LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Pau, 24 octobre 2005), que M. X... a porté plainte auprès du procureur de la République pour des faits de viol allégués par sa fille mineure, Emma X... à l'encontre de M. Y... ; que celui-ci a été mis en examen du chef de viols sur mineure de 15 ans par personne ayant autorité ; que M. X... et Mme Z..., mère de l'adolescente, se sont constitués partie civile en tant qu'administrateurs légaux de leur fille ; qu'après le prononcé d'une ordonnance de non-lieu , confirmée par arrêt de la chambre de l'instruction, M. Y... a fait assigner devant le tribunal de grande instance Mlle Emma X... et ses parents en réparation du préjudice moral subi à la suite de cette dénonciation calomnieuse ;
Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande, alors, selon le moyen :
1°/ qu' indépendamment de toute volonté de nuire, la témérité d'une plainte ou d'une dénonciation est à elle seule susceptible d'engager la responsabilité de son auteur ; que la fausseté des faits qui étaient dénoncés par une plainte résulte nécessairement du prononcé d'une ordonnance de non-lieu ; qu'en l'espèce, pour établir la témérité reprochée aux parents de la mineure Emma X... en ajoutant foi aux allégations de celle-ci pour justifier leur plainte, M. Y... avait, dans ses conclusions d'appel, souligné que les plaignants avaient, tandis que le juge d'instruction avait rendu une ordonnance de non-lieu en l'absence de charges, persévéré dans leur plainte à l'encontre de M. Y... en interjetant appel de l'ordonnance de non-lieu, pour, en définitive, se borner à s'en remettre à l'appréciation de la chambre d'accusation ; qu'en s'abstenant de rechercher si cette initiative procédurale des parents de l'adolescente ne démontrait pas qu'ils avaient fait preuve de légèreté et de témérité en portant plainte sur la seule base des allégations de leur fille, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
2°/ que la responsabilité pesant sur les parents d'un enfant mineur en vertu de l'article 1384, alinéa 4, du code civil n'exclut pas la responsabilité personnelle de celui-ci, cette responsabilité personnelle du mineur et la responsabilité du fait d'autrui pesant solidairement sur les parents, ceux-ci et l'enfant mineur étant tenus envers la victime in solidum comme des coauteurs ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel M. Y... avait fait valoir que "les parents sont en tout état de cause tenus à indemnisation en leur qualité de représentants légaux de leur fille mineure car, si un doute a pu exister dans l'esprit du premier juge sur une éventuelle absence de faute des parents en leur nom propre, le doute était en revanche interdit au regard du comportement de leur fille qu'ils représentent, dont ils répondent civilement, et qu'ils doivent garantir au regard de l'article 1384 du code civil" et qu'ainsi, "en tout état de cause, la faute sera consacrée s'agissant des agissements de l'enfant à l'origine de cette plainte car elle, à tout le moins, en connaissait le caractère mensonger" ; qu'en retenant, par motif adopté du premier juge, pour débouter M. Y... de sa demande mettant en cause la responsabilité des parents de la mineure au titre de l'article 1384 du code civil, que celle-ci ne pouvait répondre civilement de faits commis du temps de sa minorité, la cour d'appel a violé l'article 1384, alinéa 4, du code civil, ensemble les articles 1382 et 1383 du même code ;
3°/ qu'en énonçant par ailleurs que la responsabilité de M. X... et de Mme Z... en tant que parents de la mineure ne pouvait pas être engagée "en l'absence de fait dommageable commis par cette dernière", quand, par adoption des motifs du premier juge, elle retenait que la plainte avait eu "pour origine la révélation par l'intermédiaire du petit ami d'Emma X... d'un abus sexuel dont cette dernière se disait avoir été victime", que "la parole de l'enfant" avait été "au démarrage de l'enquête" et que, tout au long de l'information, Emma X... avait maintenu ses accusations à l'encontre de M. Y..., ce dont il résultait que ces accusations portées à l'encontre de M. Y... avaient été à l'origine du préjudice dont celui-ci poursuivait la réparation en invoquant la témérité de la plainte déposée et poursuivie à son encontre sur la base des déclarations d'Emma X..., la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que, dans le contexte de cette affaire et eu égard aux développements judiciaires qui lui ont été donnés, l'attitude des parents de la jeune Emma X... qui avaient soutenu la parole de leur enfant, alors en grande détresse sur le plan psychologique, tout au long de l'information n'apparaissait pas constitutive d'une faute, et que rien ne démontrait que ceux-ci connaissaient la fausseté des allégations dénoncées ; qu'il n'était en outre nullement démontré qu'ils aient été à l'origine de la révélation de cette affaire à la presse ; qu'en dernier lieu, la responsabilité de M. X... et de Mme Z..., en tant que parents d'Emma, ne pouvait pas davantage être engagée en l'absence de fait dommageable commis par cette dernière ;
Que de ces seules constatations et énonciations, procédant de son pouvoir souverain d'appréciation de la valeur et de la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel, a pu déduire, par une décision motivée, que la plainte de M. X... et de Mme Z... n'était ni téméraire ni révélatrice d'une légèreté blâmable, et que leur responsabilité n'était caractérisée, ni à titre personnel ni en leur qualité de représentants légaux de leur fille mineure ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix avril deux mille huit.