LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le second moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 20 mars 2008), que, saisi par Roger X..., atteint d'un cancer occasionné par l'amiante, un tribunal des affaires de sécurité sociale a retenu, par jugement du 18 août 2005, la faute inexcusable des anciens employeurs de la victime, a fixé au maximum la majoration de rente prévue par l'article L. 452-2 du code de la sécurité sociale et a ordonné une expertise médicale ; que Roger X... étant décédé le 9 mars 2006, sa veuve, ses enfants et ses petits-enfants (les ayants droit) ont repris l'instance ; que, par jugement du 15 décembre 2006, le tribunal des affaires de sécurité sociale a fixé à une certaine somme, au titre de l'action successorale, l'indemnisation des préjudices extrapatrimoniaux subis par la victime et à certaines sommes les préjudices moraux subis par les ayants droit ; que ces derniers ont relevé appel de cette décision et ont présenté, le 12 avril 2007, une demande d'indemnisation au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (le Fonds) tant au titre de leurs préjudices personnels qu'au titre de l'action successorale ; que le 11 décembre 2007, ils ont saisi la cour d'appel d'un recours contre la décision implicite de rejet du Fonds ; que les deux procédures ont été jointes devant la cour d'appel ;
Attendu que le Fonds fait grief à l'arrêt de le condamner à payer certaines sommes aux ayants droit de Roger X..., au titre de l'action successorale, en réparation de son préjudice extrapatrimonial et certaines sommes à ses ayants droit, alors, selon le moyen, qu'aux termes de l'article 53-I, II, III et IV de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000, la saisine du Fonds ne peut tendre qu'à l'indemnisation de l'ensemble des chefs patrimoniaux et extrapatrimoniaux du préjudice subi ; qu'en décidant cependant que le Fonds devait prendre à sa charge les chefs de préjudice extrapatrimonial, subi par Roger X..., dont ses ayants droit avaient cependant obtenu la réparation, comme elle le constatait elle-même, auprès du tribunal des affaires de sécurité sociale, la cour d'appel a violé les dispositions susvisées ;
Mais attendu qu'il résulte des dispositions de l'article 53-IV, dernier alinéa, de la loi du 23 décembre 2000, que seules les décisions juridictionnelles devenues irrévocables allouant une indemnisation intégrale pour les conséquences de l'exposition à l'amiante emportent les mêmes effets que le désistement de la demande d'indemnisation présentée au Fonds ou de l'action en justice prévue au V du même article et rendent irrecevable toute autre demande présentée au Fonds en réparation du même préjudice ;
Et attendu que, n'étant pas irrévocable, le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale du 15 décembre 2006 ne pouvait emporter les effets d'un désistement de l'action engagée par les ayants droit de Roger X... en contestation de la décision du Fonds ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le premier moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne le Fonds d'Indemnisation des victimes de l'amiante aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes respectives des sociétés Balguerie et Bolloré ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept mai deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me LE PRADO, avocat aux Conseils pour le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
LE MOYEN reproche à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR, pour condamner le FIVA au paiement de diverses sommes, ordonné la jonction entre les procédures.
AUX MOTIFS QU' « il existe entre les deux litiges un lien tel, au sens de l'article 367 du Nouveau Code Procédure Civile, qu'il est de l'intérêt d'une bonne justice de les juger ensemble ; qu'il convient donc d'en ordonner la jonction ».
1°/ ALORS, d'une part, QUE, aux termes de l'article 53-I, II, III et IV de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 la saisine du Fonds ne peut tendre qu'à l'indemnisation de l'ensemble des chefs patrimoniaux et extrapatrimoniaux du préjudice subi ; qu'aux termes de l'article 53-VI de la loi du 23 décembre 2000, le fonds est subrogé, à due concurrence des sommes versées, dans les droits que possède le demandeur contre la personne responsable du dommage ainsi que contre les personnes ou organismes tenus à un titre quelconque d'en assurer la réparation totale ou partielle dans la limite du montant des prestations à la charge desdites personnes et intervient devant les juridictions civiles, y compris celles du contentieux de la sécurité sociale, dans les actions en faute inexcusable ; qu'aux termes des articles 53-IV, alinéas 1 et 2, et 53-VI, alinéa 2, de la loi du 23 décembre 2000, la Cour d'appel saisie d'une action en contestation de l'offre présentée par le FIVA n'a pas le pouvoir de se prononcer sur la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ; qu'en conséquence, la Cour d'appel saisie d'une action en contestation de l'offre présentée par le FIVA ne saurait prononcer la jonction entre cette instance et l'instance en reconnaissance de faute inexcusable et en fixation consécutive des indemnités dues à la victime ; qu'en prononçant cependant la jonction entre l'action en reconnaissance de faute inexcusable, formée par la victime et tendant à l'indemnisation de ses chefs de préjudice, et l'action en contestation de l'offre que lui a présentée la FIVA, la Cour d'appel a violé les dispositions susvisées.
2°/ ALORS, d'autre part, QUE, aux termes de l'article 367 du Code de procédure civile, le juge peut ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s'il existe entre les litiges un lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire ou juger ensemble ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans caractériser autrement que par simple affirmation le lien entre les litiges qui lui étaient soumis et l'intérêt d'une bonne justice pour les faire juger ensemble, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 367 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
LE MOYEN reproche à l'arrêt attaqué,
D'AVOIR alloué aux ayants droit de Monsieur X... au titre de l'action successorale résultant de son préjudice en réparation de son préjudice extra patrimonial, les sommes de 40.000 au titre du préjudice résultant des douleurs physiques, 30.000 au titre du préjudice moral et 20.000 au titre du préjudice d'agrément, alloué à Madame Anny Y..., épouse X..., la somme de 40.000 au titre du préjudice moral et d'accompagnement, alloué à Messieurs Laurent et Dominique X..., chacun, une somme de 15.000 au titre du préjudice moral et d'accompagnement, alloué à Mesdemoiselles Léonie et Gaëlle X..., représentées par leur père, Monsieur Laurent X..., chacune, une somme de 5000 au titre du préjudice moral, et dit que le FIVA sera tenu au paiement de ces sommes,
AUX MOTIFS QUE « sur le préjudice résultant des douleurs physiques, au vu des conclusions de l'expertise médicale ayant évalué ce chef de préjudice à 6/7 et de la durée de la maladie, il sera alloué, à ce titre, une somme de 40.000 ; que le préjudice moral consiste en la connaissance de l'exposition à l'amiante, la peur d'une évolution fatale de la maladie et en l'appréhension du suivi médical ; que la Cour, au vu des éléments de fait portés à sa connaissance sur la situation de Monsieur X... estime que ce chef de préjudice sera justement indemnisé par l'allocation de la somme de 30.000 ; que le préjudice d'agrément résulte non seulement de l'impossibilité de se livrer à une activité ludique et sportive mais en encore de la privation des agréments normaux de l'existence ; qu'au vu des éléments produits aux débats et notamment des témoignages recueillis dans l'entourage de Monsieur X... attestant qu'il était particulièrement limité dans les actes de la vie courante, ce chef de préjudice sera justement réparé par l'allocation d'une somme de 20.000 ; que, Madame X... a accompagné son mari tout au long de sa maladie qui a duré deux ans ; qu..au décès de ce dernier alors âgé de 61 ans, elle été atteinte de troubles anxio-dépressifs ; qu.'au vu de ces éléments, son préjudice moral et d'accompagnement sera justement réparé par une indemnité d'un montant de 40.000 ; qu'au regard de ces circonstances, il sera alloué à chacun des enfants majeurs la somme de 15.000 et à chacun des petits enfants la somme de 5000 en réparation de leur préjudice moral ; qu'en application de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 relative à l'indemnisation des victimes de l'amiante, le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante a pour mission de réparer l'intégralité des préjudices résultant de cette maladie professionnelle ; que, financé par une contribution de l'Etat et une contribution du régime général de la sécurité sociale, le fonds, dés lors qu'il est appelé par une victime dans une instance en vue de procéder à son indemnisation, a vocation à supporter la prise en charge de ces préjudices ».
ALORS QUE, aux termes de l'article 53-I, II, III et IV de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 la saisine du Fonds ne peut tendre qu'à l'indemnisation de l'ensemble des chefs patrimoniaux et extrapatrimoniaux du préjudice subi ; qu'en décidant cependant que le FIVA devait prendre à sa charge les chefs de préjudice extra patrimonial, subi par Monsieur X..., dont ses ayants droit avaient cependant obtenu la réparation, comme elle le constatait elle-même, auprès du Tribunal des affaires de sécurité sociale de la GIRONDE, ainsi que de leurs préjudices personnels, la Cour d'appel a violé les dispositions susvisées.