AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que le tribunal du contentieux de l'incapacité a rejeté la demande de M. X... tendant à la réévaluation de son taux d'incapacité permanente partielle consécutif à un accident du travail survenu le 16 décembre 1998 ; que M. X... fait grief au jugement attaqué d'avoir été rendu par un tribunal présidé par une représentante du directeur régional des affaires sanitaires et sociales dont l'indépendance et l'impartialité n'étaient pas garanties au sens de l'article 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur la recevabilité du moyen contestée en défense :
Attendu que la caisse primaire d'assurance maladie oppose à M. X... qu'il n'est pas recevable à invoquer devant la Cour de Cassation la violation de l'article 6.1 de la Convention européenne, dès lors que, présent devant le Tribunal, il n'a pas tenté de contester la régularité de sa composition avant l'ouverture des débats en application de l'article 430, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'il ne peut être reproché à M. X... de s'être abstenu de soulever l'irrégularité structurelle du tribunal du contentieux de l'incapacité composé selon les dispositions, alors en vigueur, de l'article L.143-2 du Code de la sécurité sociale, alors que, ne pouvant s'adresser à une juridiction autrement composée, il s'exposait à ne pas voir statuer sur sa demande ;
D'où il suit que le moyen est recevable ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Attendu qu'aux termes de ce texte, toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial ;
Attendu qu'il résulte de la décision attaquée que le Tribunal était présidé par un représentant du directeur régional des affaires sanitaires et sociales ; que ce fonctionnaire, soumis à une autorité hiérarchique, a, du fait de ses fonctions administratives, des liens avec la Caisse primaire, partie au litige ; qu'en vertu des dispositions de l'article R.143-4 du Code de la sécurité sociale, il désigne le médecin expert appartenant à cette juridiction ; qu'en application de l'article R.143-11 du même Code, sa voix est prépondérante en cas de partage ; que ces éléments étaient de nature à faire naître, dans l'esprit du justiciable, des doutes légitimes sur l'indépendance et l'impartialité du tribunal ;
D'où il suit que la cause n'a pas été entendue par un tribunal indépendant et impartial au sens de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui a ainsi été violée ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 9 octobre 2001, entre les parties, par le tribunal du contentieux de l'incapacité de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal du contentieux de l'incapacité de Paris, autrement composé ;
Condamne la CPAM du Val-d'Oise aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la CPAm du Val-d'Oise ;
Dit que sur les diligences du Procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille cinq.