LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses cinq branches :
Attendu que M. X... et Mme Y... se sont mariés en 1970 sous le régime de la séparation de biens ; que par acte du 1er octobre 1982, Mme Y... a donné en "location à titre gracieux" à son mari une maison lui appartenant en propre en considération du fait que cette habitation avait constitué leur domicile du 9 février 1971 au 19 décembre 1977, soit pendant plus de cinq ans, et s'est engagée à ne pas la vendre sans l'autorisation expresse de M. X... ; que le divorce des époux a été prononcé par jugement du 15 avril 1987 ; que le 24 mars 2003, Mme Y... a délivré à M. X... et sa seconde épouse un congé pour vente ;
Attendu que les époux X... font grief à l'arrêt attaqué (Rouen, 10 janvier 2006) d'avoir validé le congé et d'avoir ordonné leur expulsion dans le délai de deux mois à compter de la délivrance d'un commandement d'avoir à quitter les lieux, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en affirmant que la convention du 1er octobre 1982 par laquelle Mme Y... s'était engagée à ne vendre cet immeuble qu'avec l'accord de M. X... n'était que l'exécution des dispositions de l'article 215 du code civil et que l'engagement pris n'avait plus de cause à compter du divorce des époux, sans s'expliquer sur les éléments lui permettant de considérer que cette résidence secondaire serait, lors de la séparation de fait des époux, redevenue le logement de la famille, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 215 et 1131 du code civil ;
2°/ qu'en se bornant à affirmer, par motifs propres, que la convention du 1er octobre 1982 avait été conclue "dans le cadre de l'article 215 du code civil" et par motifs adoptés, qu'elle constitue "la simple retranscription des dispositions" de ce texte sans rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si la cause de l'engagement de Mme Y... ne résidait pas dans la participation de M. X... au financement de cette acquisition du bien appartenant en propre à Mme Y..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1131 du code civil ;
3°/ que l'existence de la cause d'un engagement doit s'apprécier au moment où il est souscrit ; qu'en affirmant que la convention du 1er octobre 1982 par laquelle Mme Y... s'était engagée à ne vendre cet immeuble qu'avec l'accord de M. X... n'était que l'exécution des dispositions de l'article 215 du code civil et que cet engagement n'avait donc plus de cause à compter du divorce des époux, la cour d'appel a violé l'article 1131 du code civil ;
4°/ qu'en relevant d'office le moyen selon lequel la sous-location de l'immeuble aurait été contraire à la convention du 1er octobre 1982 sans inviter les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
5°/ qu'en s'abstenant de préciser en quoi la sous-location des lieux aurait constitué une violation de la convention du 1er octobre 1982, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu que c'est par une interprétation souveraine de l'intention commune des parties que la cour d'appel a estimé que l'engagement à durée indéterminée pris par Mme Y... d'accorder à son mari la jouissance gratuite de l'ancien domicile conjugal et de ne pas vendre le bien sans son autorisation n'avait été souscrit qu'en considération des liens matrimoniaux qui unissaient les époux à la date de conclusion de la convention et avait pris fin avec la dissolution du mariage ; qu'elle a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les époux X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les époux X... à payer à Mme Y... la somme de 2 000 euros ; rejette la demande de la SCP Gatineau ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux octobre deux mille huit.