AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à M. X... et à la Mutuelle des architectes français du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société ACT IARD, la société Winterthur Assurances Cabinet Boutet et Guinet et M. Bernard Y... ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 20 octobre 2003), que les époux Z... ont acquis de Mme A... un appartement dans un immeuble en cours de rénovation dont ils n'ont pu obtenir la délivrance en raison de désordres de construction ; qu'ils ont assigné la venderesse, maître d'ouvrage, ainsi que l'architecte et son assureur en résolution de la vente et en paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que M. X... et la Mutuelle des architectes français (MAF) font grief à l'arrêt d'accueillir les demandes, alors, selon le moyen :
1 / que le juge ne peut fonder sa décision sur un moyen qu'il relève d'office sans avoir préalablement ordonné la réouverture des débats pour permettre aux parties de s'expliquer sur son bien-fondé ;
qu'en l'espèce, pour retenir la responsabilité de l'architecte M. X..., la cour d'appel a considéré que les désordres affectant le bâtiment B ne relevaient pas exclusivement d'un défaut d'exécution mais également d'un défaut de conception car les plans de pose des éléments, réalisés par le fournisseur du plancher, mentionnent des longueurs de poutrelles trop courtes, les appuis des poutrelles du plancher hourdis sur les poutrelles métalliques sont insuffisants, aucun poteau ne traverse le volume du 2ème étage, les linteaux présentent une flèche inacceptable, ce qui implique une faiblesse de structure ou d'appui, il n'existe pas de raidisseur vertical, les boulons et écrous sont de section insuffisante et les bois des fermes sont sous-dimensionnés ; que, cependant, dans leurs conclusions d'appel, les époux Z... n'ont pas, ni d'autres parties à l'instance ni l'expert judiciaire, soutenu que ces différents éléments évoqués par la cour d'appel caractérisaient une faute de conception imputable à l'architecte ; que dès lors, en relevant d'office ce moyen sans avoir permis aux parties de s'expliquer sur son mérite, la cour d'appel a violé les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et 16 du nouveau Code de procédure civile ;
2 / que pour écarter le moyen invoqué par M. X... pris de l'immixtion fautive du maître d'ouvrage, qu'elle a admise, la cour d'appel a indiqué que cette immixtion ne saurait exonérer l'architecte des défauts de conception que dans la mesure où il serait établi que le maître de l'ouvrage aurait imposé de ne pas tenir compte des spécifications du projet originel, ce qui n'est pas le cas ; qu'en relevant d'office cet argument , qui n'avait pas été soutenu par les époux Z... ou par d'autres parties, sans avoir ordonné la réouverture des débats pour que les parties puissent en discuter, la cour d'appel a violé les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et 16 du nouveau Code de procédure civile ;
3 / que la restitution du prix de vente à la suite de l'annulation d'un contrat ne constitue pas un préjudice indemnisable par un tiers au contrat ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a prononcé la résolution du contrat par lequel Mme A... avait vendu un bien immobilier aux époux Z... et n'a ordonné la restitution du bien par les acquéreurs qu'en contrepartie de la restitution du prix et de ses accessoires ; qu'une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte à l'encontre de Mme A... ; que, pour condamner l'architecte chargé de la rénovation de l'immeuble dans lequel les époux Z... avaient acheté un appartement, et son assureur, à payer aux acquéreurs le prix du bien, la cour d'appel a relevé l'impossibilité pour le vendeur de restituer lc prix ;
qu'en se fondant sur cette circonstance, la cour d'appel a violé les articles 1371 et 1382 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé qu'il ressortait du rapport d'expertise un ensemble d'éléments révélant non seulement une exécution fautive mais également une conception notoirement insuffisante qui rendaient nécessaire la destruction du bâtiment, la cour d'appel, qui a exactement retenu que l'immixtion de Mme A... dans les travaux à partir de juin 1996 ne pouvait exonérer l'architecte des défauts de conception dès lors qu'il n'était pas établi que le maître d'ouvrage aurait imposé de ne pas tenir compte des spécifications du projet originel, a, sans violer le principe de la contradiction, pu condamner l'architecte à payer à Mme A... des dommages-intérêts incluant le prix de la vente résolue dès lors qu'elle avait constaté la mise en liquidation judiciaire de la venderesse et l'absence d'actif permettant d'espérer la couverture de la créance ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne, ensemble, M. X... et la Mutuelle des architectes français aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. X... et de la Mutuelle des architectes français, les condamne, ensemble, à payer aux époux Z... la somme de 2 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille cinq.