AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 23 février 2005), que la société Imbert frères, aux droits de laquelle intervient désormais la société Saprimex, ayant été autorisée à faire pratiquer une saisie conservatoire au préjudice de la société Quality Product Meat sur les fonds détenus par la "commune d'Antibes - trésorerie municipale d'Antibes", a assigné cette société en référé pour obtenir sa condamnation à lui payer une provision ; que la société Quality Product ayant été déclarée en liquidation judiciaire, la société Imbert a déclaré sa créance auprès du mandataire liquidateur puis a assigné la trésorerie, avec la commune d'Antibes, devant un juge de l'exécution pour obtenir leur condamnation à lui payer sa créance outre des dommages-intérêts en soutenant que la trésorerie n'avait pas satisfait à son obligation de renseignement ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Saprimex fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable la demande de condamnation de la commune d'Antibes et de la trésorerie municipale d'Antibes au paiement des sommes pour lesquelles la saisie avait été pratiquée alors, selon le moyen :
1 / qu'aux termes de l'article 238 du décret du 31 juillet 1992, "le tiers saisi qui, sans motif légitime, ne fournit pas les renseignements prévus, s'expose à devoir payer les sommes pour lesquelles la saisie a été pratiquée, si le débiteur est condamné" ; que contrairement aux affirmations de l'arrêt attaqué, le texte ne subordonne pas la recevabilité de l'action contre le tiers saisi à la condamnation préalable du débiteur ; qu'en l'espèce, les juges du fond qui ont constaté expressément que le débiteur était en liquidation judiciaire, et que la créance avait été déclarée, ce qui suffit à établir que la société Imbert ne pouvait plus obtenir la condamnation de son débiteur, ne pouvait opposer l'absence de condamnation du débiteur pour déclarer irrecevable la demande dirigée contre le tiers saisi ; qu'il s'ensuit que la cour d'appel a violé les articles 31 et 32 du nouveau code de procédure civile et 238 du décret du 31 juillet 1992 ;
2 / qu'en déclarant irrecevable la demande de la société Imbert, au motif qu'elle ne justifiait pas de l'admission définitive de sa créance, tout en constatant que le débiteur était en liquidation judiciaire, que la société Imbert avait déclaré sa créance et que le mandataire liquidateur avait précisé qu'elle ne serait pas désintéressée, et sans rechercher si ces élements ne suffisaient pas pour mettre en oeuvre la sanction prévue par l'article 238, alinéa 1er, du décret du 31 juillet 1992, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;
Mais attendu que la saisie conservatoire, qui n'avait pas été convertie en saisie-attribution lors du jugement d'ouverture du redressement judiciaire du saisi, ne pouvait plus produire ses effets, de sorte que le créancier poursuivant ne pouvait faire condamner le tiers saisi qui n'avait pas satisfait à son obligation de renseignement au paiement des sommes pour lesquelles elle avait été pratiquée ; que par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, l'arrêt se trouve légalement justifié ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société Saprimex fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable la demande de condamnation de la commune d'Antibes et de la trésorerie municipale d'Antibes au paiement de dommages-intérêts alors, selon le moyen:
1 / que ni l'arrêt attaqué ni le jugement qu'il confirme ne comportent un quelconque motif sur la demande en dommages-intérêts de la société Imbert frères en violation de l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;
2 / que le 2nd alinéa de l'article 238 du décret du 31 juillet 1992 prévoit que le tiers saisi qui, sans motif légitime, n'a pas fourni les renseignements prévus peut être condamné à des dommages-intérêts en cas de négligence fautive ou de déclaration inexacte ou mensongère ; qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué constate que la trésorerie municipale d'Antibes n'a pas satisfait aux obligations prévues à l'article 238, alinéa 1er, du décret ; que, dès lors, en ne recherchant pas si cette négligence fautive ne justifiait pas l'allocation des dommages-intérêts demandés, la cour d'appel a violé l'article 238, alinéa 2, du décret du 31 juillet 1992 ;
Mais attendu que l'arrêt, en dépit de la formule générale du dispositif qui confirme le jugement du juge de l'exécution qui a "constaté l'irrecevabilité de la demande de la société Imbert", n'a pas statué sur le chef de demandes relatif aux dommages-intérêts dès lors qu'il ne résulte pas des motifs de la décision que la cour d'appel l'ait examiné ;
Que l'omission de statuer pouvant être réparée par la procédure prévue à l'article 463 du nouveau code de procédure civile, le moyen n'est pas recevable ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Saprimex aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette la demande de la société Saprimex ; la condamne à payer à la commune d'Antibes la somme de 2 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze septembre deux mille six.