AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 127-1 du code des assurances et 1134 du code civil ;
Attendu qu'aux termes du premier de ces textes, est une opération d'assurance de protection juridique toute opération consistant, moyennant le paiement d'une prime ou d'une cotisation préalablement convenue, à prendre en charge des frais de procédure ou à fournir des services découlant de la couverture d'assurance, en cas de différend ou de litige opposant l'assuré à un tiers, en vue notamment de défendre ou représenter en demande l'assuré dans une procédure civile, pénale, administrative ou autre ou contre une réclamation dont il est l'objet ou d'obtenir réparation à l'amiable du dommage subi ;
Attendu, selon le jugement attaqué et les productions, que M. X... a souscrit, le 23 octobre 2002, un contrat d'assurance de protection juridique auprès de la société Judicial gestion (l'assureur), renouvelable annuellement par tacite reconduction, avec au titre des options garanties la "protection exploitation" ; qu'il était stipulé, à l'article 1er des conditions particulières, que "les garanties dont bénéficie l'assuré, sont celles prévues dans les conditions générales de l'assureur pour toute procédure survenant et déclarée pendant la durée d'effet de l'adhésion. Cependant, ( ) en protection exploitation, l'existence du différend porté en justice, ne doit pas avoir été connue par l'assuré avant la date d'effet de l'adhésion de l'entreprise, et la première convocation en justice y afférent doit avoir été reçue au moins soixante jours après la souscription du contrat" ; que l'assureur, après avoir refusé de résilier le contrat à l'échéance de la première année, faute pour M. X... d'avoir respecté un délai de préavis de deux mois, a émis une facture correspondant à la prime due pour la nouvelle période d'assurance; que, cette somme n'ayant pas été réglée, l'assureur a obtenu une ordonnance d'injonction de payer à l'encontre de son débiteur ; que M. X... a fait opposition à ladite ordonnance, et a sollicité, reconventionnellement, la condamnation de la société Judicial gestion à lui régler des dommages-intérêts en réparation du préjudice né de l'inexécution par l'assureur de ses engagements contractuels dans le cadre du litige opposant M. X... à la société Ost ; qu'il a conclu à la compensation entre cette somme et la créance non contestée invoquée par l'assureur ;
Attendu que, pour débouter M. X... de sa demande reconventionnelle, le jugement énonce que le litige opposant M. X... et la société Ost est antérieur à la date de signature du contrat avec la société Judicial ; qu'en matière d'assurance, il ne peut être pris en charge un sinistre antérieur à la prise d'effet du contrat ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les conditions particulières du contrat de protection juridique conclu entre M. X... et la société Judicial gestion stipulaient que le fait générateur de la mise en oeuvre de la "protection exploitation", qui ne devait pas avoir été connu de l'assuré avant la date d'effet de l'adhésion, s'entendait de la remise d'un acte judiciaire ou extrajudiciaire révélant l'engagement des poursuites qui ne devait pas être intervenu moins de soixante jours après la souscription du contrat, le tribunal de commerce a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 7 juin 2005, entre les parties, par le tribunal de commerce de Brignoles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal de commerce de Draguignan ;
Condamne la société Judicial gestion aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette la demande de la société Judicial gestion ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept décembre deux mille six.