AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Joint les pourvois n° S 02-70.173 et n° K 03-70.125 ;
Sur la recevabilité du pourvoi n° S 02-70.173 :
Vu l'article 611-1 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que, hors les cas où la notification de la décision susceptible de pourvoi incombe au greffe de la juridiction qui l'a rendue, le pourvoi en cassation n'est recevable que si la décision qu'il attaque a été préalablement signifiée ;
Attendu que les consorts X... se sont pourvus en cassation le 27 novembre 2002 contre un arrêt rendu le 1er août 2002 ;
Attendu cependant qu'il ressort des productions que cet arrêt n'a été signifié que le 18 août 2003 ;
D'où il suit que le pourvoi n'est pas recevable ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi n° K 03-70.125, qui est recevable :
Vu l'article L. 13-8 du Code de l'expropriation ;
Attendu que lorsqu'il existe une contestation sérieuse sur le fond du droit ou sur la qualité des réclamants et toutes les fois qu'il s'élève des difficultés étrangères à la fixation du montant de l'indemnité et à l'application des articles L. 13-10, L. 13-11, L. 13-20 et L. 14-3, le juge règle l'indemnité indépendamment de ces contestations et difficultés sur lesquelles les parties sont renvoyées à se pourvoir devant qui de droit ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 1er août 2002, rectifié le 26 mai 2003), rendu sur renvoi après cassation (CIV. 3, 20 décembre 2000, n° T 99-70.263) qu'à la suite de la découverte sur le territoire de la commune de Vallon Pont d'Arc d'un ensemble de cavités souterraines dit "grotte Chauvet", contenant des vestiges préhistoriques, l'Etat a mis en oeuvre une procédure d'expropriation des terrains situés au dessus de cette grotte ou à proximité immédiate de celle-ci ; que les consorts X..., propriétaires d'un des terrains expropriés, faisant valoir qu'un litige était pendant devant le tribunal de grande instance sur la propriété de la grotte entre eux-mêmes et les consorts Y..., Z... et A..., ont demandé la fixation d'une indemnité alternative ;
Attendu que pour rejeter cette demande et débouter les consorts X... de leur demande d'indemnité pour dépossession de la grotte, l'arrêt retient qu'il appartiendra au seul juge du fond de statuer mais qu'en l'état, l'application des principes résultant de l'article 552 du Code civil au profit des consorts Y..., Z..., A... et B... n'est pas valablement contestée et que dès lors, faute pour les consorts X... de prouver que le réseau souterrain qui constitue la grotte Chauvet se rattache à leur propriété, il n'y a pas lieu de statuer sur la valeur de ce réseau ;
Qu'en statuant ainsi alors qu'elle avait constaté qu'une instance judiciaire était en cours devant le juge de droit commun portant sur la propriété de cette grotte, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi n° S 02-70.173 ;
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 1er août 2002, rectifié le 26 mai 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon (chambre des expropriations) ;
Condamne les consorts X... aux dépens du pourvoi n° S 02-70.173 ;
Condamne l'Etat français aux dépens du pourvoi n° K 03-70.125 ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de l'Etat français, le condamne à payer aux consorts X... la somme de 2 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé à l'audience publique du quinze février deux mille six par M. Villien, conseiller doyen, conformément à l'article 452 du nouveau Code de procédure civile.