LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu les articles L. 551-2 et L. 552-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Attendu que M. X..., ressortissant malien, a été interpellé et placé en garde à vue pour séjour irrégulier en France ; que le 22 novembre 2007, le préfet de police de Paris a pris à son encontre un arrêté de reconduite à la frontière et un arrêté de placement en rétention administrative, qui lui ont été notifiés, avec ses droits, le même jour à 10 heures 30 ; qu'en exécution de ces décisions M. X... a été conduit dans un centre de rétention administrative où il est arrivé à 12 heures 50 ; que le même jour le préfet de police de Paris a saisi le juge des libertés et de la détention d'une requête en prolongation de cette rétention ;
Attendu que pour constater l'irrégularité de la procédure et rejeter la requête l'ordonnance retient que les difficultés de circulation à Paris, ne pouvaient constituer des circonstances particulières, imprévisibles ou insurmontables de nature à justifier un délai de 2 heures 20 entre la notification des droits et l'exercice effectif de l'ensemble de ceux-ci, qui ne consistent pas seulement en la mise à disposition d'un téléphone ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait, d'une part, du procès-verbal dressé le 22 novembre 2007 à 10 heures 30 et, d'autre part, de ses propres constatations, que M. X... avait pris acte que, pour assurer l'exercice effectif de ses droits dès le début de la période de rétention, un appareil téléphonique était mis à sa disposition s'il le souhaitait, de sorte que M. X... avait été mis en mesure de faire valoir ses droits, le premier président a violé les textes susvisés ;
Vu l'article 627, alinéa 1er, du code de procédure civile ;
Et attendu que les délais légaux de maintien en rétention étant expirés, il ne reste rien à juger ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 27 novembre 2007, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Paris ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de la ordonnance cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit janvier deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils pour le préfet de Police de Paris
Le moyen reproche à l'ordonnance infirmative attaquée d'avoir annulé l'ordonnance du 24 novembre 2007 autorisant la prolongation du maintien en rétention de Monsieur X... pour 15 jours et statuant à nouveau, rejeté la requête de Monsieur le PREFET de POLICE de PARIS, dit n'y avoir lieu à prolongation du maintien de Monsieur Moussa X... en rétention administrative dans des locaux ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire et rappelé à l'intéressé qu'il avait l'obligation de quitter le territoire français,
AUX MOTIFS QUE " Monsieur Moussa X... demande l'infirmation de l'ordonnance au motif que c'est à tort que le juge des libertés et de la détention a rejeté les exceptions de nullité, tirées de l'irrégularité de son interpellation, de l'absence d'avis à parquet du placement en garde à vue, de l'absence d'exercice effectif de ses droits en rétention et de l'absence de convocation à l'audience ;
Aux termes des dispositions des articles 14 et 16 du nouveau code de procédure civile, nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée et le juge doit faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; aux termes des dispositions de l'article R 552-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les parties sont avisées par le greffe du jour et de l'heure de l'audience par tout moyen ; de ces dispositions, il ressort que c'est au juge qu'il appartient de vérifier que les parties ont été convoquées en temps utile pour préparer leur défense et, au besoin, de reporter l'examen de l'affaire en fin d'audience, soit de renvoyer l'affaire à la prochaine audience, s'il lui apparaît que les parties n'ont pas disposé du temps nécessaire ;
Il résulte des pièces du dossier que la requête du préfet a été déposée dans le délai légal mais qu'aucun élément de fait ne permet d'établir que monsieur X... a été effectivement avisé de la date d'audience, l'avis étant adressé par le greffe au centre de rétention sans que la preuve de la remise de cet avis à l'intéressé lui-même figure au dossier ; c'est à juste titre que monsieur X... fait valoir que ni sa présence à l'audience qui ne résulte que du fonctionnement interne du centre de rétention ni le fait qu'il était assisté de son avocat choisi au jour de l'audience, ne constituent la preuve qu'il a reçu l'avis d'audience, préalablement à sa comparution ; pour autant c'est à tort qu'il demande, pour ce motif, l'annulation de la procédure, la seule nullité qu'il soulève tenant à l'absence de temps pour préparer sa défense, ce qui ne peut conduire qu'à l'annulation de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention pour violation des articles 14 et 16 du nouveau code de procédure civile ; qui a statué sans établir que l'intéressé a disposé du temps nécessaire pour préparer sa défense
Il y a lieu, dès lors, d'annuler l'ordonnance et dans la mesure où l'intéressé a conclu à titre principal sur la requête du préfet de faire application des dispositions de l'article 562 du nouveau code de procédure civile ;
Aux termes de l'article L 552-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le juge des libertés et de la détention doit s'assurer que l'intéressé a été, au moment de la notification de la décision de placement en rétention, informé de ses droits et placé en état de les faire valoir ;
Il convient de rappeler que la faculté d'exercer effectivement des droits est de valeur égale à leur notification ; tout retard mis dans cet exercice porte nécessairement atteinte aux droits de l'intéressé, lorsqu'il n'est pas justifié par des circonstances particulières, imprévisibles ou insurmontables ;
En l'espèce, il n'est invoqué aucune de ces circonstances dans la procédure ; si le préfet invoque les éventuelles difficultés de circulation à Paris, il ne justifie pas qu'entre 10 h 30, heure de notification des droits et 12 h 50, heure d'arrivée au centre, de telles difficultés pouvaient constituer des circonstances de nature à justifier un délai de 2 h 20 entre la notification des droits et l'exercice effectif de l'ensemble de ceux-ci, qui ne consistent pas seulement en la mise à disposition d'un téléphone ; l'atteinte ainsi portée à l'exercice effectif de ses droits par l'intéressé rend la procédure irrégulière ;
Il convient, en conséquence, d'annuler l'ordonnance, et, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens d'appel, de rejeter la requête du préfet ",
ALORS D'UNE PART QUE le délégué du premier Président de la Cour d'appel de PARIS a relevé d'office et sans solliciter les observations du préfet de police, le moyen tiré de ce que Monsieur X... n'avait pu disposer d'un délai suffisant pour préparer sa défense devant le juge des libertés et de la détention, violant ainsi les articles 4, 14 et 16 du code de procédure civile,
ALORS D'AUTRE PART QU'en l'état des mentions de l'ordonnance déférée et du procès-verbal d'audition selon lesquelles Monsieur X... était présent à l'audience assisté d'un avocat dûment choisi, qu'il avait déposé des conclusions de nullité in limine litis et avait été entendu en ses observations, le magistrat délégué par le premier Président de la Cour d'appel qui a retenu que l'intéressé n'avait pu disposer du temps nécessaire pour préparer sa défense, a violé les articles 16 du code de procédure civile, L 552-1, L 553-5 et R 552-5 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
ALORS ENFIN QU'il ressort du document intitulé " vos droits au centre de rétention " daté du 22 novembre 2007 à 10 h 30 et annexé au procès-verbal, portant notification de placement en rétention administrative, établi le 22 novembre 2007 à 10 h 30 que le retenu reconnaissait avoir été pleinement informé de ses droits et placé en état de les faire valoir, ce dont il résultait que Monsieur X... avait pu exercer l'ensemble de ces droits dès ce moment si bien que le délégué du premier président de la Cour d'appel de PARIS a violé l'article L 551-2 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ensemble l'article L 552-2 du même Code.