LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le second moyen, ci après annexé :
Attendu qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que la société civile immobilière Port du Lavandou (la SCI), à qui l'autorité publique avait consenti un contrat d'amodiation, ne bénéficiait en vertu de cette convention que d'une autorisation temporaire et précaire conférée à titre personnel par la puissance publique conformément à des règles qui ne sont pas celles du statut des baux commerciaux, que la SCI n'ayant pu transmettre plus de droit qu'elle en avait elle même aux époux X..., ces derniers n'avaient pu consentir sans réserve le 25 septembre 1989 un bail commercial conférant aux consorts Y... la propriété commerciale et que ce bail, vidé de son contenu, devait être annulé, la cour d'appel, qui a pu en déduire que les consorts Y..., qui en souscrivant à un tel bail étaient censés recueillir le bénéfice de la propriété commerciale afférente à l'établissement qu'ils avaient commencé à exploiter dans les lieux représentant une valeur incontestable, pouvaient prétendre à des dommages-intérêts, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision de ce chef ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le premier moyen, qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne, ensemble, M. Z... et la SCP Z... et A... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SCP Z... et A... et de M. Z... ; les condamne, ensemble, à payer aux consorts Y... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze septembre deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils pour M. Z... et la SCP Z... et A....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement du Tribunal de grande instance de TOULON du 17 mai 2004 en ses dispositions par lesquelles avait été déclaré nul et de nul effet le bail commercial conclu le 25 septembre 1989 entre les époux X... et les consorts Y... et en ce qu'il avait déclaré dépourvu d'effets le commandement de payer délivré aux consorts Y... le 27 mars 2002 ;
AUX MOTIFS QUE les époux X... fondent leur appel incident sur l'arrêt rendu par la Cour administrative d'appel de MARSEILLE le 31 mars 2004, qui a annulé le jugement du Tribunal administratif de NICE en date du 28 octobre 1998 ; qu'en effet, c'est en considération de ce jugement que la décision frappée d'appel énonce que le contrat d'amodiation du 30 décembre 1983 doit être tenu pour inexistant ; que, de cette annulation, ils tirent donc la conséquence qu « il ne peut plus être soutenu que la commune du Lavandou n'avait pas compétence pour consentir le contrat d'amodiation, ni que les actes et conventions subséquentes parmi lesquelles figurent tant l'acte de vente au profit des époux X... en date du 4 juillet 1985 que le bail commercial en date du 29 septembre 1989 étaient devenues inexistantes » ; mais qu'à la vérité, cet arrêt ne modifie en rien la nature des droits que la convention du 30 décembre 1983 est censée avoir conférés au Centre Européen de Promotion-France, voire à la SCI DU PORT DU LAVANDOU ; qu'en effet, le Tribunal a envisagé à juste titre l'éventualité selon laquelle l'acte serait valable, validité sur laquelle ne s'est d'ailleurs pas prononcée la Cour administrative d'appel, puisque son arrêt ne concerne que la question de compétence sur laquelle il a été rendu ; que, dans ce cas, et selon ce qui est prétendu par les époux X..., il s'agirait d'un contrat d'amodiation ; qu'or, d'une telle convention, l'amodiataire ne peut tirer qu'une autorisation domaniale ; que, limitée dans le temps, celle-ci n'est donnée qu'à titre personnel et précaire par la puissance publique, conformément à des règles qui ne sont pas celles du statut des baux commerciaux ; qu'il s'en suit que le bail commercial, consenti sans réserve le 25 septembre 1989, n'a pu conférer aux consorts Y... la propriété commerciale, et qu'il est donc vide de son contenu ; que, d'autre part, il n'est ni démontré, ni seulement prétendu que les bailleurs ou leurs auteurs tiendraient leurs droits d'un bail à construction, tel que prévu par l'article L. 251-3 du Code de la construction et de l'habitation, ou d'une autre opération quelconque qui leur aurait conféré un droit réel, dit « de superficie » sur des constructions réalisées par eux, et qui seraient cessibles indépendamment de la propriété des terrains ; qu'ils se bornent à alléguer (page 10 de leurs conclusions) une distinction qu'il faudrait admettre entre la propriété des terre-pleins du port et les « constructions qui y sont édifiées » sans justifier d'un quelconque titre qui permettrait une telle dissociation, et sans davantage expliquer quel serait ce droit, distinct de la propriété des sols, et que leur aurait conféré leur acquisition du 4 juillet 1985 ; qu'il convient donc de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré nul le bail commercial, ainsi que le commandement de payer, délivré sur le fondement d'un tel contrat ;
ALORS QU'un contrat ne peut être annulé pour erreur de droit, dès lors que celui qui l'invoque, au regard des circonstances de la cause et de sa situation personnelle, avait parfaitement connaissance de la nature des droits qu'il acquérait par l'effet du contrat ; qu'en affirmant que le bail commercial consenti le 25 septembre 1989 par les époux X... aux consorts Y... devait être annulé en ce que, portant sur des locaux construits sur un terrain amodié n'ayant fait l'objet que d'une autorisation d'occupation temporaire du domaine public, il ne pouvait conférer aux preneurs la propriété commerciale, sans répondre aux conclusions de Monsieur Z... dans lesquelles il faisait valoir que les consorts Y... ne pouvaient prétendre avoir ignoré que leurs droits étaient précaires, dans la mesure, notamment, où Monsieur Patrick Y... avait signé le 17 décembre 1988 un bail saisonnier portant sur ce local dont, en sa qualité de commerçant, il ne pouvait méconnaître, de par la configuration même des lieux, qu'il était implanté sur le domaine public maritime, la Cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement du Tribunal de grande instance de TOULON du 17 mai 2004 en ce qu'il avait débouté les consorts Y... de leur demande de dommages-intérêts dirigée contre les époux X... ;
AUX MOTIFS QU'il convient d'infirmer ce jugement en ses dispositions ayant rejeté la demande de Messieurs Patrick et Michel Y..., au motif qu'ils ne fourniraient la preuve d'aucun préjudice indemnisable ; qu'en effet, en souscrivant un bail commercial, ceux-ci étaient censés recueillir le bénéfice de la propriété commerciale afférente à l'établissement qu'ils avaient commencé d'exploiter et qui représente une valeur incontestable ; qu'il convient de recourir à une mesure d'expertise, afin d'en obtenir l'estimation ;
1°) ALORS QUE la garantie contre l'éviction d'un preneur, qui est l'exécution par équivalent de ce à quoi le bailleur était contractuellement tenu, ne saurait constituer un préjudice indemnisable sur le fondement de la responsabilité civile délictuelle ; qu'en considérant que les consorts Y... avaient droit à la réparation de la perte du bénéfice de la propriété commerciale afférente au local qu'ils avaient loué, quand le droit à renouvellement dont ils auraient ainsi été privés et qui consistait en une garantie contre l'éviction, n'était que l'exécution, par les époux X... des obligations contractuelles auxquelles ils s'étaient engagées, la Cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil
2°) ALORS QU'en toute hypothèse l'éviction d'un preneur ne peut être indemnisée que si elle est née, certaine et actuelle ; qu'en considérant que les consorts Y... auraient subi un préjudice indemnisable en ce qu'ils auraient été privés du bénéfice de la propriété commerciale afférente au local qui leur était loué, bien qu'ils n'aient aucunement été évincés de ce local par les époux X... qui ne leur ont pas refusé le renouvellement de leur bail, la Cour d'appel a derechef violé l'article 1147 du Code civil
3°) ALORS QU'en tout état de cause nul ne saurait obtenir à la fois la nullité d'un contrat et son exécution forcée, serait-ce que par équivalent ; qu'en considérant que les consorts Y... avaient droit à la réparation de la perte du bénéfice de la propriété commerciale afférente au local qu'ils avaient loué, ce qui correspondait à l'exécution forcée, par équivalent, de la garantie contre l'éviction contractuellement due par les époux X..., tout en prononçant la nullité du bail commercial qui avait été consenti aux preneurs, la Cour d'appel a encore violé l'article 1147 du Code civil ;
4°) ALORS QU'une perte ne saurait constituer un préjudice réparable si elle est compensée par un gain ; qu'en affirmant que les consorts Y... auraient subi un préjudice indemnisable en ce qu'ils auraient été privés du bénéfice de la propriété commerciale afférente au local qui leur était loué, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les preneurs avaient réalisé de nombreux profits du fait de leur jouissance commerciale qui ont constitué autant d'avantages venus contrebalancer la prétendue perte qu'ils auraient subie, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;
5°) ALORS QUE, nul ne saurait obtenir la réparation de la perte d'un avantage auquel il ne pouvait pas, en tout état de cause, être prétendu ; qu'en considérant que les consorts Y... avaient droit à la réparation de la perte du bénéfice de la propriété commerciale afférente au local qu'ils avaient loué, quand, mieux informés, ils n'auraient pu en toute hypothèse prétendre bénéficier d'une telle propriété sur des locaux qui avaient été construits sur des terrains amodiés, la Cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil.