La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/03/2010 | FRANCE | N°09-13636

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 11 mars 2010, 09-13636


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu les articles 35 et 36 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un juge des référés a condamné M. X... à restituer à la société Vega System, devenue la société Vega France (la société) et à M. Y... l'intégralité des documents comptables détenus chez M. Z..., huissier de justice, sous peine d'astreinte ; qu'une seconde ordonnance de référé, confirmée par un arrêt, a rectifié et complété la pre

mière décision et a ordonné à M. X... de restituer l'intégralité des documents comptables...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu les articles 35 et 36 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un juge des référés a condamné M. X... à restituer à la société Vega System, devenue la société Vega France (la société) et à M. Y... l'intégralité des documents comptables détenus chez M. Z..., huissier de justice, sous peine d'astreinte ; qu'une seconde ordonnance de référé, confirmée par un arrêt, a rectifié et complété la première décision et a ordonné à M. X... de restituer l'intégralité des documents comptables de la société sous peine de la même astreinte ; que la société et M. Y... ont saisi un juge de l'exécution d'une demande de liquidation de l'astreinte ;
Attendu que, pour rejeter la demande, l'arrêt retient que le juge de l'exécution ne peut, compte tenu de l'imprécision des obligations mises à la charge de M. X..., constater que l'injonction n'a pas été respectée et donc liquider l'astreinte ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il lui incombait de procéder à l'interprétation de la décision rectifiée assortie d'astreinte, la cour d'appel, qui a méconnu l'étendue de ses pouvoirs, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 janvier 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Agen ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ; le condamne à payer à la société Vega France et à M. Y... la somme globale de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze mars deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Hémery, avocat aux Conseils, pour la société Vega France et M. Y...

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté les demandes formées par les exposants tendant, d'une part, à ce que l'astreinte ordonnée par l'ordonnance du président du tribunal de commerce de TOULOUSE du 15 juillet 2004 rectifiée par l'ordonnance du 25 août 2005, elle-même rectifiée par ordonnance du 26 janvier 2006 soit liquidée à la somme provisoire de 1.575.000 € et, d'autre part, à ce que Monsieur Pascal X... soit condamné à verser cette somme à la société VEGA FRANCE ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE «l'article 8 du décret du 31/7/1992 dispose que le juge de l'exécution ne peut modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites ; qu'en l'espèce, la décision du 15/7/2004 condamne Pascal X... à restituer l'intégralité des documents comptables détenus chez Maître Z..., huissier, sous astreinte de 1.000€ par jour de retard à compter de la signification de la décision ; qu'il ressort du jugement rendu par le juge de l'exécution le 11/5/2005 et dont il n'a pas été relevé appel que cette obligation a été respectée par Pascal X... le 4/8/2004 ; l'ordonnance de référé du 15/7/2004 a été rectifiée et complétée par une nouvelle décision du 25/8/2005 qui ordonne à Pascal X... d'avoir à restituer l'intégralité des documents comptables de la société VEGA SYSTEM, et ce sous astreinte de 1.000 € par jour de retard à compter de la signification de la présente décision ; que la cour d'appel a, par arrêt du 21/11/2006, confirmé cette dernière en toutes ses dispositions ; que prétendant que l'obligation mise à la charge de Pascal X... n'a pas été respectée, la société Vega France et Jean-Louis Y... demandent la liquidation provisoire de l'astreinte ; qu'il sera tout d'abord observé que cette astreinte, qui ne peut être fondée que sur l'ordonnance modificative du 25/8/2005, ne pourrait en tout état de cause commencer à courir avant sa signification ; mais que surtout il conviendrait que les parties soient d'accord sur ce que recouvrent les termes de cette ordonnance, soit «l'intégralité des documents comptables de la société VEGA System» ; que tel n'est manifestement pas le cas ; qu'il convient dès lors d'examiner les divers documents produits pour rechercher si les demandes formulées par la société Vega System et Jean-Louis Y... ont été précisées ; qu'à la lecture de ces documents sont évoqués : *des documents comptables qui n'ont pas permis d'élaborer le bilan 2003 (cf. motivation de l'ordonnance 15/7/2004), *les justificatifs de la comptabilité tant pour l'année 2002 que pour l'année 2003 et la totalité des pièces comptables concernant la société Vega System en 2002 et 2003, tout particulièrement les factures et autres justificatifs permettant d'asseoir la comptabilité et les documents comptables (cf. requête en rectification matérielle et en omission de statuer du 31/5/2005), *l'ensemble des factures justifiant des dépenses et des recettes concernant la comptabilité des exercices 2002 et 2003 (cf. prétentions des parties reprises par la cour d'appel dans son arrêt du 21/11/2006) ; qu'il en ressort que les pièces comptables demandées n'ont jamais été précisées ; qu'en outre ces demandes n'ont jamais donné lieu à un véritable débat entre les parties, ce qui aurait permis de cerner précisément la liste des pièces réclamées à Pascal X... ; que le seul document qui reprend une liste précise est la lettre de M. B... en date du 15/10/2004 ; que toutefois aucune des décisions rendues n'y fait référence, tant dans la reprise des moyens et prétentions des parties que dans la motivation ou le dispositif, de telle sorte que la cour ne peut s'y reporter sans risquer de dénaturer le disposition de la décision du 25/8/2005 dont il est demandé l'exécution ; qu'il ressort de l'ensemble de ces éléments que le juge de l'exécution ne peut, compte tenu de l'imprécision des obligations mises à la charge de Pascal X..., constater que celle-ci n'a pas été respectée et donc liquider l'astreinte ; que la décision de première instance sera donc confirmée» (arrêt attaqué, p.4, avant-dernier et dernier §, p.5 et p.6, §1 et 2) ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'«il convient de rappeler qu'en application de l'article 8 du décret du 31 juillet 1992, le Juge de l'Exécution ne peut pas modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites ; que si le juge de l'exécution peut être amené à interpréter incidemment le titre exécutoire qui lui est soumis pour apprécier le contenu de l'obligation, il ne peut cependant modifier le dispositif de la décision sous couvert d'interprétation, ni y ajouter, ni y soustraire ; que force est de constater que l'ordonnance de référé rendue par le tribunal de commerce et l'arrêt rendu par la Cour d'Appel de Toulouse sont totalement imprécis sur les pièces à restituer et que, compte tenu des pièces déjà rendues par Monsieur X... ou par l'huissier de justice qui les détenait et des contestations soulevées, le Juge de l'Exécution est dans l'impossibilité de cerner la teneur exacte de l'obligation ou son exigibilité ; qu'il n'appartient pas au Juge de l'Exécution sous couvert d'interprétation d'imposer à Monsieur X... la communication de pièces complémentaires listées de manière totalement imprécise par la société VEGA et non mentionnées dans le titre à exécuter ce qui reviendrait à délivrer un titre exécutoire complémentaire au titre à exécuter ; qu'il convient en conséquence de débouter la société VEGA France et Monsieur Y... de leurs demandes» (jugement, p.3, §5 à 8) ;
ALORS, EN PREMIER LIEU, QU'est sans ambiguïté aucune le dispositif de l'ordonnance qui «ordonne à Pascal X... d'avoir à restituer l'intégralité des documents comptables de la société Vega System, et ce sous astreinte de 1.000 € par jour de retard à compter de sa signification la présente décision» ; qu'aussi en rejetant la demande formée par la société VEGA France et Monsieur Jean-louis Y... en liquidation de l'astreinte en cause, motif pris de ce qu'il ne serait pas possible de déterminer ce que recouvre la locution « l'intégralité des documents comptables», la cour d'appel a violé les articles et 36 de la loi du 9 juillet 1991 ;
ALORS, EN DEUXIEME LIEU ET SUBSIDIAIREMENT, QUE si le juge de l'exécution ne peut pas modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites, il est tenu, en cas d'ambiguïté, d'interpréter le titre exécutoire pour cerner la teneur exacte de l'obligation imposée au débiteur poursuivi ; qu'en refusant d'interpréter l'ordonnance du 25 août 2005, après avoir pourtant constaté «l'imprécision des obligations mises à la charge de Monsieur Pascal X...» (p.6, §1), pour écarter la demande de liquidation d'astreinte formée par les exposants, la cour d'appel a violé les articles 35 et 36 de la loi du 9 juillet 1991 et L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire ;
ALORS, EN TROISIEME ET DERNIER LIEU, que l'accord des parties ne saurait suffire à fixer le sens d'une décision ; qu'aussi en subordonnant notamment la liquidation de l'astreinte ordonnée par la décision du 25 août 2006 à un accord des parties sur le sens à donner à la locution désignant «l'intégralité des pièces comptables de la société VEGA SYSTEM», la cour d'appel a, de nouveau, violé les articles 35 et 36 de la loi du 9 juillet 1991 et L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire ;


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 09-13636
Date de la décision : 11/03/2010
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

JUGE DE L'EXECUTION - Compétence - Astreinte - Liquidation - Décision ayant ordonné l'astreinte - Interprétation

ASTREINTE (loi du 9 juillet 1991) - Liquidation - Compétence - Juge de l'exécution - Décision ayant ordonné l'astreinte - Interprétation

Il incombe au juge de l'exécution, lorsqu'il est saisi d'une demande de liquidation du montant d'une astreinte, de procéder, si nécessaire, à l'interprétation de la décision assortie d'astreinte. Dès lors, encourt la cassation l'arrêt d'une cour d'appel qui, pour rejeter une demande de liquidation d'une astreinte, retient que le juge de l'exécution ne peut, compte tenu de l'imprécision des obligations mises à la charge du débiteur, constater que l'injonction n'a pas été respectée


Références :

articles 35 et 36 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 20 janvier 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 11 mar. 2010, pourvoi n°09-13636, Bull. civ. 2010, II, n° 51
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, II, n° 51

Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne
Avocat général : M. Mazard
Rapporteur ?: M. Sommer
Avocat(s) : Me Hémery, SCP Boré et Salve de Bruneton

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.13636
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award