AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 20 novembre 2003) et les productions, que la société Regma solutions (la société Regma) a fait pratiquer une saisie-attribution au préjudice de la société Hordoir, entre les mains de l'établissement public EDF-GDF Seclin (l'EPIC EDF-GDF) et de la société Castorama ; que, soutenant que les tiers saisis n'avaient pas satisfait à l'obligation légale de renseignement, la société Regma a demandé à un juge de l'exécution leur condamnation, sur le fondement de l'article 60 du décret du 31 juillet 1992, au paiement des causes de la saisie et à des dommages-intérêts ; que le juge de l'exécution a accueilli la demande et que les tiers saisis ont interjeté appel ;
Sur le premier moyen :
Attendu que Mme X..., agissant en qualité de liquidateur de la société Regma, fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré nul le jugement rendu à l'encontre de l'EPIC EDF, alors, selon le moyen, que la nullité d'un acte de procédure ne peut être prononcée pour vice de forme qu'à la charge pour celui qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité commise ; qu'en relevant d'office que ces irrégularités avaient provoqué un retard dans la remise de l'acte à l'EPIC EDF et avaient empêché ce dernier, en raison des fêtes de fin d'année, de se présenter devant le premier juge, ce que l'EPIC EDF n'a nullement fait valoir devant elle, la cour d'appel a violé l'article 114 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que l'EPIC EDF ayant soutenu que l'irrégularité de la signification faite le 21 décembre 2001 avait retardé la remise de l'acte à son destinataire, de sorte que ce dernier n'avait pu se présenter à l'audience du 14 janvier 2002, la cour d'appel, en ajoutant qu'il s'agissait de la période des fêtes de fin d'année, s'est bornée, sans relever d'office un grief, à préciser les circonstances le caractérisant ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de l'avoir déboutée de sa demande de condamnation de la société Castorama au paiement des causes de la saisie, alors, selon le moyen :
1 / que le défaut de déclaration du tiers saisi, sauf motif légitime, est sanctionné par le paiement des sommes dues au créancier ;
que ne bénéficie d'aucun motif légitime le tiers saisi qui s'abstient par sa négligence de fournir les renseignements utiles au créancier ; qu'en conséquence, en refusant de condamner au paiement des sommes dues au créancier la société Castorama qui, en raison de sa négligence, n'a fourni aucune des informations requises, la cour d'appel a violé l'article 60 du décret du 31 juillet 1992 ;
2 / que le tiers saisi qui a pu légitimement ne pas répondre sur-le-champ aux réquisitions de l'huissier de justice reste tenu, sous peine de payer les sommes dues au créancier, de fournir par la suite à ce dernier les informations sur l'étendue de ses obligations à l'égard du débiteur ; qu'en l'espèce, il résulte de l'arrêt attaqué que la société Castorama, après avoir pu légitimement ne pas répondre sur-le-champ aux réquisitions de l'huissier de justice, s'est par la suite abstenue, de manière fautive, de fournir les informations requises à la société Regma ; qu'en conséquence, la cour d'appel a violé les articles 44 de la loi du 9 juillet 1991 et 60 du décret du 31 juillet 1992 ;
3 / qu'en cas de défaut de déclaration due à la négligence du tiers saisi, la condamnation à verser des dommages-intérêts s'ajoute, et ne se substitue pas, à la condamnation au paiement des sommes dues au créancier ; qu'en conséquence, en refusant de sanctionner par le paiement des sommes dues au créancier l'absence de déclaration de la société Castorama, la cour d'appel a violé l'article 60 du décret du 31 juillet 1992 ;
4 / que ne caractérise pas l'existence d'un motif légitime de nature à exonérer le tiers saisi de ses obligations légales la seule circonstance que l'enregistrement, par le tiers saisi, de la dette visée par le créancier ait pu prendre un certain délai ; qu'en conséquence, la cour d'appel a violé les articles 44 de la loi du 9 juillet 1991 et 60 du décret du 31 juillet 1992 ;
5 / qu'en relevant que l'enregistrement de la dette avait "pu" prendre un certain délai, la cour d'appel s'est prononcée par un motif hypothétique ; qu'en conséquence, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant relevé que le procès-verbal de saisie avait été délivré le 29 août 2001, en période estivale, à une personne assistante de direction qui ne pouvait disposer des renseignements suffisants propres à éclairer le créancier saisissant, et alors que la dette de la société Castorama, d'un faible montant par rapport au chiffre d'affaires habituel de la société, n'était exigible que depuis moins d'un mois, la cour d'appel a pu retenir que l'ensemble de ces circonstances caractérisait l'existence d'un motif légitime de ne pas répondre sur-le-champ à l'interpellation ;
Et attendu que la négligence fautive du tiers saisi ne peut donner lieu qu'à sa condamnation au paiement de dommages-intérêts ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de Mme X..., d'une part, d'EDF de deuxième part et de la société Castorama de troisième part ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze décembre deux mille cinq.