la réparation, non de la perte d'une simple chance de recouvrement auprès de M. Y..., mais de la perte consommée, du fait de l'annulation du prêt, de gains financiers auxquels elle aurait pu prétendre en exécution du contrat, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige et violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté la CRCAM de sa demande en réparation de dommage au titre de la perte des intérêts contractuels et de l'indemnité conventionnelle d'exigibilité anticipée, l'arrêt rendu le 23 octobre 2002, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;
Condamne la SCP Louis Marc Jacquin aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la SCP Louis Marc Jacquin et le condamne à payer la somme de 2 000 euros à la Caisse agricole de Champagne Bourgogne ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre janvier deux mille cinq.