La Commission nationale de réparation des détentions instituée par l'article 149-3 du Code de procédure pénale, a rendu la décision suivante :
Statuant sur le recours formé par :
- L'agent judiciaire du Trésor
contre la décision du premier président de la cour d'appel de Paris en date du 22 juin 2004 qui a alloué à M. Eric X... une indemnité de 10.000 euros en réparation de son préjudice moral sur le fondement de l'article 149 du Code précité ;
Les débats ayant eu lieu en audience publique le 7 mars 2005, le demandeur et son avocat ne s'y étant pas opposé ;
Vu les dossiers de la procédure de réparation et de la procédure pénale ;
Vu les conclusions de l'agent judiciaire du Trésor ;
Vu les conclusions de M. Versini-Campinchi, avocat au Barreau de Paris assistant M. X... ;
Vu les conclusions de M. le procureur général près la Cour de Cassation ;
Vu les conclusions en réponse de M. Versini-Campinchi, avocat ;
Vu la notification de la date de l'audience, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, au demandeur, à son avocat, à l'agent judiciaire du Trésor et à son avocat, un mois avant l'audience ;
Sur le rapport de M. le conseiller Gueudet, les observations de Mme Couturier-Heller, avocat représentant l'agent judiciaire du Trésor et de M. Giommoni substituant M. Versini-Campinchi, avocat assistant M. X..., celles de M. X... comparant, les conclusions de M. l'avocat général Finielz, le demandeur ayant eu la parole en dernier ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi, la décision étant rendue en audience publique ;
LA COMMISSION :
Attendu que, par décision du 22 juin 2004, le premier président de la cour d'appel de Paris a alloué à M. X... une somme de 10.000 euros en réparation du préjudice moral qu'il a subi à raison d'une détention provisoire de 7 jours, effectuée du 25 mars 1999 au 31 mars 1999, et a rejeté sa demande de réparation de son préjudice matériel ;
Attendu que l'agent judiciaire du Trésor a régulièrement formé le 2 juillet 2004 un recours contre cette décision pour obtenir une diminution de l'indemnité allouée au requérant ;
Attendu que M. X..., qui n'a pas formé de recours, demande à la Commission de lui allouer les sommes de 30.000 euros en réparation de son préjudice moral, de 106.000 euros en réparation de son préjudice matériel et de 1.500 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que M. X... n'a pas saisi la Commission d'un recours personnel dans le délai prévu par l'article 149-3 du Code de procédure pénale et dans les formes exigées par l'article R.40-4 du même code ; que par suite les demandes qu'il forme dans l'instance introduite par le seul recours de l'agent judiciaire du Trésor sont irrecevables ;
Vu les articles 149 à 150 du Code de procédure pénale ;
Attendu qu'une indemnité est accordée, à sa demande, à la personne ayant fait l'objet d'une détention provisoire terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive ; que, selon l'article 149 précité, l'indemnité est allouée en vue de réparer intégralement le préjudice personnel, matériel et moral causé par la privation de liberté ;
Attendu que pour allouer à M. X... une indemnité de 10.000 euros en réparation de son préjudice moral, le premier président a justement retenu que l'indemnisation du préjudice de la personne détenue était notamment fonction de sa personnalité, de son mode de vie, des périodes de détention déjà effectuées, mais que c'est à tort qu'il a énoncé qu'il convenait de tenir également compte du comportement du requérant au cours de l'instruction et des effets de l'écho donné par la presse écrite aux poursuites lorsqu'il est démontré que l'atteinte à la réputation résulte au moins pour partie du placement en détention et non des seules poursuites exercées contre lui ;
Attendu d'abord que le comportement adopté par la personne mise en examen au cours de l'instruction est, en dehors des cas limitativement énumérés par l'article 122-1 du Code de procédure pénale, sans portée sur le principe et le montant de la réparation ; qu'ensuite, n'entrent pas dans le champ d'application des dispositions spéciales de l'article 149 précité, les dommages résultant de la publication d'articles de presse mettant en cause le demandeur même s'ils relatent son arrestation, sa mise en examen et son incarcération, dès lors qu'un tel préjudice n'est pas directement causé par la privation de liberté ;
Attendu que compte tenu de l'âge de M. X... (53 ans) au moment de son incarcération, de la durée de celle-ci (7 jours), de son impact sur sa situation professionnelle et familiale, de son retentissement dans son milieu professionnel, l'indemnité réparant l'intégralité de son préjudice moral doit être fixée à 7.000 euros ;
Attendu que compte tenu des usages du barreau, l'équité n'exige pas qu'il soit fait droit à la demande d'indemnité sollicitée au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
DECLARE irrecevable le recours incident de M. Eric X... ;
ACCUEILLE le recours formé par l'agent judiciaire du Trésor et statuant à nouveau ;
ALLOUE à M. Eric X... une indemnité de 7.000 (sept mille euros) en réparation de son préjudice moral ;
REJETTE la demande de M. Eric X... de sa demande au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
LAISSE les dépens à la charge du Trésor Public.
Ainsi fait, jugé et prononcé en audience publique par la Commission nationale de réparation des détentions, le 1 avril 2005 où étaient présents : M. Canivet, président, M. Gueudet, conseiller rapporteur, Mme Gailly, conseiller référendaire, M. Finielz, avocat général, Mme Grosjean, greffier.
En foi de quoi la présente décision a été signée par le président, le rapporteur et le greffier.