LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant retenu que les travaux de mise aux normes des vitrages ne relevaient pas de l'obligation de délivrance incombant au bailleur, la réglementation n'étant pas applicable à l'immeuble loué, construit avant l'entrée en vigueur de cette réglementation, que le remplacement d'un vitrage brisé par un vitrage répondant aux normes incombait à la locataire, le bail stipulant expressément que le preneur aurait la charge de tous les travaux qui pourraient être nécessaires pour mettre l'immeuble loué en conformité avec la réglementation existante ou telle qu'elle pourrait être modifiée, et qu'ainsi la société Pivoine était seule responsable de la résiliation du bail, la cour d'appel, qui n'était tenue ni de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée ni de répondre à un moyen que ses constatations rendaient inopérant, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Pivoine aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Pivoine et celle de Mme Mireille X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six janvier deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Richard, avocat aux Conseils pour la société Pivoine.
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté les demandes de la Société PIVOINE, tendant notamment à voir constater la résiliation du bail aux torts des bailleurs pour non-respect de leur obligation de délivrance et de jouissance paisible, et d'avoir condamné la Société PIVOINE à payer à Madame Y... les sommes de 640.199 FCFP, au titre des loyers et charges impayées en juillet 2003, et de 195.000 FCFP, au titre du loyer du mois d'août 2003 ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE les établissements recevant le public sont soumis à la délibération n° 708-2002/BAPS du 10 octobre 2002 relative au règlement de sécurité dans les établissements recevant du public ; qu'aux termes de section II § 4, les travaux de transformation dans les établissements existants doivent être conformes à la norme et faire l'objet d'un contrôle ; que, dès lors, en l'absence de mention expresse, les normes concernant les baies vitrées ne sont pas applicables rétroactivement aux immeubles construits antérieurement à la parution de la délibération sus-visée à moins qu'ils soient l'objet de transformation ; qu'en conséquence, la Société PIVOINE, qui est entrée dans les lieux en février 2001, ne peut se prévaloir des termes de cette réglementation pour prétendre que dans le cadre de son obligation de délivrance, il appartenait à la bailleresse dès la mise en application de la délibération de mettre le local en conformité ; que la norme n'étant pas applicable lors de l'entrée dans les lieux, elle ne peut également soutenir que son consentement était vicié et que, si elle avait eu connaissance que la baie vitrée n'était pas conforme, elle en aurait exigé le changement ; que l'article 9 mentionne que la bailleresse n'a à sa charge que les grosses réparations telles qu'elles sont définies par l'article 606 du Code civil, celles-ci intéressant l'immeuble dans sa structure et sa solidité générale ; qu'il en résulte que le remplacement des fermetures et des devantures ne font pas partie des travaux incombant au propriétaire ; qu'en outre, l'article 4 du bail stipule que « la charge des travaux qui pourraient être nécessaires pour mettre l'immeuble loué en conformité avec la réglementation existante (notamment les travaux de sécurité) sera exclusivement supportée par le locataire ; qu'il en sera de même si cette réglementation vient à se modifier et que, de ce fait, l'immeuble loué n'est plus conforme aux normes réglementaires » ; que, dans ces conditions, lors du changement de la baie vitrée, la Société PIVOINE devait procéder à la mise aux normes et cette dernière n'est pas recevable à prétendre sur ce moyen que Madame Y... n'a pas encore satisfait à son obligation de délivrance ; qu'est d'ailleurs tout aussi inopérant l'élément selon lequel le joint et la baie étaient en mauvais état, ainsi que l'a constaté pour le joint l'huissier de justice dans son procès-verbal du 17 mars 2003, cette simple constatation ne permettant pas en effet d'établir si le mauvais état invoqué est responsable de l'explosion de la baie ; qu'en conséquence, la société ne peut se prévaloir du moyen tiré de l'absence de jouissance paisible des lieux non établi pour soutenir que le bail a été résilié du fait de Madame Y... ; qu'il en résulte que la bailleresse a rempli ses obligations et que la Société PIVOINE, en quittant les lieux et en ne satisfaisant pas à son obligation de paiement des loyers, est à l'origine de la résiliation du bail ; que, dans ces conditions, le premier juge a exactement apprécié que la Société PIVOINE devait régler la totalité des loyers et des charges résultant de l'application du contrat de bail jusqu'à la nouvelle location au 1er septembre 2003, soit la somme de 835.199 FCFP, mais qu'elle devait aussi régler la majoration de 10 % prévue au bail de mai à juillet soit 56.018 FCFP, et que la Société PIVOINE devait être déboutée de ses demandes en résiliation du bail et en dommages-intérêts, ainsi que de ses autres demandes au fond qui y sont liées ;
ET AUX MOTIFS, A LES SUPPOSER ADOPTES, QU'il apparaît cependant que ce n'est pas cette inexécution partielle de son obligation par le bailleur qui a entraîné la résiliation du bail ; qu'en effet, dans le courrier du 19 mars 2003, l'avocat de la Société PIVOINE mettait en demeure le propriétaire de changer le châssis et le vitrage complet ; (…) que le courrier de l'avocat a été adressé à l'Agence générale après la demande relative à un autre local à louer, à laquelle l'agence a répondu par une télécopie du 18 mars ; que, dans la télécopie du 17 mars adressée à la Société PIVOINE, il est mentionné : « vous pouvez faire changer la baie brisée par une vitre de même épaisseur » ; que, cependant, ceci ne peut être considéré comme un refus de prise en charge, d'autant qu'elle n'est formulée que par la fille de la bailleresse, qui n'indique pas avoir reçu mandat pour cela ; que la Société PIVOINE elle-même ne s'y est pas trompée, puisqu'elle a adressé le même jour, mais quatre heures plus tard, une télécopie à l'Agence générale lui demandant quelle était la volonté du propriétaire ; que le refus de prise en charge de la mise aux normes de la baie vitrée cassée, notifié le 2 avril, (…), ne peut donc être retenu comme ayant poussé la Société PIVOINE à quitter les lieux ; qu'elle ne pouvait pas non plus retenir les loyers de sa propre autorité, sans y avoir été autorisée judiciairement ; que son avocat faisait d'ailleurs allusion à une saisine du juge des référés dans le courrier du 19 mars 2003 ; que, cependant, aucune procédure de ce type ne semble avoir été initiée ; que les déclarations des uns et des autres relatives aux conséquences immédiates du passage du cyclone ou à l'expression d'une volonté antérieure d'acquérir le local sont donc sans incidence et qu'il n'est nul besoin d'ordonner une enquête sur ce point ; que celles de Gérard Z..., qui mentionne le fait que l'opportunité d'acquérir un local n'a été envisagée que le 19 mars et seulement ce jour là, alors qu'il a été vu qu'une telle demande avait été formulée au moins la veille, ne sont pas plus objectives ou précises que d'autres ;
1°) ALORS QUE la Société PIVOINE faisait valoir que la vitre litigieuse n'était pas conforme à la norme NF P 78-201-1, applicable lors de son entrée dans les lieux, en vertu de l'arrêté n° 1348 du 22 novembre 1985 relatif à l'application en Nouvelle Calédonie des Normes Centralisées et des Documents Techniques Unifiés, et en déduisait que les bailleurs avaient manqué à leur obligation de délivrance ; qu'en se bornant néanmoins à relever, pour en déduire que le bailleur n'avait pas manqué à son obligation de délivrance, que la délibération n° 708-2002/BAPS du 10 octobre 2002, invoquée par la Société PIVOINE, n'était pas applicable lors de l'entrée dans les lieux, sans répondre aux conclusions de l'exposante relatives à la norme précité, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile de Nouvelle Calédonie ;
2°) ALORS QUE la Société PIVOINE faisait valoir que la vitre litigieuse ne respectait pas la réglementation en vigueur en matière de sécurité lors de son entrée dans les lieux, à savoir notamment la délibération n° 29-2000/APS du 18 octobre 2000 et l'arrêté métropolitain du 25 juin 1980 dans sa rédaction du 3 mai 1999, auquel cette délibération renvoyait ; qu'elle en déduisait que les bailleurs avaient manqué à leur obligation de délivrance ; qu'en se bornant néanmoins à relever, pour en déduire que le bailleur n'avait pas manqué à son obligation de délivrance, que la délibération n° 708-2002/BAPS du 10 octobre 2002, invoquée par la Société PIVOINE, n'était pas applicable lors de l'entrée dans les lieux, sans répondre aux conclusions de l'exposante relatives aux textes précités, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile de Nouvelle Calédonie ;
3°) ALORS QUE le bailleur ne peut s'exonérer conventionnellement de son obligation de délivrance du bien loué ; que la Société PIVOINE faisait valoir que le défaut de conformité du vitrage, révélé à la suite du passage du cyclone, la mettait dans l'impossibilité de poursuivre l'exploitation de son commerce dans le local objet du bail ; qu'en se bornant néanmoins à relever, pour considérer que la résiliation du bail n'était pas imputable à Madame Y..., qu'il appartenait à la Société PIVOINE, en vertu des stipulations contractuelles, de procéder à la mise aux normes du vitrage lors du changement de la baie vitrée, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si, eu égard à la destination des lieux prévue par le bail, Madame Y... étant tenue d'exécuter les travaux de mise aux normes en vertu de son obligation de délivrance de la chose louée, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1719 et 1184 du Code civil ;
4°) ALORS QUE le juge, saisi par un preneur d'une demande en résiliation judiciaire d'un bail, se prononce au regard de la gravité des manquements du bailleur à ses obligations, et non au regard du comportement du preneur ; qu'en considérant néanmoins, pour rejeter la demande de la Société PIVOINE tendant à voir prononcer la résiliation judiciaire du bail aux torts de Madame Y..., que le refus de prise en charge de la mise aux normes de la vitre cassée, notifié le 2 avril 2003 par les bailleurs, ne pouvait être retenu comme ayant poussé la Société PIVOINE à quitter les lieux, dès lors que celle-ci avait adressé à l'Agence Générale une demande relative à un autre local à louer le 18 mars 2003, considérant ainsi de façon hypothétique que la Société PIVOINE aurait résilié le bail même si les bailleurs avaient accepté de prendre en charge les travaux de mise aux normes, la Cour d'appel, qui ne s'est pas prononcée au regard des manquements reprochés à Madame Y... mais au regard du comportement de la Société PIVOINE, a violé l'article 1184 du Code civil.